Mounana, mon amour !
Comment ne pas pleurer en croquant la vie ?
Malgré sa douceur, sa splendeur, son charme,
La Terre est un gros oignon ; nos larmes
Naissent de son rire et de son agonie.
De nos Terres, je t’ai aimée, Mounana !
Dans un hôtel parsemé de narcisses,
Tu comptais une à une mes vibrisses,
Le front coupé par un joli bandana.
Et je t’ai chérie, du fin fond des ghettos
De notre insouciante enfance
A la belle et douce Terre de France,
En passant par le pavillon Soweto.
Comment ne pas pleureur en croquant la vie ?
Malgré sa valeur, sa candeur, son calme,
La Terre est un gros oignon ; nos larmes
Naissent de ses rêves et mélancolies.
Toutes nos causeries sur les bancs de grès,
Face aux conquérants radeaux de jacinthes
Et au tapis de roseaux vert absinthe,
Sont pour mon âme meurtrie un doux engrais.
Pour m’avoir soufflé l’air de tes lotions,
Souviens-toi du marché de Wazemmes,
Des soirées passées à fêter baptêmes,
Anniversaires, bals de promotions !
Comment ne pas pleurer en croquant la vie ?
Malgré ses couleurs, ses pasteurs, son charme,
La Terre est un gros oignon ; nos larmes
Naissent du nectar des lys et gazanies.
Faut-il donc renoncer à ton baptême
Chrétien pour te convertir au Bwiti
Et retourner vivre au fond des Matitis,
Pour ce radon qui t’a rendu si blême ?
Nous survivons à la malnutrition,
Aux épidémies et à la misère ;
Tu survivras donc à ces carrières
Qui t’empoisonnent par leur pollution !
Comment ne pas pleurer en croquant la vie,
Mounana ? Malgré sa chaleur, son charme,
La Terre est un gros oignon ; nos larmes
Naissent de ses cris et de son anémie.
Nancy, le 29.XII.2009, 19h08