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Titre du blog : La Nation
Auteur : africanostra
Date de création : 13-11-2009
 
posté le 05-07-2010 à 13:05:26

LE NIGERIA, PRESIDENT DU CONSEIL DE SECURITE

 

LA DIPLOMATIE AFRICAINE A L’HONNEUR
Le Nigeria, Président du Conseil de sécurité pour le mois de Juillet 2010

 

 

 

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Un trimestre après la Présidence gabonaise du Conseil de sécurité, le Nigeria va diriger l’organe des Nations Unies responsable de la mission fondamentale du maintien de la paix et de la sécurité internationaleS en Juillet. Au regard du fruit des consultations plénières privées que Son Excellence Madame Joy OGWU, Représentant permanent du Nigeria a eu avec d’autres Membres du Conseil, on peut d’ores et déjà noter que l’agenda de ce grand pays africain, ami du GABON, ne sera pas de tout repos, à en juger par les informations quotidiennes du Conseil et celles contenues dans les éditions du Journal officiel des Nations Unies de la semaine écoulée. En effet, le choix des questions inscrites à l’ordre du jour du Conseil coïncide parfaitement avec le rôle du Nigeria dans les questions de paix et de sécurité en Afrique ; notamment en Afrique de l’Ouest, soit dans le cadre global des Nations Unies ou, soit dans le registre bien plus localisé de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et de sa brigade armée qu’est l’ECOMOG. Convient-il de voir, successivement, les questions de procédure (I) et les principaux défis de la présidence nigériane (II).

 

I)-Les questions de procédure : prévisions mensuelles provisoires et programme de travail

Malgré la lenteur de leur aboutissement, les revendications aux fins de réforme du Conseil de sécurité ont néanmoins débouché sur une amélioration de ses méthodes de travail. Il en est ainsi des mécanismes de communication et d’information, qui font l’objet d’une Note du Président du Conseil en date du 19 Juillet 2006. Cette attention concerne en priorité les Etats membres de l’ONU non admis au Conseil de sécurité (S/2006/507, Annexe). Mais elle touche également le monde des chercheurs et autres curieux intéressés par l’activité des Nations Unies. Quant à l’information des Membres du Conseil de sécurité, ceux-ci en examinent aisément les éléments dans le cadre des travaux du Groupe de travail informel relatif à la documentation du Conseil.

 

Telles sont les questions procédurales ayant conduit l’Ambassadeur OGWU à présenter les prévisions mensuelles provisoires et le programme de travail en tant qu’ordre du jour du Conseil pour le mois de Juillet 2010. Une fois élagués ces préalables, il convient de voir en quoi consistent précisément les défis du Nigeria en qualité de Président du Conseil de sécurité.

 

 

 

II)-Les principaux défis de la présidence mensuelle du Nigeria au Conseil de sécurité

La rémanence accusée dans la publication du programme mensuel du Conseil ne  me permettant pas de décliner l’ensemble des points inscrits à l’ordre du jour pour le mois de Juillet, je m’emploierai à relever les points indiqués par le Nigeria lors de la conférence de presse de son Représentant permanent, un jour après le début de sa présidence. Aussi, convient-il de distinguer les débats publics thématiques, moments propices à l’adoption de grandes décisions (1), d’autres questions internationales, dont le caractère subsidiaire peut s’avérer trompeur (2). 

 

(1)-Les débats publics thématiques, moments propices à l’adoption de grandes décisions

A considérer l’exposé fait par Mme l’Ambassadeur OGWU le 02 Juillet, trois (3) débats publics seront animés au Conseil de sécurité durant la présidence nigériane. Un rappel succinct de ces temps forts est essentiel pour comprendre dans quelle atmosphère l’illustre organe aura à travailler cet été.

 

*La question de la protection des civils dans les conflits armés.-Question classique du Droit international s’il en est, la protection des civils dans le conflits armés est une antienne. Elle est, notamment, au cœur d’une branche juridique spécialisée appelée Droit humanitaire international, dont la quatrième Convention de Genève du 12 Août 1949 et du Protocole additionnels n° I du 8 Juin 1966 rendent parfaitement compte. Comment faire la guerre tout en préservant les civils, alors que le principal enjeu des conflits est, justement, de rallier à soi une partie ou l’ensemble de la population et que toute velléité d’indifférence, de neutralité, d’impartialité ou, pire, de résistance des civils, fait échec aux objectifs de l’engagement militaire ?

C’est à cette question, à la confluence du droit humanitaire et d’une autre spécialité que sont les droits de l’homme, que viendront certainement répondre le Secrétaire général adjoint des Nations Unies chargé des questions humanitaires et le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, lors de ce premier débat public prévu pour le Mercredi 07 Juillet autour du «  Fer à cheval » en présence de SEM Ban Ki-moon lui-même. En tant que pays fortement impliqué dans la gestion des crises en Afrique de l’Ouest et territoire en proie à des affrontements communautaires récurrents, le Nigeria semble être le mieux placé pour présider à ces débats dont l’intensité s’annonce déjà houleuse. Ce qui ne signifie, bien évidemment pas, que le prochain sujet soit dénué de tout intérêt. 

 

*Le problème de la prévention des conflits et du règlement des différends.-Bien au contraire, le problème de la prévention des conflits et du règlement des différends est le parfait complément du débat public précédent. On peut même dire qu’il en est le préalable car les civils ne peuvent être protégés que si les instances compétentes parviennent à prévenir ou désamorcer les causes originelles de leurs souffrances. Ce second débat public aura vraisemblablement lie au Conseil le 16 Juillet. Comme je l’ai indiqué plus haut, la dimension africaine de ce problème est clairement mise en évidence, dans la mesure où les travaux seront présidés par le ministre des Affaires étrangères du Nigeria sur une thématique qui ne cultive aucune ambiguïté : « l’optimisation de l’utilisation de l’action préventive, les nouveaux outils, les défis et les perspectives pour l’Afrique .» Perspective que soutient le Représentant permanent auprès des Nations Unies en rappelant l’engagement du Nigeria pour les questions de maintien de la paix et de la sécurité internationales dans sa sous-région d’appartenance depuis son accession à l’indépendance en 1960. Là encore, les discussions promettent d’être animés, tant le problème de prévention des conflits et de règlement des différends constitue l’un des échecs les plus palpables de l’Organisation universelle. A en juger par le foyer de tensions et de drames que constitue le Moyen-Orient. 

 

*L’écheveau du Moyen-Orient, y compris la Palestine.-Devenu chronique, l’enchevêtrement des crises du Moyen-Orient et de la Palestine fait désormais l’objet d’une communication mensuelle du Secrétariat des Nations Unies ; et c’est à cet effet qu’il importe de considérer l’exposé attendu le 21 Juillet comme troisième débat public thématique organisé au Conseil de sécurité sous présidence nigériane. Les polémiques encore vives sur les violences orchestrées sur la flottille humanitaire à destination de Gaza en début Juin ne manqueront pas de nourrir ce débat, d’autant plus que les tractations sur la constitution d’une mission d’enquête indépendante sont en cours. Tels sont les moments où l'on peut attendre du Nigeria la facilitation de l'adoption d'importantes résolutions du Conseil de sécurité, pour rendre encore meilleur ce Monde d'incertitudes croissantes.

 

Le fait de souligner ces thématiques ne voulant pas insinuer un défaut d’intérêt pour d’autres questions internationales posées sur la table du Conseil, il importe d’en rappeler également les points et les enjeux.

 

(2)-D’autres questions internationales, dont le caractère subsidiaire peut s’avérer trompeur

Une demi-douzaine de questions internationales apparemment accessoires font partie de celles qui ouvrent la présidence rotative du Conseil de sécurité par le Nigeria. Autant en examiner immédiatement l’agenda pour en saisir les enjeux.

*L’épine du Kosovo.- Le 6 Juillet, la présidence nigériane du Conseil de sécurité s’ouvre effectivement avec la discussion de l’épine planté au cœur de la Serbie : le Kosovo. Dans une lettre adressée au Président du Conseil le 2 Juillet par SEM Feodor Starcevic, Représentant permanent de la Serbie (S/2010/355)*, le gouvernement serbe demande la tenue d’une réunion d’urgence ce 5 Juillet « pour examiner la détérioration alarmante de l’état de la sécurité dans la partie nord du Kosovo qui a déjà provoqué des pertes humaines et risque d’entraîner de nouvelles violences. » L’importance de cette réunion est attestée par la présence de M. Boris Tadic, Président de la République de Serbie en personne. L’indépendance du Kosovo, proclamée le 17 Février 2008, en dépit de la résolution 1244 (1999) reconnaissant la souveraineté de la Serbie sur cette province, n’a donc pas permis d’apaiser les tensions dans cette partie des Balkans. L’attention du Conseil de sécurité y est alors entièrement requise, tout comme elle l’est au sujet du Conseil international consultatif et de contrôle.

 

*Les avancées au sein du Conseil international consultatif et de contrôle du Fonds de développement de l’Irak.-Cet organe, créé en vertu de la résolution 1483 (2003), vise à garantir l’utilisation transparente des ressources dudit instrument ; notamment, « que les ventes à l’exportation de pétrole, de produits pétroliers et de gaz naturel provenant d’Iraq soient mises en conformité avec les pratiques optimales en vigueur sur le marché international » (Communiqué de presse, SG/SM/9053 IK/408 du 05/12/2003)*. Ce Conseil international tient une réunion le 12 Juillet au Conseil de sécurité sous présidence du Nigeria, afin d’en évaluer les avancées. La situation précaire de l’Irak ne fait aucun doute sur l’intérêt majeur que revêt cette question, d’autant plus que le mandat de cet organisme spécial devait normalement expirer le 31 Décembre 2009 et que la réunion de New York est certainement la cinquième de l’année 2010 tenue à ce sujet (Assemblée générale- Cinquième Commission, AG/AB/3941, 02/03/2010)*.

 

*L’évolution de la situation en Guinée Bissau.-La situation que présente la Guinée-Bissau depuis l’attentat fatal au Président Lino Vieira est de plus préoccupantes, notamment pour le Nigeria, puissance régionale d’Afrique de l’Ouest. Aussi, l’examen le 15 Juillet du rapport du Secrétaire général de l’ONU sur le Bureau des Nations Unies pour la consolidation de la paix dans ce pays (BINUGBIS) constituera-t-il un moment d’extrême attention au Conseil de sécurité. L’exposé de M. Mutatoba, chef dudit Bureau est donc attendu avec grand-intérêt. Cette question doit, à l’évidence, être rapprochée de l’évaluation globale de la situation en Afrique de l’Ouest.

 

*L’évaluation du pouls de l’Afrique de l’Ouest.-Bien qu’intervenant plus tard, le 30 Juillet, l’examen du rapport du Secrétaire Général sur le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest cadre parfaitement avec la réunion organisée autour du rapport sur la BINUGBIS, dont les sujets constituent une bonne partie des préoccupations sous-régionales. Mais, comme on peut s’en douter, l’agenda de la présidence nigériane s’étend à l’ensemble des situations de crises, de conflits et tensions, tels que le Darfour et l’Erythrée, notamment.

 

*L’examen du mandat de la MINUAD.-En effet, le 19 Juillet 2010, le Conseil est préposé organiser d’intenses consultations avec les Etats contributeurs de troupes de la Mission des Nations Unies et de l’Union africaine au Darfour. A la suite de quoi, M. Le Roy, Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, exposera ses vues sur la MINUAD le 27 Juillet en attendant l’examen du renouvellement de son mandat deux jours plus tard. La conjonction des efforts de l’ONU et de l’UA donne ainsi au Nigeria l’opportunité de peser de tout son poids sur l’issue favorable des consultations à venir ; tout comme il aura à s’y prendre lors des débats sur l’Eryhtrée.

 

*Le réexamen de la résolution 1907(2009) sur les sanctions contre l’Erythrée.-La Corne de l’Afrique porte assez bien ce nom belliqueux, à en juger par le différent frontalier qui oppose l’Erythrée à Djibouti, et dont l’examen des sanctions décrétées par la résolution 1907 (2009), le 12 Juillet au Conseil de sécurité sous présidence du Nigeria vise justement à calmer les tensions. Bien entendu, en dehors de ces questions formellement inscrites à l’agenda du Conseil, celui-ci reste saisi d’autres problèmes préoccupant la Communauté internationales restent. Parmi ces problèmes, on peut aisément noter la situation délétère en Côte d’Ivoire, où le Conseil de sécurité vient de proroger le mandat de l’ONUCI ; la question du désarmement, dont une conférence réunit les Etats concernés du 31 Mai au 16 Juillet ; le casse-tête de la justice internationale au travers des juridictions ad hoc. Mais il doit également être adjoint aux questions susceptibles d’être ramenées sur la table du Conseil, celles relatives à la Commission de consolidation de la paix, conjointement traitées par l’ONU (Assemblée générale et Conseil de sécurité) et l’Union africaine (le Conseil de paix et de sécurité) tel qu’il apparaît des programmes de travail qui mobiliseront en Juillet les deux Organisations. 

 

 

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Le début de l’année 2010 aura consacré le rayonnement de la Diplomatie africaine, tant au regard de la présidence réussie du Conseil de sécurité par le GABON, qu’à l'aune de celle du Nigeria, qui s’annonce tout aussi exaltante en attendant le tour de l’Ouganda en Octobre. En considération de la situation complexe du Golfe de Guinée et de la place prépondérante qu’occupe le Nigeria dans cette sous-région, on peut néanmoins déplorer qu’un point particulier touchant à la circulation illicite des armements ou au commerce illégal des matières premières n’ait pas été inscrit à l’ordre du jour de sa présidence mensuelle. Mais nous osons espérer que la Délégation gabonaise, conduite par Son Excellence Monsieur Emmanuel ISSOZE-NGONDET s’inscrira parmi les orateurs des points retenus dans le programme de travail mensuel pour Juillet 2010, afin de revitaliser la VOIX DE L’AFRIQUE A L’ONU. 

 

 

 Arthur BENGA NDJEME : Nancy, le 05 Juillet de l’An 10, 12h 37.