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Titre du blog : La Nation
Auteur : africanostra
Date de création : 13-11-2009
 
posté le 20-01-2013 à 21:46:12

Sauvons la Merveille, la Majestueuse chute du KONGOU!

 

 Analyse de Flora EKOZOWAKA sur la Merveille KONGOU


 

 

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    La problématique des chutes de Kongou au Gabon. Analyse de Flora Ekozomwaka

 

 

 

 

 

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Acteurs exogènes 

1. Les politiques 

1.1. Les pouvoirs publics 

            On devrait distinguer ici plusieurs points de vue par rapport au gouvernement. On peut citer entre autres les points de vue des ministères des mines, des ressources hydrauliques, des travaux publics, de l’aménagement du territoire et du tourisme. Chaque ministère a un intérêt particulier ou des intérêts particuliers. Nous allons nous appesantir sur le ministre des ressources hydrauliques « propriétaire » de l’édifice qui allait être érigé et le ministère du tourisme qui gèrent les parcs nationaux. 

            Il faut rappeler les chutes de Kongou sont comprises dans un parc national, le parc de l’Ivindo, et à ce titre le ministère du tourisme est interpelé. 

            Pour le ministère des ressources hydrauliques, les chutes de Kongou est un complexe de chutes. Un dédale de bras, de cascades et de rapides qui s’étendent sur 1,5 kilomètres de long et deux kilomètres de large. Des îlots séparent les différentes chutes les unes des autres. La plus impressionnante atteint près de quarante mètres de haut. En aval des chutes, le fleuve est recouvert d’une délicate mousse blanche, issue du brassage des eaux. Les Organisations non gouvernementales locales de défense de l’environnement préconisent un autre site, plus au sud : la chute de Tsengué-Lélédi dont la configuration, plus simple, se prêterait mieux selon elles à l’aménagement d’un barrage hydroélectrique ou d’une centrale. 

            Mais le ministère des Mines a pour l’instant sélectionné le site de Kongou, plus proche du gisement de Belinga, qui permet de faire des économies sur l’acheminement de l’énergie jusqu’à l’exploitation. Et, même si les chutes se trouvent dans un parc national, la loi gabonaise prévoit la possibilité de déclasser certaines parties des parcs en cas d’impératif économique. Nous nous sommes entretenu avec le maire de la ville de Makokou et de la gestionnaire du parc de l’Ivindo. 

            Pour le ministre des mines, « Il est important de rappeler que c’est en juin 2006 que la réalisation du grand projet de Belinga a été attribuée à la Chine par l’Etat Gabonais, avant la signature de la convention minière deux ans plus tard devant le défunt Chef de l’Etat. Depuis cette date, qu’est-ce que nos partenaires chinois ont fait? Pas grand-chose, me diriez vous, au regard du chronogramme de réalisation initialement annoncé. Tout juste citerions- nous, la création le 5 novembre 2007 de la COMIBEL[1], la CEMEC, a entrepris des études visant à valider toutes les études mises à sa disposition par le Gouvernement. A ce jour, des études ont été réalisées sur la mine, la voie ferrée et le port. Les études relatives à la construction du barrage ont pris du retard suite à l’arrêt des travaux d’aménagement de la route permettant l’accès aux chutes de Kongou. 

            Dans la même vaine, nous avons obtenu les propos tenus par Madame Koumba, ancienne gestionnaire du parc de Makokou. « D’entrée de jeu, je commencerai par l’affaire ou projet CEMEC dans le PN de l’Ivindo. La CEMEC est arrivée brutalement sur le terrain sans crier gare, sans que personne ne soit officiellement informé d’une quelconque opération dans le PN. Une affaire troublante qui avait ébranlé toute la province. Cette initiative incontrôlée avait commencé sans respecter les procédures les plus élémentaires en matière de Projet, de Parc National et d’Etudes d’Impacts Environnementaux. 

            Mieux, aucune communication, ou dialogue n’an été possible avec les Chinois. Les Chinois ne parlaient à personne, et sont partis tels qu’ils sont arrivés dans le PN. Finalement, nous avons compris que les Chinois étaient-là pour les Chutes de Kongou et le gisement de fer de Bélinga. De prime abord, c’était le flou total : personne ne savait ce que les Chinois étaient venus faire. Une vraie bavure ! » 

            Il voit des alternatives au projet selon Gustave Mabaza. « Le projet de Barrage hydroélectrique aux Chutes de Kongou, véritable merveille de la naturel, un véritable problème provincial, national, socioculturel (sanctuaire Kota), éotouristique, socioéconomique, etc. Il serait peut être intéressant d’examiner l’alternative que pourrait offrir les chutes de Tsengué-Lélédi, plus au sud, pour laquelle une étude ORSTOM avait été amorcée par EDF (1964) en rapport avec l’exploitation de la mine de fer de Bélinga. 

            D’après Madame Koumba, les populations n’ont jamais été consultées par rapport à la réalisation d’un barrage sur les chutes de Kongou, démarche imposée par la loi sur l’environnement. En effet, la loi n°16/93 du 29 août 1993 relative à la protection et l’amélioration de l’environnement. Cette loi, en son article premier énonce : « La présente loi 

            Elle dénonce par ailleurs la non-consultation par les promoteurs et l’Etat des gestionnaires du parc. Les responsables du parc avaient été surpris par l’arrivée des promoteurs chinois. Elle suggère enfin que le projet soit réalisé ailleurs, précisément sur les chutes de Tséngué-Lélédi. 

1.2. Pouvoirs déconcentrés 

            Dans ce répertoire, on classe les mairies, les collectivités locales, etc. La déconcentration est une modalité d’organisation de la centralisation. Elle consiste à déléguer un pouvoir décisionnel à des fonctionnaires de l’Etat qui interviennent, en qualité de Représentant du Pouvoir Central, dans les circonscriptions administratives dans lesquelles lesdits fonctionnaires sont affectés. Dans le cadre de la déconcentration, le Pouvoir Central ne fait qu’accorder une certaine délégation à ses agents pour intervenir localement et résoudre ainsi les problèmes sans que ceux-ci remontent et soient traités au niveau central. Cependant, les fonctionnaires agissant au nom de l’Etat dans leur circonscription d’action administrative, n’agissent jamais en leur nom propre mais toujours es qualité de Représentant du Pouvoir Central, et demeurent soumis à ce titre au Pouvoir hiérarchique de leur autorité supérieure. 

            Un exemple de déconcentration est donné par le Préfet de département, lequel représente l’Etat dans la circonscription administration départementale (même surface territoriale que la collectivité territoriale du Département) et est soumis au Pouvoir hiérarchique du Ministre de l’Intérieur. Dans le cadre de la consultation publique menée à l’occasion de l’Etude d’Impact dans son volet social (cf. chapitre 4 du présent mémoire), d’après lui « La construction d’un barrage implique automatiquement l’assurance de l’approvisionnement en électricité. Quant au site de Kongoué : c’est un beau site touristique, une merveille de la nature. Il vaudrait mieux que l’Etat fasse tout pour que ce site soit conservé, et pour que le barrage soit mis ailleurs plus au sud. Cela évitera les éventuelles inondations des plantations des populations et la pollution des eaux. Cela sauvegardera aussi une activité importante qu’est la pêche dans la contrée. Le développement de la capitale provinciale, Makokou, doit être inclus dans les retombées positives. Il serait malvenu qu’il y ait production de l’énergie hydroélectrique, sans que Makokou n’en bénéficie ! 

            Des effets induits du projet sont attendus pour la province, pour Makokou et aussi pour Libreville, la capitale gabonaise. Surtout, et surtout, la COMIBEL doit à tout prix éviter la marginalisation des Chinois. Il y va de la réussite du projet d’exploitation du Fer de Bélinga. Au total, l’Etat doit penser au développement du Gabon en général et de la province de l’Ogooué-Ivindo en particulier, à travers le grand projet Fer de Bélinga. 

            D’après ce dernier, le barrage hydroélectrique a objectif d’assurer l’approvisionnement en électricité enfin d’impulser le développement. Mais pour ce qui est des chutes de Kongou, elles sont à protéger pour merveilles écotouristiques indéniable. Par conséquent, le maire-adjoint préconise que le barrage soit érigé ailleurs, plus en aval des chutes de Kongou. 

2. La « société civile » 

2.1. Les députés 

Les députés de l’Assemblé Nationale du Gabon avaient manifesté un certain agacement face au projet de construction du barrage sur les chutes de Kongou. Les députés avaient été « saisis » par la société civile pour dénoncer un contrat mal négocié par l’Etat gabonais. En effet, « Comment expliquer que les 25 années d’exonération fiscales accordées à la partie chinoise dans le contrat litigieux soit maintenu, sachant que le retour sur in avertissement sera effectif après 8 à 10 ans d’exploitation? » En outre « A qui profitent réellement de telles facilités ? Et comment comprendre que la partie gabonaise confirme son engagement à supporter la responsabilité complète et assume tous les dommages directs et indirects environnementaux qui pourraient survenir en relation avec la réalisation du projet par la COMIBEL ? 

            La représentation nationale se retrouvait devant ses responsabilités. Il lui fallait répondre. Toutes ces questions et le tapage médiatique sur le plan international va amener la représentation nationale, avec le député Bilié Bi Nzé comme tête de prou à se ressaisir du dossier Bélinga, dont Kongou n’est qu’un pan. Il faut noter que la batail du côté de la société dite civile était menée par la coalition Publiez Ce Que Vous Payez et la Plate-forme Gabon Environnement. Ces différentes structures étaient soutenues en réalité par des organismes internationaux, notamment celles œuvrant dans le domaine de la protection de l’environnement. 

            Les ONG environnementalistes gabonaises avaient vivement critiqué cet l’accord passé entre l’Etat gabonais et les opérateurs économiques chinois, accusant les autorités chargées du dossier d’avoir « bradé le patrimoine national en cédant tous les privilèges à la Chine» (Gaboneco, 15 09 2008) A la suite de ces protestations, le gouvernement gabonais avait décidé de rouvrir les pourparlers avec ses partenaires chinois afin de négocier de nouveaux accords sur l’exploitation de la mine de fer de Belinga. Pour les ONG, ce nouvel accord accorde toujours trop des privilèges à la partie chinoise. 

            Outre la renégociation des termes économiques, financiers et fiscaux du contrat, l’ONG «Publiez ce que vous payez» (PCQVP) et la plateforme Environnement Gabon avaient également vivement réclamé la réalisation préalable des études d’impacts environnementaux par projet avant le début des travaux et l’abandon des chutes Kongou pour la construction du barrage hydroélectrique 

            D’après le député Bilié Bi Nzé, député du premier siège du canton Ntan Louli, « Le Dossier Kongou, il faut le considérer dans le dossier Bélinga. Nous avons trouvé à l’époque que le dossier ne prenait pas en compte les intérêts des populations locales sachant que Kongou est un espace ancestral. 

            Du point de vue environnemental, aucune étude d’impact n’avait été réalisée. Kongou abritent les plus belles chutes d’Afrique centrale, pourquoi alors les détruire quand on sait qu’en aval, il y a d’autres chutes qui peuvent accueillir un tel ouvrage. Il faut dire que nous n’avons pas la certitude que le barrage allait servir prioritairement aux populations, autrement, s’il n’y avait pas Bélinga, devait-il avoir Barrage sur Kongou ? Le Barrage devait servir donc prioritairement à l’exploitation du minerai de fer de Bélinga. 

            Certains quartiers de Makokou, disent les spécialistes, devaient être immergés par les eaux de l’Ivindo. Pour nous, le projet n’est pas complètement abandonné, mais pour les grands travaux de cette envergure, nous recommandons des études correctes selon la loi en vigueur dans notre pays ». Les propos du député nous renseignent sur les objectifs assignés par l’Etat à cet ouvrage. Même s’il est vrai que les populations et les auteurs sociaux devaient bénéficier du barrage, il n’en demeure pas moins que l’objectif prioritaire reste l’alimentation en électricité de l’exploitation du minerai de fer de Bélinga. 

2.2. Les ONG environnementales 

            Les ONG peuvent être entendues comme tout groupement, mouvement ou association constituée de façon durable par des individus ou des personnes morales appartenant à un même Etat ou à des Etats différents en vue de la poursuite de buts non lucratifs (Tchoba 2005). 

            Malgré leur reconnaissance en tant qu’acteurs de l’environnement, les ONG du point de vue de leur statut ne bénéficient pas de la personnalité juridique internationale. Elles sont considérées comme des associations de droit interne (Tchoba, 2005) et relèvent du droit national où se trouve leur siège. Ce sont des personnes morales de droit privé. Parfois, certaines ONG et associations pourront être reconnues d’utilité publique, ce qui leur confère alors certaines prérogatives. 

            De plus en plus, la protection de l’environnement est considérée comme une préoccupation majeure non seulement de l’Etat, mais aussi de l’ensemble de la société civile constituée notamment des ONG et des populations locales. L’un et l’autre mènent des actions concrètent, visibles et plus ou moins durable sur le terrain dans le domaine de la gestion de l’environnement ; L’emprise de leur action sur l’environnement est directe et perceptible, et l’impact de leurs activités peut être évalué, suivi et apprécié à différent niveaux. C’est pourquoi on les considère comme des acteurs directs de la protection de l’environnement, pour les distinguer des acteurs indirects. 

            Pourtant, la reconnaissance de la société civile et notamment des ONG comme acteurs de la protection de l’environnement, à la différence des institutions gouvernementales n’est jamais allée de soi. C’est à la faveur de véritables crises sociales et d’un contexte international favorables que les pays d’Afrique Centrale ont reconnu cette entité. A dire vrai, les actions des ONG sur le terrain, leurs contributions à la protection et à la gestion durable de l’environnement méritaient consécration textuelle. 

            Nous serons ainsi amenés à voir les particularités, la représentativité et le cadre normatif du déploiement des ONG environnementalistes en Afrique Centrale et qui fait suite à une consécration de leur importance. Cette consécration est d’autant plus justifiée qu’un aperçu, forcément global dans le cadre de notre étude, nous permet de constater une certaine effectivité et efficacité des ONG d’Afrique Centrale sur le terrain. C’est dire que par l’exercice de leurs missions, elles apportent une contribution multidimensionnelle à la protection de l’environnement. 

            En somme, les ONG ne sont ni des entreprises, ni des organismes publics : elles jouent rôles spécifiques dans la poursuite des intérêts particuliers et collectifs, notamment dans le champ de l’environnement. Mais, pour cela, elles doivent résoudre des problèmes relevant de deux champs de recherche distincts. 

            Une réflexion sur les organisations non gouvernementales (ONG), nécessite avant tout un minimum de clarification conceptuelle. Autrement dit, avant de lancer le débat sur le rôle que les ONG sont censées jouer en faveur du développement durable et de la démocratie participative, il faut examiner ces structures qui, selon le Conseil d’État[2], existent en France depuis la fin du 18e siècle. Il s’agissait en effet d’entités privées ne relevant pas de la volonté des gouvernements et regroupant donc associations, syndicats, entreprises, Eglises, centres de recherches universitaires, etc. 

            Le plus souvent, le terme ONG concerne les associations reconnues par une organisation internationale, où elles disposent d’un statut consultatif, dans la lignée de l’article 71 de la Charte des Nations Unies, où l’expression est utilisée pour la première fois : « Le Conseil économique et social peut prendre toutes les dispositions utiles pour consulter les organisations non gouvernementales qui s’occupent de questions relevant de sa compétence ». Le Conseil économique et social est l’organe de coordination des activités économiques et sociales des Nations Unies, de ses institutions spécialisées et des organes divers constituant le système. 

            Les ONG se voyant octroyer un statut consultatif (2012 étaient concernées au 1/02/2001) peuvent envoyer des observateurs aux séances publiques du Conseil, de ses commissions et sous-commissions ainsi que dans des conférences internationales. On retrouve généralement dans la littérature existante deux critères de base : l’appellation ONG fait référence à un groupe librement constitué par des personnes ou collectivités privées et poursuivant des buts non lucratifs. Dans la littérature anglo-saxonne, on tend à ajouter le critère du bénévolat qui, s’il était strictement appliqué, disqualifierait nombre d’organisations très professionnalisées (Pouligny, 2001, 120-176). On le voit, le terme d’Organisations Non Gouvernementales (ONG) provient du système des Nations-Unies qui les définit comme des « associations à but non lucratif, impliquées dans le développement international à l’aide de programmes vers l’étranger, ou d’actions locales liées aux problèmes du développement (groupes de pression, organisations d’étude, de recherche, d’information, etc. ». (Pouligny 2011, 120-176) 

            Dans le vocabulaire courant, le terme d’ONG internationale renvoie à deux grands types d’organisations (Manière de voir, 2003, 44-45) : 

            - soit de puissants réseaux associatifs multinationaux, en général spécialisés dans l’humanitaire (dont le premier, historiquement, est le mouvement de la Croix-Rouge), du type Handicap International, Action contre la faim, Oxfam ou Médecins du monde ; dans la défense des droits humains (Amnesty International, Human Rights) ou dans la protection de l’environnement (Greenpeace, WWF). Ces structures peuvent compter plusieurs millions de membres[3] qui sont essentiellement des souscripteurs, des collecteurs de fonds. Elles sont gérées de manière hautement professionnelle, peuvent disposer de centaines ou de milliers de salariés permanents, et elles agissent aussi bien sur le terrain que comme groupes de pression sur les gouvernements. Elles ont en général un grand savoir-faire médiatique et donc une très forte visibilité ; 

            - soit de mouvements de plus ou moins grande taille (en général, mais pas exclusivement) plurinationaux engagés dans des campagnes en rupture avec divers aspects de la mondialisation libérale, et qui se préoccupent moins de collecter des fonds que de participer à des mobilisations de rue. Seattle en a vu l’émergence spectaculaire confirmée ensuite à Gênes, Washington, Barcelone, etc. Le forum mondial de Porto Alegre et ses déclinaisons locales, nationales ou continentales (comme à Florence en novembre 2002) en constituent la principale cristallisation. L’association Attac (Association pour une taxation des transactions financières pour l’aide aux citoyens), née en France en 1998 et désormais présente dans plus de 50 pays, en est le prototype. 

            A l’échelle du Gabon, le travail de terrain sur lequel repose notre mémoire croise des ONGE ressemblant au premier type, c’est-à-dire les mouvements citoyens qui, à travers leur action veulent contribuer à la prise en main par les citoyens eux-mêmes d’une cause qu’ils entendent défendre : la protection de l’environnement. Aujourd’hui, « une gestion de l’environnement semble impossible sans l’implication des acteurs locaux. Vivant en permanence dans cet environnement, ils s’imposent comme les gestionnaires principaux de la nature. L’efficacité de cette gestion tient à des unités spatiales relativement petites, des structures sociales homogènes et des normes partagées, tous caractères distinctifs des communautés locales » (Blanc-Pamard et Boutrais, 2002, 258). 

            L’environnement est donc à considérer dans le cadre de dynamiques sociales et de logiques paysannes, en reconnaissant aux populations leurs représentations et leurs modes locaux de gestion de l’espace et des ressources. L’un des objectifs visés est d’impulser une forme de citoyenneté tournée vers le futur, ciment invisible débordant les normes juridiques et permettant aux individus d’un territoire de se rattacher à un héritage collectif qui devient leur bien commun qu’ils souhaitent transmettre à leur tour (Calamarte, 1999. 46-47). Dès lors, la notion de durabilité sur laquelle nous concentrerons les feux de projecteurs comporte, comme l’indique Marcel Jollivet (2001), une exigence de prise en compte du temps dans le long terme à travers la reconnaissance des savoirs locaux. 

            Sans revenir sur leur genèse, il faut préciser que c’est à partir de 1990 que le séisme relatif du monolithisme politique a permis une redynamisation des associations et une éclosion des ONG. C’est ainsi que la conférence nationale a vu la naissance de 75 associations. Mais c’est surtout depuis 1995, qu’une partie d’entre elles revendiquent le statut d’ONG dans un cadre juridique devenu caduc. En juillet 1996, on estimait à 300 le nombre d’associations et d’ONG (CNAONG, 2007) au Gabon, mais dont un petit nombre seulement présente aujourd’hui des caractéristiques et des objectifs correspondant à ceux d’une organisation indépendante des structures de l’État ou des partis politiques « A quelques exceptions près, ces ONG n’ont pas de base associative réelle (pas ou peu de membres sympathisants ou cotisants, pas d’assemblée générale). Ce sont souvent des petits noyaux d’individus fonctionnant sur une base non permanente » (Bonis, 1996, 7). 

            Si l’on en croit Hervé Maupeu , cette formidable multiplication des ONG dans les pays africains « correspond à un besoin de structuration de la population tout autant qu’à la nécessité de développer des organisations capables d’accueillir la manne de l’aide occidentale qui tente d’éviter le relais d’Etats jugés corrompus, incompétents, et trop éloignés des préoccupations de la population » (1998, 6). Pour les gouvernements du Nord, « l’argument avancé est que les milliers de milliards de dollars américains consacrés à l’aide au développement depuis cinquante ans se sont révélés notoirement inefficaces, alimentant les dépenses somptuaires, paradis fiscaux et course aux armements. Avoir recours à des structures à finalité non lucrative, de taille modeste, organisées en réseaux et pouvant atteindre plus directement les populations concernées par l’aide a été présenté comme une solution de rechange plus efficace ». Séminaire (1998, 6). 

            Au Gabon, l’augmentation rapide des associations et des ONG, en donnant lieu à la création d’un collectif, est allée de paire avec une activité remarquable, vue l’importance des activités menées et l’acquisition du statut de partenaires de développement (Lachartre et Léna, 2000, 110). Un tel constat nous amène à penser que l’aide extérieure ou celle de l’Etat s’il y a lieu aux ONG locales, n’y est pas sans liens avec la forme et l’orientation qu’elles peuvent prendre. Dans le champ qui concerne davantage notre sujet, c’est-à-dire celui de l’environnement articulé au développement durable, le mouvement ONG est essentiellement urbain au Gabon. La plupart des ONG sont basées à Libreville, la capitale, et y mènent certaines de leurs activités. Les ONG environnementales (ONGE) jouissent comme dans d’autres secteurs d’activité (éducation, santé, économie etc.) de moyens d’action très limités et sont encore loin du stade de mobilisations populaires. 

            Dans l’ensemble, leur travail d’éveil et de prise de conscience de la population se résume aujourd’hui à quelques publications, rencontres, séminaires, conférences et ateliers. Entre 1991 et 1993, une série de séminaires de formations encourageant la création d’ONG ont été animées par des bailleurs de fonds et des projets internationaux (WWF, Coopération française, PNUD). Au cours d’une table ronde par exemple, à laquelle avait pris part l’Union européenne fin 96, un groupe d’ONG environnementales avaient énergiquement dénoncé les abus de deux sociétés forestières, Leroy Gabon et Rougier Gabon, qui exploitaient depuis toujours le bois dans la réserve protégée de La Lopé. Suite à ces mises en cause, le gouvernement avait décidé de modifier les limites de la réserve tout en contraignant les exploitants forestiers à se séparer d’une partie des permis qui leur avaient été attribués. 

Ainsi, depuis ce débat autour de l’épineuse question d’exploiter le lot 32 dans la réserve de la Lopé, les ONG gabonaises ont sans doute joué un rôle déterminant dans la lutte pour une exploitation durable de la forêt au Gabon. Le débat sur la certification et les résultats obtenus sont en grande partie l’œuvre de ces dernières. Les ONG internationales sont intervenues plus tard à la demande des autorités gabonaises pour proposer des plans de conservation. Or, aujourd’hui, il est regrettable de constater que les organisations nationales sont reléguées au second plan des négociations internationales, comme ce fut le cas lors du sommet de Johannesburg, en Afrique du Sud, tenu du 26 août au 4 septembre 2002. Par ailleurs et parallèlement à ce sommet, en décembre de la même année, le chef de la diplomatie américaine, Colin Powell, potentiel bailleur de fonds, a eu un entretien avec les ONG à la Pointe Denis de Libreville. 

Là encore, aucune ONG d’initiative gabonaise n’y a été associée. Or, l’analyse de l’implantation des ONG d’environnement au Gabon montre clairement que toutes ou presque ont leur siège à Libreville[4]. Plusieurs d’entre elles disposent même d’autres moyens de communication qu’une adresse postale (téléphone, fax, Internet). Rares sont donc celles qui ne répondent pas aujourd’hui à cette exigence formelle. On peut donc voir à travers l’importante rencontre de la Pointe Denis n’ayant regroupé que les ONG internationales (WCS, WWF, etc.), l’illustration d’une politique qui consiste à ne faire appel aux ONG locales que pour exécuter de basses activités de nettoyage de plage, de pose des anneaux sur les tortues, etc. Aussi les ONG gabonaises interpellent-elles l’État afin qu’il mette en place une politique nationale en matière d’ONG environnementales[5]. Ces dernières pouvant constituer un vecteur fort de mobilisation populaire et de promotion du développement durable à travers les projets qu’elles exécutent. 

Brainforest 

            Brainforest est une association apolitique, non corporative, dont les membres gardent l’entière liberté de leurs convictions religieuses et leurs opinions et positions politiques. Même tenues au sein de l’association, celles-ci n’engagent que leurs auteurs. Créée conformément aux dispositions de la loi 35/62 du 10 décembre 1962, en son article 14 régissant les associations sur le territoire gabonais, cette association n’entend participer ni de près, ni de loin à la réalisation de toute action contraire aux lois et règlements en vigueur dans la République. 

            Brainforest a pour objectif de lutter pour la protection et l’utilisation durable de la forêt équatoriale en général et celle de l’Ivindo (Nord-Est du Gabon) en particulier. Elle œuvre ainsi pour décourager les activités non respectueuses de l’homme et son environnement. L’association vise spécifiquement le développement socio-économique des zones adjacentes aux forêts faisant l’objet de conservation en contribuant : 

            - à l’émergence de la culture environnementale, notamment en milieu jeune sur toute l’étendue du territoire national ; 

            - au développement de l’écotourisme ; 

            - à promouvoir la valorisation des produits forestiers non ligneux (en particulier les plantes médicinales et alimentaires). 

            Les activités de Brainforest sont essentiellement : 

-      des plaidoyers auprès des décideurs ; 

-      des campagnes nationales et internationales de sensibilisation ; 

-      des conférences, forums et séminaires avec intervention des spécialistes ou de personnes ressource ; 

-      le soutien à la création de projets de valorisation des ressources naturelles. 

            Dans ce cadre, Brainforest ferait largement appel aux nouvelles technologies ainsi qu’à des banques de données fiables mises à jour par son Observatoire. 

Le Réseau Environnement Gabon 

            Cinq organisations non gouvernementales font partie à ce jour du Réseau Environnement Gabon. L’analyse de cet échantillonnage permet de se rendre compte des champs d’action, des objectifs et des thèmes abordés. Quid de cette structure ? 

            Le Réseau Environnement Gabon est un réseau national de communication d’information et d’échange d’expériences qui a pour but : 

            - La facilitation des échanges entre organisations membres et tous les acteurs de différentes localités du Gabon sur les expériences pertinentes de gestion durable des écosystèmes des zones humides ; 

            - L’information du public national et international sur les pratiques d’exploitation et de conservation des écosystèmes forestiers humides au Gabon ; 

            - La contribution aux échanges multiformes nationaux et internationaux sur la recherche-développement, l’aménagement durable et toutes informations nécessaires ; 

            - La promotion d’un lobbying actif sur les problèmes de conservation de l’environnement au Gabon par le réseau ; 

- La facilitation de la recherche-développement et le transfert de connaissances et de technologies aux structures d’encadrement et aux populations locales ; 

            - La recherche de fonds pour le renforcement des capacités des membres et le financement de projets et programmes de conservation et de développement durable mis en œuvre au Gabon. 

            - Les ONG qui ont ratifié la charte du Réseau Environnement-Gabon sont dans l’ordre alphabétique : ACDAC, ASF, Brainforest, CADDE, World Promus. 

Aventure sans frontière 

            Philippe Sounguet, responsable de cette ONG Aventure sans frontière s’était également invité à ce débat, avait déclaré  qu’il craignaitle pire pour les 13 parcs nationaux du Gabon. Par ce que « Cette déclassification pour des intérêts économiques pourrait frapper tous les parcs nationaux du pays ». 

            S’estimant harcelées et présentées à la population gabonaise comme les ennemis du projet Bélinga ou les suppôts des multinationales opposées à ce projet, les ONG écologistes gabonaises suggèraient la construction du barrage hydroélectrique sur les chutes de Tsengué-Lélédi au sud de Bélinga. Ces chutes présentent l’avantage d’être situées hors du Parc de l’Ivindo. Une étude remontant aux années 1960, réalisée par Electricité de France, avait déjà retenu ce site. 

            Mais le ministre Monsieur Onouviet, alors ministre des mines déclarait : « Le plus important handicap de ce site, c’est d’être situé à plus de 200 km de Bélinga ». Selon lui, il aurait fallu 1,2 milliard de dollars pour construire un barrage sur ce site (Tsengué-Lélédi) et prévoir près de 435 millions de dollars pour l’acheminement de l’électricité vers la mine de fer de Bélinga. Selon les estimations faites par les spécialistes reprises par le ministre, la construction du barrage sur Kongou allait coûter seulement quelque 754 millions de dollars. 

            De leur côté, les Chinois, qui apportaient tout le financement nécessaire pour réaliser le projet, gardaient le silence, mais ils étaient très intéressés par le choix des chutes de Kongou. A l’occasion d’une audience chez le président Bongo Ondimba qui avait placé Bélinga au centre de son septennat entamé en janvier 2006, les responsables des ONG avaient accepté d’apporter leurs contributions dans le cadre d’une commission mise en place. 

Bilan pour les ONGE gabonaises 

            Ne pouvant proposer un regard évaluatif[6] qui conviendrait aux projets encore non clôturés des ONG du Réseau Environnement Gabon, nous proposons un bilan provisoire à partir de l’état des lieux qui précède. Deux types d’éclairage s’y dégagent. Le premier porte sur la validité du processus de légitimation des acteurs non gouvernementaux, couramment assimilés à la « société civile organisée[7] ». A propos de cette équivalence de facto établie le plus souvent dans le débat public, entre « société civile » et ONG, Béatrice Pouligny (2001, 120-176) nous rappelle fort justement que cela ne va pas de soi. Aux États-Unis ou au Canada, par exemple, les syndicats, les entreprises, des cabinets de consultance font partie de la « société civile » au même titre que les ONG. La société civile est une « construction conceptuelle synthétique qui englobe une grande diversité de formes d’action populaires collectives menées dans le domaine public ». (Bratton, 1994, 581). 

            Au Gabon, l’apparition d’ONG nationales est très marquée au sein d’une société civile émergeant laborieusement du processus démocratique des années 90. La société civile, dont les ONG sont partie intégrante, implique donc une diversité d’acteurs. Le deuxième type d’éclairage concerne la conception du développement durable par les organisations du Réseau Environnement Gabon. Sur la base d’un guide d’entretien, nous examinerons un peu plus loin cette conception. 

            En effet, alors que le label national est souvent esquissé par ces derniers dans les négociations de fonds ou sur le terrain, se prévaloir d’une base associative et d’une représentativité, y compris celle des porte-parole, leur est secondaire. Il existe donc un décalage certain entre leur représentativité proclamée et réelle. Par ailleurs, nombreuses sont les organisations qui se caractérisent par un manque de personnel permanent avec pour corollaire une disponibilité limitée aux membres du Bureau Exécutif. Le fonctionnement de chacune d’entre elles dépend en général de deux ou trois personnes qui coordonnent l’ensemble des activités au sein de l’ONG. 

            Cette observation rejoint très directement le constat dressé par Jean Martial Bonis Charancle (1996). Lorsqu’il parle de « sens de volontariat faible » et « de petits noyaux d’individus fonctionnant sur une base non permanente ». Les exemples sont légion. Ainsi, Forêt-Développement n’a plus d’existence physique et les cotisations des membres ne suivent plus, mais compterait selon son Secrétaire Exécutif, 15 membres actifs dont 1 femme, CADDE : 15 membres actifs dont 2 femmes, ANCE : environ 14 membres dont 4 femmes, ACDAC : moins de 10 membres actifs[8]. En revanche, et c’est l’exception qui confirme la règle, ASF totalise 76 membres (actifs, sympathisants, d’honneur y compris, dont 44 femmes) et emploie un personnel rémunéré : 8 employés à temps plein et 7 à temps partiel. Il en est de même pour l’ONG World Promus qui comptabilise une cinquantaine de membres et rémunère régulièrement 4 employés. Mais dans la pratique, peu d’adhérents seulement versent leurs cotisations. 

            Le mouvement environnementaliste au Gabon a été animé au début des années 90 par des jeunes volontaires sans emploi qui y voyaient une source de revenus. Une décennie d’existence après, le recul est suffisant pour juger de son évolution. En effet, même si formellement il n’est pas établi que les membres des organisations tirent un profit personnel d’ordre financier, matériel ou de notoriété, rares sont ceux qui agissent par conviction et de façon désintéressée. « La culture ONG n’existe pas au Gabon, on se bat pour l’argent et non pour les idéaux », souligne sans détour Jean Bruno Mikissa, Secrétaire Exécutif de Forêt-Développement. 

            Probablement, le manque de formation presque généralisé des dirigeants des ONGE gabonaises dans des domaines aussi importants que l’ingénierie de projet, les politiques locales, l’approche participative, le management des ONG, etc., en constitue un des éléments d’explication. Ce manquement, reconnaît Sylvestre Ndembi-Makanga[9], Président de la World Promus, « rend le mouvement vulnérable dans la mesure où le rôle premier d’une ONG c’est de former les individus. Or, pour atteindre cet objectif, il faut bien que les membres des organisations soient eux-mêmes formés. Ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui. Par ailleurs, ajoute-t-il, de façon générale, il se pose un problème de clarification du rôle et de la place des ONG au Gabon. Jusqu’à preuve du contraire, l’Etat ne les considère pas comme des partenaires de développement alors que celles-ci devraient lui servir de réservoir d’idées. La puissance publique a donc à redéfinir ses relations avec les ONG, ces dernières devant s’efforcer de conserver leur indépendance. En ce qui concerne la World Promus en particulier, son action est complémentaire de celle de l’Etat gabonais qui est l’un de nos bailleurs de fonds ». 

            Tout compte fait, la conjonction des problèmes soulignés nous conduit à poser la question de la légitimité des ONG puisque « statutairement celles-ci ne sont la propriété de personne en particulier ni ne sont au service d’intérêts partisans ». (1998, 548). Quelles sont à travers les actions qu’elles mènent, leurs capacités de négociation et/ou de mobilisation ? 

            A en croire Bernard Husson (1998, 548), « juridiquement la légitimité des ONG est fondée sur le statut qui leur est reconnu par les organisations internationales et les lois sur les associations ou fondations prises par les Etats et sur la libre adhésion de leurs membres. Au-delà de ce cadre institutionnel, les ONG construisent leur légitimité sur leur compétence, le résultat de leur collecte, leur assise sociale, le nombre de projets qu’elles soutiennent et…leur propre discours. Cependant, toutes la construisent en référence à un système de valeurs ». Dans le cas qui nous occupe, il s’agit d’un cadre de référence pour l’action appelé développement durable. 

            Au-delà de ces traits, poursuit l’auteur, les fondements de la légitimité des ONG sont aussi fonction de leur origine géographique. Au Sud, une ONG est considérée comme légitime lorsqu’elle démontre une double capacité : 

            • « une capacité de mobilisation, en agissant non seulement pour la promotion de groupes sociaux mais surtout en favorisant l’action autonome desdits groupes sociaux ; 

            • une capacité de négociation avec les interlocuteurs locaux, nationaux et internationaux pour obtenir des ressources financières pour satisfaire des besoins immédiats ou pour engager des actions porteuses d’avenir. La légitimité des ONG du Nord s’appuie sur les prestations financières et techniques qu’elles apportent, sur leur capacité à organiser des échanges d’expériences et des visites dans un sens et dans l’autre, sur l’interconnexion qu’elles favorisent entre sociétés du Nord et sociétés du Sud. Elle est aussi confortée par les demandes venant du Sud qui donnent un contenu concret à leur raison d’agir. Elles tirent en effet une légitimité de leur rôle d’intermédiaire entre leurs bailleurs de fonds (institutionnels ou donateurs privés) et les ONG du Sud pour financer des projets exécutés par ces dernières. Il n’y a pas de ce point de vue de différences entre ONG d’urgence et ONG de développement, même si la demande d’intervention par une ONG du Sud n’est pas toujours explicite dans les cas de l’action d’urgence » (Husson, 1998 : 548). 

            Sur le terrain, à l’exception du travail remarquable mené par la World Promus, l’action des ONG du Réseau Environnement-Gabon reste encore très localisée ou concentrée. En conséquence, elles ne sont pas en état de peser dans l’élaboration des politiques publiques de l’environnement, en dépit de leur statut national, voire sous-régional. C’est donc fort de cette situation qu’il nous revient de conclure que si ces organisations sont « marginalisées » par les pouvoirs publics, c’est parce que leur légitimité se fonde davantage sur la capacité de négociation (collecte de fonds notamment) que sur celle de mobilisation et d’intermédiation entre l’Etat et les acteurs topiques. Les ONG ont tout intérêt à servir de relais pour faire entendre la voix de ces acteurs qui risquent d’être les grands absents du jeu du développement durable. Il serait donc prématuré aujourd’hui de qualifier les ONGE gabonaises d’acteurs émergents, autonomes par rapport à l’Etat, au point d’en devenir non seulement des interlocuteurs, mais dans certains cas des concurrents, comme dans certains pays d’Afrique de l’ouest (Martin, 2002, 37-71). 

            Contrairement à de nombreux pays du Sud où les ONG sont des émanations de pays occidentaux, alors qu’elles affirment procéder de la société civile nationale tout en exerçant une action de contournement et d’affaiblissement de la puissance publique dans l’exercice de ses droits, au Gabon les organisations non gouvernementales environnementales naissent spontanément. 

            Cette absence de filiation avec les ONG qui campent aux frontières de l’action locale et du planétaire, le WWF notamment, peut être un gage d’autonomie pour échapper au risque d’instrumentalisation. En même temps, un tel contexte est loin de faciliter l’accès aux financements, surtout lorsque les organisations locales n’enregistrent pas des succès liés à la vertu de leurs actions et à leur capacité à nouer des liens étroits avec les acteurs topiques. De notre point de vue, les ONG d’environnement locales n’auront d’impact positif sur la gestion rationnelle et la préservation de la forêt gabonaise que si elles valorisent la compétence topique, avec en toile de fond, l’implication active des acteurs topiques depuis la phase de l’élaboration du projet jusqu’à sa mise en œuvre. 

            Si théoriquement toutes les ONGE membres du Réseau Environnement Gabon affichent des ambitions nationales, leurs modalités aussi bien d’analyse de l’environnement, d’opérationnalité que de solutions ne sont guère, en revanche, assez précises. En témoignent, les objectifs de leurs activités environnementales : promouvoir la Recherche/Développement, les activités de conservation et de gestion durable, ainsi que le bien-être des communautés locales en Afrique centrale (ACDAC), découvrir, explorer et conserver les merveilles naturelles du Gabon (ASF), lutter pour la protection et l’utilisation durable de la forêt équatoriale en général et celle de l’Ivindo, dans le nord-est du Gabon en particulier (Braineforest), attirer l’attention du maximum de personnes sur les menaces qui pèsent sur l’environnement, participer à l’éducation environnementale des jeunes, promouvoir le développement durable à partir des projets ruraux (CADDE), renforcer les capacités des associations communautaires en milieu rural par la formation, la sensibilisation et l’éducation (World Promus). 

On remarque qu’il existe un discours sur la formation, et en filigrane sur l’éducation pour l’autonomie qui implique une prise de position critique, créative et responsable du sujet dans la gestion de son environnement. Cette orientation est d’autant importante que « le respect de la nature ne consiste pas à ne rien changer, ce qui serait absurde et illusoire, mais à transformer d’une façon responsable». (Bret 2002, 191). Autrement dit, le développement durable ne peut être possible sans responsabilisation des acteurs topiques et sans réelle prise en compte de leurs intérêts. 

Publiez ce que vous payez 

            L’ONG Publiez ce que vous payez (PCQVP) et la plateforme Environnement Gabon avait tenu une conférence de presse le 2 juin 2008 à Libreville pour dénoncer l’opacité des renégociations des termes de la convention pour l’exploitation du gisement de fer de Belinga entre les parties gabonaises et chinoises signée le 24 mai 2008 au palais présidentiel. Cette plateforme avait critiqué cet accord, accusant les autorités chargées du dossier d’avoir «bradé le patrimoine national en cédant tous les privilèges à la Chine». A la suite de ces protestations, le gouvernement gabonais avait décidé de rouvrir les pourparlers avec ses partenaires chinois afin de négocier de nouveaux accords sur l’exploitation de la mine de fer de Belinga. Pour cet ensemble d’ONG, ce nouvel accord accorde trop des privilèges à la partie chinoise. 

            Ils notaient en substance : «Nous avons appris par les médias que la signature de la convention entre le Gabon et le consortium chinois CMEC a été apposée à la Présidence de la République le samedi 24 mai 2008. Cette signature intervient au moment où la société civile regroupée au sein de la Coalition Publiez ce que vous payez et la plateforme Environnement Gabon avaient dénoncé les manœuvres du gouvernement visant à écarter certains acteurs clés des négociations des nouvelles clauses de la nouvelle convention, une renégociation intervenue à la suite de la protestation de la même société civile gabonaise sur le caractère indique du contrat signé en 2006 ». 

            En effet, alors que les séances de négociation d’un contrat qui allait profiter en principe aux intérêts du Gabon se déroulaient au ministère des Mines en présence de tous les acteurs qui y étaient impliqués, dont le représentant de la société civile, l’on annonçait la suspension de celles-ci à la suite de nombreux désaccords entre la partie chinoise et les experts gabonais et leur reprise le 31 mars 2008, contre toute attente, l’on apprenait que deux membres du gouvernement allaient se rendre en mission en Chine accompagnés de quelques fonctionnaires sans associer les membres de la délégation gouvernementales chargée du contrôle et du suivi du projet Belinga, dont le barrage était un pendant important. 

            Au cours d’une conférence de presse tenue dans les locaux de Brainforest au mois d’avril 2008, les organisations de la société civile avaient dénoncé cette démarche qui cachait une volonté de faire passer certaines clauses de la convention sur lesquelles les négociations achoppaient et que la partie chinoise ne voulait pas renégocier, comme par exemple le durée d’exonération d’impôts qui étaient de 25 ans dans le premier contrat et que les experts gabonais voulaient ramener à 10 ans maximum, ramener le périmètre de la concession minière de 7700 km2 à 600km2, la réalisation des études d’impact environnementale pour chaque étape du projet et non une seule étude, etc. 

            Au lieu de déplacer les autorités responsables du projet Belinga, pourquoi les responsables chinois de chaque composante dudit projet ne s’étaient-ils pas installer à Libreville de façon permanente, comme cela était prévu dans le procès verbal d’une réunion tenue entre une délégation gouvernementale et le CEMEC, le 20mai 2007 ? 

            Cette attitude a amener les responsable de cette plateforme des ONG à se poser une ensemble de questions fondamentales dont l’objectif manifeste était de révéler ce qui se tramait 

- « Comment comprendre que les travaux de terrassement et d’aménagement des routes menant vers le site des chutes de Kongou n’aient pas été arrêtés au moment de la suspension du contrat de 2006 alors que l’absence des études d’impact environnemental fut à l’origine de la polémique entre le gouvernement et la société civile ? 

            - Comment comprendre qu’un terrain de plus de 7000 km2 soit gelé autour de la concession minière au profit de la COMIBEL, alors que la zone s’exploitation et de dépendance n’excède pas les 600 km2 ? Faut-il à la COMIBEL un terrain onze fois plus vaste que la concession minière qu’elle a sollicité pour rechercher les matériaux de construction ? 

            - Comment expliquer que les 25 années d’exonération fiscales accordées à la partie chinoise dans le contrat litigieux soient maintenues, sachant que le retour sur investissement sera effectif après 8 à 10 ans d’exploitation ? A qui profitent réellement de telles facilités ? Et comment comprendre que la partie gabonaise confirme son engagement à supporter la responsabilité complète et assume tous les dommages directs et indirects environnementaux qui pourraient survenir en relation avec la réalisation du projet par la COMIBEL ? 

            Autant de questions que se posait la société civile qui avait réaffirmé sa volonté de voir les intérêts des populations gabonaises définis et préservés dans les négociations. Aussi avait-elle renouvelé l’exigence pour toutes les parties de se conformer aux lois et règlement en vigueur en République gabonaise. 

            En somme, elle mettait le gouvernement et les responsables du projet contre une signature précipitée de la Convention qui ne respectait manifestement pas les exigences de transparence et d’équité, ainsi que sur certaines conséquences de leurs engagements qu’au fond, elle ne désire peut être pas. 

            En réalité la société civile gabonaise insistait sur la satisfaction entre autres des points suivants : l’abandon des chutes Kongou pour la construction du barrage hydroélectrique, la réalisation préalable des études d’impacts environnementaux par projet avant le début des travaux. Car il ne s’agit pas d’une seule étude d’impact mais des études pour chaque phase du projet prévu dans le cadre de cette exploitation, etc. 

Section 3. Les activités économiques 

3.1. Les arbres-essences de l’Etat 

            Kongou est une zone de forêt « primaire ». Une évaluation de son potentiel en bois avait été réalisée par les exploitants forestiers et autres agents des Eaux et Forêt. 

            Ce qu’il faut signaler au départ, c’est que la forêt gabonaise, au terme des études faites depuis plus d’un siècle, regorge au final de 400 espèces dont 65 sont mises en valeur. De ces essences, seules une dizaine d’essence représentent 70% du volume des bois exploités (Ministère des Eaux et Forêt) : padouk (114.326), kévazingo (86.431), moabi (72.851), agba (55.945), beli (46.621), azobé (37.988), douka (35903), izombé (34.861), iroko (34.143) et movingui (34046) (DEPF 2002). 

            Le PNI qui contient les chutes de Kongou couvre une superficie de 300 000 ha principalement de forêt primaire riche en ressources ligneuses à haute valeur commerciale (Lescuyer, 2006, 27). Une partie de cette surface a déjà été exploitée : à l’ouest par Rougier Gabon, au sud par la SEEF, et à l’est par Winnerpac. A partir des déclarations de ces exploitants forestiers et des photographies satellite, il ressort que 73 500 ha ont déjà été exploités. 

            Hormis ces zones exploitées, une partie non négligeable du PNI est consacrée à la conservation du fait des richesses écologiques, et surtout du relief (Chezeaux, 2006). 

            En somme si l’on soustrait de la surface du PNI  les zones déjà exploitées, et les séries de conservation, on peut considérer que ce sont 147 000 ha qui auraient été exploités en dehors du PNI (Lescuyer, 2006, 27).  Cette zone, potentiellement exploitable, couvre à la fois une forêt de type « atlantique (33 000 ha) et celle de type congolais (11 400 ha). 

 

Surface du PNI 300 000 ha 
Surface déjà exploitée 73 500 ha  Surface exploitable 147 000 ha  78 700 ha 
Avec okoumé 33 000 ha  Sans okoumé 114 000 ha 

            D’après Lescuyer (2006), passer d’une indentification des zones forestières potentiellement exploitables à une estimation économique nécessite que soit émise deux hypothèses. La première hypothèse est l’exploitation se fait dans le cadre d’aménagement forestier, en 25 assiettes de coupes de taille équivalente. Ce sont 5 800 ha qui sont exploités. La deuxième est que les intensités d’exploitation retenue ne sont pas différentes des précédentes. 

  Dans la zone okoumé  Dans la zone sans okoumé 
Intensité d’exploitation par ha  14 
Okoumé  11 
Bois divers 

            L’okoumé est destiné au déroulage. 

En cfa  Okoumé  Bois divers 
Valeur du bois sur pied/m3  11 600  19 800 
Coût d’exploitation forestière/ m3  26 300 
Valeur du bois usine  39 700  49 100 

            Signalons que de nombreuses essences peu ou pas commercialisées ont des caractéristiques physiques, mécaniques et technologiques proches de celles les plus couramment exploitées. Comme au siècle passé, la commercialisation des nouvelles essences se heurte à la faible connaissance qu’ont les utilisateurs finaux. Les essences les plus prisées sont l’okoumé et l’ozigo, dont les exportations sont le monopole de la Société Nationale des Bois du Gabon, le mètre cube de ces deux essences s’élève à 65 000 francs cfa. 

3.2. Le tourisme 

            Nous apprenons de Mandambi Rodrigue[10] que « Le tourisme se fait par Figet et la conservation par le WWF et le WCS. L’accès aux chutes est très difficile. Les pirogues vous laissent en amont, après on prend une piste qui va jusqu’aux chutes » 

            Les chutes de Kongou font donc l’objet d’une exploitation écotouristique par l’opérateur Figet. En effet, d’après Okouyi Joseph[11], chercheur et gérant de cette entité économique « Nous avons construit une base touristique au niveau des chutes de Kongou où nous accueillons des touristes nationaux, les Européens résidant au Gabon et les clients qui viennent essentiellement de France, d’Allemagne, d’Italie, d’Espagne, des Etats-Unis, etc. » 

            Bien que marginal dans l’économie du pays, le tourisme est désormais considéré comme un axe stratégique de développement. La richesse en matière de biodiversité mondialement reconnue du Gabon ne peut que favoriser l’écotourisme. Cette forme de tourisme devrait drainer une part de plus en plus importante du tourisme occidental «de qualité». Les atouts indéniables du pays peuvent engendrer des retombées positives, tant du point de vue développement économique local que celui de la promotion des cultures et des écosystèmes gabonais. Selon cette logique, le Président de la République a pris en 2002 la décision de créer par décrets les 13 parcs nationaux suivants : la Lopé, Akanda, Plateaux batéké, Monts Birougou, Monts de Cristal, l’Ivindo, Loango, Mayumba, Minkébé, Moukala Doudou, Mwagné, Pongara, Waka. Ils couvrent 29.200 km 2 km2, soit 10.8% du territoire national. 

            Le défi de la création des parcs étant réalisé, le challenge de la mise en valeur d’attraits et services touristiques, en étroite collaboration avec les populations locales et les investisseurs privés est la prochaine étape à surmonter. 

            La création de 13 parcs nationaux répond donc au souci d’une meilleure protection de la biodiversité et à la volonté de tendre vers les normes internationales en matière de superficie d’aire protégée, mais ces parcs nationaux sont aussi voulus comme des moteur de développement dans les zones rurales où ils sont implantés en promouvant le tourisme, d’où l’importance d’estimer la valeur économique. 

            Ce parc est doté d’un fort potentiel écotouristique (Weghe, 2006, Penelon et Ko 2006)), notamment pour les touristes occidentaux à fort pouvoir d’achat. Ces derniers pourront visiter les chutes de Kongou et de Mingouli. En outre un certain nombre d’opérateurs économiques sont déjà présents autour du parc pour organiser cette activité : WCS qui propose des visites au baï de la Langoué et surtout la Figet qui construit un campement de vision sur les chutes de Kongou. Ces initiatives sont relayées à l’échelle nationale et internationale par des tour-opérateurs, comme Mistral voyage. Mais ces initiatives restent encore inférieures aux normes internationales. Il s’agit principalement d’un circuit proposé par la Figet à partir de Makokou pour se rendre en pirogue aux chutes de Kongou auxquels se greffent plusieurs itinéraires en forêt autour des chutes. 

Photographie n°10. La case des touristes 


 

            Cette case est la preuve que les activités touristiques sont pratiquées à Kongou. La case est construite en bois tiré de la forêt environnante. La toiture est couverte de tôle pour assurer une certaine durabilité de la bâtisse. On peut aussi constater que la forêt n’a pas été détruite au-delà du strict nécessaire. Ce qui permet aux touristes de vivre dans un espace durablement aménagé. 

3.3. Estimation des bénéfices attendus de l’écotourisme 

            L’analyse économique porte sur une période de 10 ans. Elle se base sur les données actuelles de fréquentation touristique fournies par la Figet pour les chutes de Kongou. Ce site a attiré environ 200 personnes. En moyenne, ces visiteurs ont utilisé 4 jours pour se rendre sur le site, y résider et rentrer, on peut estimer que chaque jour passé est facturé 65000 francs cfa par personne. 

  2010  2011  2012  2013  2014  2015 
Nb. visiteurs  350  350  400  450  500  600 
Nb. jour/per. 
Tarif jour.  80000  80000  80000  85000  85000  85000 
Total  140  140  160  191,25  255  306 

 

 



[1] La Compagnie Minière de Bélinga dont l’actionnaire majoritaire. 

[2] Institué par la Constitution de l’an VII, il est devenu la juridiction administrative suprême en France. Il est aussi consulté par le gouvernement sur certains projets de lois ou décrets, ou sur des questions juridiques ponctuelles.

[3] Près de 5 millions d’adhérents pour le World Wildlife Fund (WWF) en 2003. 

[4] Capitale politique du Gabon. A noter qu’avec un taux d’urbanisation de 73% (les 3/4 de la population résident en ville), le Gabon figure parmi les pays les plus urbanisés de la planète. On estime qu’en 2020, 80% de la population gabonaise sera concentrée dans les centres urbains.

[5] A ce sujet, lire : AKAGAH Serge. Les ONG, ces oubliées !!!, in Forum de discussion [en ligne]. Libreville : 18 septembre 2002 : http://www.f-i-a.org/environnement-gabon. Voir aussi : Les premiers couacs de la diplomatie américaine ou encore La part de responsabilité des autorités gabonaises [réf. du 9/12/02]. Disponible sur : http://www.educ 21. com/ong_envir.htm.

[6] Pour avoir une idée sur les méthodes d’évaluation des ONG, nous vous renvoyons à Piveteau Alain, Évaluer les ONG, Paris, Karthala, 2004. Dans cet ouvrage, l’auteur traite des seules ONG intervenant au Burkina Faso et plus spécialement dans le domaine des opérations agricoles. Il illustre par ces travaux de terrain la problématique de la gouvernance participative. 

[7] Le Comité Économique et Social (CES) de l’Union Européenne s’est essayé à clarifier le concept de « société civile organisée ». Le Comité, dans un rapport de son Bureau du 10 juillet 2001, l’a décrite comme « l’ensemble des associations et organisations qui assurent la représentation d’intérêts des citoyens pour la défense de valeurs propres. Ces intérêts peuvent être liés à une fonction, découler d’un statut objectif ou encore concerner la défense d’une cause commune », Doc. CES 1009/2001. Voir parmi la littérature relativement récente sur le sujet, l’analyse généalogique très précise proposée par Sunil Khilnani. La société civile, une résurgence, in Critique internationale, n° 10, 2001, pp. 38-50.

[8] Le Conseil d’Administration de l’Agence pour la Conservation et le Développement en Afrique centrale (ACDAC) avait recommandé lors de sa session ordinaire de décembre 2001 que soit augmenté le nombre de ses adhérents.

[9] Ingénieur agronome et membre fondateur de l’ONG. Entretien réalisé le 11/10/2010 au siège social de l’organisation, Boulevard Bessieux (Libreville).

[10] 35 ans, guide touristique Figet, célibataire, père de 7 enfants, ethnie kota, lignage Oto, clan Mehanza, religion catholique protestant 4 avril 2009. 

[11] Chercheur à l’IRET/Cenarest, gérant de la Fijet

 

 

 http://kialopaulin.unblog.fr/2011/06/30/la-problematique-des-chutes-de-kongou-au-gabon-analyse-de-flora-ekozomwaka/#