VEF Blog

Titre du blog : La Nation
Auteur : africanostra
Date de création : 13-11-2009
 
posté le 24-02-2013 à 10:21:07

Le nom du président de la République

 

 

La protection du nom du président de la République


 

Par Dr Arthur BENGA NDJEME

Assistant en Droit Public à l'Université...Omar Bongo

 

****

 

a.Certains président de la République peuvent atteindre un degré de popularité conduisant certains citoyens à baptiser leurs enfants de leur nom. Le cas du président des Etats-Unis d'Amérique, M. Barack OBAMA, en est un exemple patent. Dès son élection et son investiture, beaucoup d'enfants nés à travers le monde reçurent soit son prénom, soit son nom, soit cumulativement ses nom et prénom.

 

b.Le succès auquel était parvenu le président de la République gabonaise, SEM. BONGO ONDIMBA Albert-Bernard puis Omar, a suscité un élan tel, que le droit a dû intervenir sinon, pour interdire, mais tout au moins, pour réglementer l'attribution du "nom présidentiel" aux enfants gabonais. C'est à cet objectif que va précisément s'employer le décret n° 673/PR du 18 Mai 1974 (J.O. n° 16 du 8 juillet 1974, p.2)*.

 

c.Le décret  n° 678/PR prescrit, tout d'abord, l'interdiction de l'attribution aux enfants du nom du président de la République.- En effet, tel qu'il est identifié, l'acte pris le 18 Mai 1974 a pour but l'interdiction de donner aux enfants le nom du président de la République.

 

d.La disposition légale invoquée, pour soutenir cette interdiction, est à rechercher aux articles 93 et suivants du Code civil gabonais en son Livre Ier, régi par la Loi n° 15/72 du 29 juillet 1972*.

 

e.Aux termes de l'article 93, le Droit gabonais de la famille dispose que l'attribution du nom à un enfant est strictement liée à sa filiation, ledit nom devant précéder celui de son père. Ainsi, dans le nom Nzaou-Ngouangui, on comprendra que l'enfant Nzaou est le fils de (père) Ngouangui. Attribuer à un enfant gabonais le nom du président de la République serait donc problématique au regard des droits et devoirs de la filiation dans le système juridique gabonais.

 

f.Afin de se doter d'un mécanisme de mise en oeuvre efficace, le décret n° 678 instaure un système de sanction fondé sur l'ordonnance n° 43/70 du 28 Juin 1970 interdisant l'utilisation abusive du nom du Chef de l'Etat. Ceci qualifie, de facto, la violation du décret n° 678, interdisant l'attribution du nom du président de la République aux enfants, à une infraction.

 

g.En réalité, aussi rigoureux que puisse paraître cet acte administratif, l'interdiction dont il est porteur n'est pas absolue. Elle est effectivement  assortie, d'autre part, d'un certain nombre de conditions.

 

h.Le premier aménagement à l'interdiction instaurée par le décret n° 678/PR du 18 Mai 1974 est la possibilité offerte ou ouverte aux citoyens d'attribuer, séparément, le nom ou les prénoms du Chef de l'Etat à leurs enfants. Autrement dit, dénommer son enfant "Albert-Bernard", "El Hadj Omar" ou "BONGO", n'est pas un acte sanctionné par la réglementation en vigueur. Comment cela aurait-il d'ailleurs été rendu possible?

 

i.Qu'à cela ne tienne, un second assouplissement est à observer à propos de cette interdiction, finalement partielle. C'est l'autorisation donnée aux familles de dénommer leurs enfants par les nom et prénoms réunis du président de la République: "Albert-Bernard BONGO" lorsqu'ils sont nés un "17 Août", jour de la commémoration de l'Indépendance de la République gabonaise (17 Août 1960).

 

j.A la découverte du décret n° 678, un certain nombre de questions m'est venu à l'esprit:

 

1-Cet acte est-il toujours en vigueur?

 

2-Combien de concitoyens  et autres admirateurs portent-ils aujourd'hui, en dehors de ses descendants, le nom "Albert-Bernard  (ou Omar) BONGO" dans le pays ou ailleurs?

 

3-Ce décret aura-t-il motivé le changement tardif de l'état civil du défunt président de la République, désormais connu sous l'appellation  "Omar BONGO ONDIMBA", avec l'ajout du patronyme de son père au sien propre?

 

4.Si tel n'était pas le cas, peut-on espérer voir l'Etat-civil gabonais s'enrichir d'enfants dénommés "Ali BONGO ONDIMBA" à chaque "17 Août"?

 

 

k.Aussi simple que puisse paraître ce décret de 4 articles, du 18 Mai 1974, la matière dont il est porteur est absolument dense. Les questions qu'il suscite ouvriront certainement à des recherches substantielles et scientifiques. Mais, j'ai voulu simplement faire oeuvre de pionnier en le mettant au goût du jour, s'il n'existe aucune réflexion antérieure en la matière.

 

 

l. Et je me suis souvenu, pour ce faire, d'une citation inscrite par un étudiant français sur une table de l'amphithéâtre Roblot à l'Université Nancy 2:

 

"Les fous ouvrent les portes qu'empruntent souvent les sages."

 

 

 

 

Dr BENGA NDJEME,

Immeuble Arambo, le 24 Février 2013 à 10h 09