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Titre du blog : La Nation
Auteur : africanostra
Date de création : 13-11-2009
 
posté le 22-05-2012 à 20:38:31

UPK-Finances publiques

 

 UNIVERSITE POLYTECHNIQUE DE KOUGOULEU


 

 

B)-Les bases législatives des Finances publiques

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La loi, au sens strict, est aussi une source éminente des Finances publiques. Tel qu’il en résulte des Constitutions française et gabonaise, il s’agit de la loi organique. C’est ainsi qu’en France, parle-t-on de la loi organique n° 2001-652 relative aux lois de finances (LOLF). Tandis qu’au GABON, on est en passe de mettre en pratique la loi organique n° 31/10 relative aux lois de finances et à l’exécution du budget (LOLFEB). Aussi, convient-il d’expliquer la notion de loi organique (1), avant d’examiner le train des réformes engagées dans la gouvernance financière de l’Etat (2).

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1-La notion de loi organique

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La loi organique est, en Droit constitutionnel, une « loi votée par le Parlement pour préciser ou compléter les dispositions de la Constitution » [1]*. Les Constitutions française et gabonaise prévoient « limitativement les cas de recours aux lois organiques et [font] de celles-ci une nouvelle catégorie de lois entre les lois constitutionnelles et les lois ordinaires en les soumettant à des conditions particulières d’adoption et de contrôle » (C1958, art.46)*. Leur nature juridique intermédiaire fait donc la singularité des lois organiques.

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Ce à quoi Michel de VILLIERS et Armel LE DIVELLEC, plus prolixes, renchérissent en indiquant qu’est appelée loi organique, la « Loi qui, à la demande explicite du constituant, complète et précise la Constitution. Adoptée selon une procédure en principe intermédiaire entre la procédure de révision constitutionnelle et la procédure législative ordinaire, mais en fait à peine plus exigeante que cette dernière (il faut surtout remarquer le caractère obligatoire du contrôle de constitutionnalité et le droit de veto du Sénat quand il s’agit de lois organiques relatives au Sénat, v. art. C. 46), la loi organique permet d’alléger la Constitution de dispositions accessoires et de faciliter des adaptations généralement non substantielles de l’organisation des pouvoirs publics » [2]*. L’exemple pris, à l’appui de cet argument, est celui de l’importante révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 en France, dont l’application a été conditionnée par l’adoption d’une dizaine de lois organiques.

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En complément, Pierre AVRIL et Jean GICQUEL soutiennent aussi que la loi organique est « Traditionnellement, [la] loi relative à l’organisation et au fonctionnement des pouvoirs publics (par extension, le décret du 19 juin 1956 sur la présentation du budget, pris sur habilitation législative, a été qualifié d’organique). La Constitution de 1958 (art. 46) a défini cette notion jusque-là imprécise : est organique, la loi prévue par la Constitution, adoptée selon une procédure particulière, et obligatoirement soumise au contrôle du Conseil constitutionnel (art. al. 1er) [3]*.

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Ainsi, la loi organique n° 2001-692 du 1er aout 2001 a-t-elle fait l’objet du contrôle du Conseil constitutionnel français, qui l’a validée par sa décision n°2001-448 DC du 25 juillet 2001. Il en est de même au GABON pour la loi organique n°31/10, qui fut également soumise au contrôle de constitutionnalité. La décision n° 31/CC du 8 octobre 2010 de la Cour constitutionnelle a, à ce sujet, déclaré la LOLFEB conforme à la Constitution, sous réserve de la reformulation des articles 19, 23, 24, 25, 26, 27, 41, 51, 62, 87 et 91. On note à cet égard, que les dispositions de l’article 1er relatives aux directives de la CEMAC et l’article 2[4] de la LOLFEB, détachés du reste du texte, ont été censurées par la « Gardienne des lois ».

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Bien plus qu’une conséquence de sa nature juridique, la loi organique relative aux lois de finances est rigoureusement contrôlée par le juge constitutionnel en raison du train des réformes essentielles qu’elle entend engager dans la gouvernance financière de l’Etat.

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2-Le train des réformes engagées dans la gouvernance financière de l’Etat

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La LOLF, en France, est adoptée conformément à l’article 47 de la Constitution d’octobre 1958. Elle remplace, à cet effet, l’ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances. Adoptée le 1er Août 2001, la LOLF connaît une première modification le 12 juillet 2005 pour adapter l’architecture juridique et les capacités administratives de l’Etat aux exigences de sa nouvelle gouvernance financière. Les efforts de révision, puis de réforme de la loi n° 4/85 du 27 juin 1985 relative aux lois de finances en 2005 préparent l’ancrage de la LOLFEB à l’approche novatrice adoptée par la nouvelle « Constitution financière » de la France. Et cette approche novatrice s’exprime globalement à travers le perfectionnement de la gestion publique (a), ainsi que le renforcement des pouvoirs budgétaires du Parlement (b) et les limitations de la compétence financière du Parlement (c).

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a-Le perfectionnement de la gestion publique

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La réforme des Finances publiques repose essentiellement sur la logique de gestion, fondée sur le perfectionnement de la gestion publique, et non sur la logique politique classique tournant autour des activités régaliennes de l’Etat. Ainsi, observe-t-on que la réforme de l’Etat est substantielle caractérisée par la responsabilisation des acteurs politiques et administratifs (a-1) et la globalisation consécutive des crédits budgétaires, qui soulignent l’avènement d’une dynamique structurelle au cœur de l’Etat  (a-2).

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a-1 : La responsabilisation des acteurs politiques et administratifs

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La responsabilisation financière relève aussi bien des techniques juridiques, budgétaires et comptables, que d’une mutation profonde du rôle de l’Etat parlementaire et démocratique.

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Cette responsabilisation est ainsi passée par quatre mouvements successifs et complémentaires : le temps de la primauté du politique sur le technique (consentement de l’impôt via le représentant des citoyens) au XVIIIe siècle ; la période de l’encadrement juridique du pouvoir financier du Parlement au XIXe siècle, avec l’élaboration du droit public financier ; la troisième phase consacre, aux XXe et XIXe siècles, le règne du contrôle de la gestion publique, dominé par la maîtrise des dépenses et la responsabilisation des décideurs et gestionnaires publics ; puis l’âge qui s’ouvre actuellement, caractérisé par une conception qu’on qualifierait de « globalisante et délégatrice » (BARILARI et BOUVIER, p.23)* de la gestion des Finances publiques et de leur cadre d’expression fondamental qu’est l’Etat.

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Le mouvement qui est ainsi amorcé relève, non plus d’une réaction conjoncturelle, mais il se situe au cœur de la structure même de l’Etat et ses démembrements.

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a-2 : L’avènement d’une dynamique structurelle dans la réforme financière de l’Etat

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La gouvernance financière introduite par la LOLF et la LOLFEB concerne l’organisation et la distribution des pouvoirs budgétaires, car elle touche tant les gouvernants que les gestionnaires. Cette nouvelle gouvernance des Finances publiques est une conséquence de l’autonomie des acteurs financiers et la source même de leur pouvoir. Dans la mesure où ce processus est profondément ancré dans une perspective à très long terme, on peut donc noter qu’il revêt tous les aspects d’un phénomène de société à travers la dynamique structurelle de la réforme des Finances publiques et de l’Etat.

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Au GABON, comme en France, la restructuration, à peu de chose près, du Ministère des Finances en un département mieux approprié à ces défis est la preuve manifeste de cette réflexion de longue haleine : Ministère du Budget, des Comptes publics, de la Fonction publique, Chargé de la Réforme de l’Etat. Les expériences amorcées avec la création de la Caisse de dépôts et de consignations, par exemple, soulignent la volonté antérieurement exprimée d’œuvrer à la globalisation des prêts au niveau de l’Etat et des Collectivités locales. La marche vers l’autonomie de gestion de celles-ci est d’ailleurs confirmée par l’adoption de la loi relative à la décentralisation en 1996, qui aménage le partage des compétences et donc des responsabilités entre l’Etat et ses démembrements territoriaux.

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Malgré la dominante structurelle perceptible dans cette dynamique, les phénomènes conjoncturels restent essentiels. La réforme de l’Etat, par le prisme d’une nouvelle gouvernance financière trouve un parfait stimulant dans la crise financière et fiscale de l’Etat. Plutôt qu’un « Etat à tout faire », selon la formule du Pr PAMBOU TCHIVOUNDA, le nouveau rôle de la Puissance publique dérive vers une responsabilisation financière progressive des régions, départements et communes, voire de cette nébuleuse d’acteurs économiques et sociaux appelée société civile.

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Et la gestion financière publique centrale et la locale sont alors toutes deux préposées à passer sous l’empire des méthodes de management empruntées aux entreprises. Il s’agit, notamment, de la programmation pluriannuelle des investissements, du contrôle de la dette et de l’analyse financière. Ainsi, les ministères, leurs administrations et dépendances sont-ils soumis à cette dynamique : la responsabilisation financière et l’autonomie de gestion. La globalisation des crédits budgétaires ou la comptabilité d’exercice et les tableaux de trésorerie sont des pratiques managériales inspirées du privé qui se globalisent en touchant aussi bien le cœur de l’Etat, que d’autres personnes publiques.

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C’est pourquoi, il est permis de penser que la logique de gestion, inséminée dans l’appareil étatique, ne peut être mieux suivie qu’à condition de l’encadrer, de l’équilibrer et de la contrôler avec le renforcement consécutif des pouvoirs budgétaires du Parlement.

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b-Le renforcement des pouvoirs budgétaires du Parlement

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Le train des réformes engagées dans la gouvernance financière de l’Etat par les lois organiques relatives aux lois de finances en France et au GABON conduit à un renforcement des pouvoirs budgétaires du Parlement. Ce renforcement intervient à trois (3) niveaux, qui revitalisent le rôle du Parlement dans le processus de vote du budget (b-1) et le rôle du Parlement dans le contrôle de l’exécution du budget (b-2). D’une façon générale, on note, à travers ces réformes, une amélioration des capacités législatives du Parlement en matière financière (b-3).

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(b-1)-Le rôle du Parlement dans le processus de vote du budget

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A en croire une étude récente (Michel BOUVIER, Marie-Christine ESCLASSAN et Jean-Pierre LASSALE, Finances publiques, 10e édition, LGDJ, Paris, 2010, p.368)*, « la préparation du budget est un processus pragmatique qui évolue selon les circonstances. La loi organique du 1er aout 2001 est peu prolixe en ce qui concerne la phase interne de préparation – celle qui précède l’examen et la discussion parlementaires. » On retient cependant qu’après les phases d’élaboration par le Gouvernement et celle de l’examen juridictionnel par le Conseil d’Etat, le tour revient au Parlement dans le processus de vote du budget. L’examen du rôle du Pouvoir législatif en cette matière appelle à cerner un certain nombre de questions, parmi lesquelles on note: l’information du Parlement et le débat d’orientation budgétaire (b-1-1), la fixation définitive de l’information destinée au Parlement (b-1-2), les délais d’adoption du budget et leurs sanctions (b-1-3), ainsi que la discussion du budget en commissions et en séance publique (b-1-4) et le droit d’amendement du Parlement (b-1-5).

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b-1-1 : L’information du Parlement et le débat d’orientation budgétaire.Sans que cela ne constitue une obligation juridique, le Gouvernement est porté à associer le Parlement au processus d’élaboration du budget. Celui-ci est ainsi informé des orientations observées en cette matière.

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En France, cette pratique est inaugurée au cours de la préparation du budget pour l’année 1997, lorsque le Gouvernement transmet aux chambres parlementaires en mai 1996 un important document intitulé : Rapport d’orientation budgétaire. Lequel rapport définit les principales priorités de la politique nationale en matière budgétaire. Ainsi naît le rituel du débat d’orientation budgétaire à l’intérieur même des deux chambres du Parlement. Ceci permet aux élus du Peuple, « d’une part d’être informés assez tôt de la stratégie gouvernementale, d’autre part d’en discuter, en formulant des suggestions ou des critiques. » (François CHOUVEL, Finances publiques 2011, 14e édition, Gualino, Collection « Mémentos LMD », p.65)*. A l’exception de quelques années où ce débat n’eut pas lieu, la pratique s’et déroulée à intervalles plus ou moins réguliers jusqu’en 2008 entre juin et juillet de l’année n-1 pour le budget de l’année prochaine.

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Même si ce débat continue à être facultatif, la loi organique n°2001-692 du 1er Août 2001, en son article 48, institutionnalise le débat d’orientation budgétaire, désormais connu sous le nom englobant de débat d’orientation des finances publiques depuis 2008. A cet effet, le Gouvernement s’emploie-t-il « au cours du dernier trimestre de la session ordinaire (de), présenter un rapport sur l’évolution de l’économie nationale et sur les orientations des finances publiques comportant une analyse des évolutions économiques, une description des grandes orientations de sa politique économique et budgétaire au regard des engagements européens de la France, une évaluation à moyen terme des ressources de l’Etat ainsi que ses charges ventilées par grandes fonctions, la liste des missions, des programmes et des indicateurs de performance associés à chacun de ces programmes envisagés par le projet de loi de finances de l’année suivante. » (F. CHOUVEL, op. cit., p.65, p.66)*. Il en est ainsi de la réforme consécutive à la Lolf.

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De façon générale, on peut observer qu’au GABON, l’information du Parlement commence par la présence des « annexes générales prévues par les lois et règlements » (article 47, LOLFEB)* parmi les documents joints au projet de loi de finances de l’année, en ce qu’elles sont une formidable mine de données sur les politiques publiques définies en matière financière. Cette disposition est d’ailleurs complétée par l’article 50 in fine de la LOLFEB, qui établit que la loi de règlement également peut être porteuse de dispositions concernant l’information du Parlement quant à la gestion de finances publiques.

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S’agissant précisément de l’examen et du vote des lois portant budget de la République gabonaise, l’article 52, alinéa 1, de la LOLFEB reprend à peu de choses près la lettre et l’esprit de l’article 48 de la Lolf, précité : « En vue de l’examen et du vote du projet de loi de finances de l’année par le Parlement, le gouvernement présente, avant la clôture de la première session ordinaire, un rapport circonstancié sur l’évolution à moyen terme de l’économie nationale et sur les orientations des finances publiques… » Lequel rapport est, l’avons-nous signalé à propos de la France, un outil essentiel dans l’appréciation ou l’évaluation des grandes lignes définies par l’Administration afin de pourvoir au patrimoine de l’Etat.

*Que peut donc comporter ce rapport, en termes d’informations et de méthodologies retenues par le Gouvernement ? A en croire l’article 52, tirets 1-4, on y trouve précisément : « une analyse des évolutions économiques constatées depuis l’établissement du rapport mentionné à l’article 46 de la (Lolfeb), une description des grandes orientations de la politique économique et budgétaire au regard des engagements du GABON (ainsi), qu’une évaluation des ressources de l’Etat et des charges ventilées par missions et la liste des missions, programmes et leur objectifs et indicateurs de performance associés à chacun de ces programmes, envisagés pour le projet de loi de finances de l’exercice suivant. » Comme en France, sans être une procédure obligatoire, le débat d’orientation budgétaire peut ainsi naître au sein du Parlement gabonais à la faveur de cette transmission d’informations fort précieuses par le Gouvernement.

Il semble que, passée cette phase de mise à disposition d’informations substantielles aux représentants du Pouvoir législatif, s’ouvre une autre, cette-fois consacrée à la mise au point définitive des informations portées à l’attention du Parlement.

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b-1-2 : La fixation définitive de l’information destinée au Parlement.En Juillet et Août a lieu la finalisation des documents devant être transmis au Parlement. Sont particulièrement visés les documents concernant la justification des crédits et ceux touchant à la présentation globale des projets annuels de performance. On note aussi, à titre d’aspects abordés ou clarifiés dans ce cadre, la présentation des évaluations pluriannuelles. A l’aune de l’année 2007, où aucune lettre plafond n’a été adressée aux ministres en raison de son caractère électoral en France, on peut s’interroger sur le choix d’y consacrer la finalisation des arbitrages au GABON.

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En attendant d’approfondir nos recherches sur la question, il importe à présent de noter que le vote du budget par le Parlement obéit à des délais stricts d’ailleurs établis par la Constitution. D’où la garantie du respect de ces délais par un certain nombre de sanctions.

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b-1-3 : Les délais d’adoption du budget et leurs sanctions. – Il convient de mettre en résonnance l’Article 48 de la Constitution et l’article 54 de la LOLFEB, car ils traitent précisément de la question des délais impartis (*) aux acteurs du vote du budget et des sanctions définies en conséquence (*).

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*Les délais impartis sont à rechercher dans la lecture combinée des dispositions constitutionnelle et légale précitées. Aux termes de l’Article 48 C1991, « Toutes les ressources et les charges de l’Etat doivent, pour chaque exercice financier, être évaluées et inscrites dans le projet annuel de la loi de finances déposées par le gouvernement à l’Assemblée nationale quarante-cinq jours au plus tard après l’ouverture de la seconde session ordinaire. » Ce même délai est explicitement requis à l’article 54 de la LOLFEB, qui énonce (que) « Le projet de la loi de finances de l’année, y compris les documents l’accompagnant prévus aux articles 45 et 46 de la présente loi, est déposé par le gouvernement sur le bureau de l’Assemblée nationale au plus tard quarante-cinq jours après l’ouverture de la seconde session ordinaire. » Il s’agit là d’une balise bien connue du Droit français qui, contrairement au gabonais, ne prévoit qu’un délai de quarante jours pour la première lecture du projet de loi de finances par l’Assemblée nationale après dépôt (Article 47 C1958 et article 40 Lolf)*.

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Ce délai qui encadre l’examen prioritaire du projet de budget par la Chambre basse du Parlement court à compter du dépôt concomitant du projet de loi de finances et de la totalité des documents explicatifs qui s’en rattachent. A savoir, le rapport économique, le rapport financier, les annexes explicatives bleues. Cependant, en cas de dépôt méthodiquement séparé ou échelonné, la procédure peut ne pas souffrir d’un vice d’inconstitutionnalité. Car on fixera au point de départ exact, le jour du dépôt du dernier des instruments budgétaires en question.

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L’examen du texte par le Parlement incombe également à la chambre haute, le Sénat. A ce propos, l’Article 48, alinéa 2 de la Constitution de 1991 dispose : « Si l’Assemblée nationale ne s’est pas prononcée en première lecture dans un délai de quarante-cinq jours après le dépôt du projet, le Gouvernement saisit le Sénat qui doit statuer dans un délai de vingt jours. Il est ensuite procédé à son examen dans les conditions prévues à l’article 58 a. » Telle est également la lettre de l’article 54, alinéa 2 de la LOLFEB, rédigé à l’identique et qui prévoit que « Si l’Assemblée nationale ne s’est pas prononcée en première lecture dans un délai de quarante-cinq jours après le dépôt du projet, le Gouvernement saisir le Sénat qui doit statuer dans un délai de vingt jours. Il est ensuite procédé à son examen dans les conditions prévues à l’article 58a de la Constitution. » Ainsi, le délai constitutionnel global dans lequel est enfermé l’examen du projet de loi de finances par le Parlement est-il préfixé à soixante-cinq jours, auxquels on ajoute les quinze jours de délai exceptionnel laissé au Parlement pour statuer sur le projet de loi de finances en session extraordinaire (Art. 48, alinéa 3 C1991, art. 54, alinéa 3 LOLFEB)*.

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En ce qui concerne le renvoi à l’Article 58a de la Constitution, il importe de noter que cette disposition énonce le principe selon lequel « Tout projet ou proposition de loi est examiné successivement dans les deux chambres du Parlement en vue de l’adoption d’un texte identique. » (alinéa 1)* La conséquence malheureuse de ce principe est que « Lorsque, par suite d’un désaccord entre les deux chambres, un projet ou une proposition de loi n’a pu être adopté après une seule lecture par chacune des chambres, le Premier ministre a la faculté de provoquer la réunion d’une commission mixte des deux chambres, chargée de proposer un texte sur les dispositions demeurant en discussion. » (alinéa 2)*.

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En cas d’échec, toutefois,  de cette procédure d’ « adoption d’un texte commun, le Gouvernement saisit l’Assemblée nationale qui statue définitivement. » (alinéa 3)*. E, revanche, « Si la commission mixte adopte un texte commun, ce dernier ne devient celui du Parlement que s’il est adopté séparément par chacune des chambres. » (alinéa 4). Bien évidemment, cette procédure d’adoption des textes, qui vaut pour toutes les lois, est aussi valable pour la loi de finances, exceptions faites des singularités précédemment soulignées. Ce qui reste pendant, c’est le problème de la sanction faisant suite au non-respect des délais impartis au vote de la loi de finances par le Parlement.

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*Les sanctions encourues pour non-respect du délai de quarante-cinq jours + vingt + quinze imparti au Parlement est somme toute radicale. Il s’agit du dessaisissement du Pouvoir législatif au profit du Pouvoir exécutif. Telle est la décision consignée à l’Art. 48, alinéa 3, C1991, repris par l’article 54, alinéa 3 LOLFEB : « Si, au terme de la session budgétaire, le Parlement se sépare sans avoir voté le budget en équilibre, le Gouvernement est autorisé à reconduire par ordonnance le budget précédent. Cette ordonnance peut néanmoins prévoir, en cas de nécessité, toute réduction de dépenses ou augmentation de recettes… » Or, qui dit « ordonnance » dit domaine législatif exclusivement réservé au Pouvoir exécutif. D’où l’idée de dessaisissement du Pouvoir législatif au profit de ce dernier.

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C’est la raison pour laquelle, l’Article 48, alinéa 3 in fine, prévoit qu’en cas d’incapacité ou impossibilité pour le Parlement (à voter) « le budget en équilibre à la fin de [la] session extraordinaire, le budget est établi définitivement par ordonnance prise en conseil des ministres et signée par le président de la République. » Ce qui, parmi tant d’autres griefs, peut être constitutif d’un déficit de contrôle a priori de la politique gouvernementale en matière de finances publiques, dans la mesure où la Représentation nationale (se) serait privée du pouvoir d’évaluer, à travers les commissions spécialisées, la pertinence et la sincérité des orientations économiques et financières du pays.

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b-1-4 : La discussion du budget en commissions et en séance publique – Le rôle essentiel des chambres en matière d’examen du budget est réalisé par les commissions, tel qu’il apparaît de l’Article 59, alinéa 1er, de la Constitution : « Les projets et propositions de loi sont envoyés, pour examen, dans les commissions compétentes de chaque chambre du Parlement avant délibération en séance plénière. » Il existe donc une sorte de privilège, pour les commissions, à examiner préalablement les textes avant d’être discutés en séance publique.

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Une raison, parmi d’autres, justifie ce privilège, qui est en réalité, une précaution d’usage. (Car) « Après l’ouverture des débats publics, aucun amendement ne peut être examiné s’il n’a été préalablement soumis à la commission compétente. » (Art. 59, in fine, C1991)*. Au nombre de ces commissions (Art. 57, alinéas 2 et 3, C1991)*, on pense prioritairement aux commissions des finances*, puis aux commissions d’enquête et de contrôle (Art. 61 et 62, C1991), pour ce qui est du volet contrôle budgétaire du Parlement*.

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S’agissant du rôle tenu par le Parlement dans ce domaine, la LOLFEB prescrit, en son article 53, (qu’) « En vue de l’examen et du vote du projet de loi de finances de l’année, et sans préjudice de toute autre disposition relative à l’information et au contrôle du Parlement sur la gestion des finances publiques, les commissions de l’Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances et les autres commissions concernées adressent des question écrites au Gouvernement au plus tard le 15 septembre. Celui-ci y répond par écrit au plus tard le 20 octobre. » C’est au travers de ces questions-réponses que s’exerce le libre jeu de la démocratie et de l’Etat de droit sous-tendu par la gestion concertée et apaisée de la contribution publique commune.

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C’est en considération à cet esprit de transparence des institutions, que le Parlement, en tant que Représentant du Peuple souverain, jouit-il d’un droit d’amendement.

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b-1-5 : Le droit d’amendement du Parlement.En matière budgétaire, les parlementaires « ont le droit d’amendement » des projets de textes, y compris des textes à caractère budgétaire. Il semble, toutefois, que ce droit est davantage assorti de restrictions que de garanties. En effet, il fait plus partie des limitations aux pouvoirs budgétaires du Parlement que des éléments concourant au renforcement de ses capacités.

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Mais avant d’en arriver là, il importe de voir en quoi le rôle du Parlement peut être appréciable en matière de contrôle a posteriori et a priori de l’exécution du budget.

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(b-2)-Le rôle du Parlement dans le contrôle de l’exécution du budget

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Une chose est de voter le budget au travers de l’examen du projet de loi de finances. Une autre en est de contrôler l’exécution des instruments budgétaires à la fin de chaque exercice, afin de mieux aviser le Gouvernement sur ses possibles dérives ou insuffisances. C’est pour en rendre loisible la tâche au Parlement, que la Constitution et les textes subséquents reconnaissent, notamment, à cette importante institution la compétence de s’employer au contrôle et à l’évaluation de l’utilisation des crédits (b-2-1). Toute chose qui aboutit à l’implication du Parlement à la régulation de l’exécution du budget (b-2-2).

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b-2-1 : Le contrôle et l’évaluation de l’utilisation des crédits. Afin de permettre aux deux assemblées du Parlement de mieux contrôler et évaluer l’utilisation des crédits par l’Etat et les Collectivités locales, l’esprit de la LOLF conduit, d’une part, à la normalisation des pouvoirs de contrôle et d’évaluation du Parlement (*) et à l’instauration d’un contrôle professionnalité à travers la loi de règlement (*).

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*La normalisation des pouvoirs de contrôle et d’évaluation du Parlement.-Il s’agit, pour le Parlement, de rechercher le renforcement ses pouvoirs financiers sur le terrain du contrôle de l’exécution du budget. Le Parlement trouve, en cela, une puissante avancée dans la réforme de 2001 en France, qui réorganise et rationalise son pouvoir de contrôle et d’évaluation d’ailleurs étendu à l’ensemble des Finances de l’Etat et d’autres personnes morales de droit public.

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Telle est donc la nouvelle mission des commissions parlementaires des finances (article 57 LOLF)*. Au Président, au rapporteur général et aux rapporteurs spéciaux de ces commissions d’exercer ces attributions selon leurs compétences respectives. A l’exception des dossiers revêtus du sceau du secret Défense ou médical, voire de l’instruction et de la sécurité intérieure, un contrôle sur place et sur pièce est effectué par les organes précités sur tous les sujets et documents relatifs aux finances publiques. C’est pourquoi, ces pouvoirs d’audition, de renseignement et d’enquête peuvent aller jusqu’à la levée des entraves juridiques ou politiques par la juridiction (article 59 LOLF)* ou l’autorité administrative compétente (article 60 LOLF)*.

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On note, à cet effet, le rôle prépondérant de la Cour des comptes, aux fins de facilitation de la mission des commissions parlementaires chargées des Finances, tant en ce qui concerne la réalisation des enquêtes que la fourniture de toute forme d’assistance technique (art 58 LOLF)*. Le renforcement de ces pouvoirs du Parlement s’approfondit, à n’en point douter, avec la loi de règlement, qui professionnalise ainsi son contrôle de gestion des Finances publiques.

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*L’instauration d’un contrôle professionnalisé à travers la loi de règlement.- Cette logique de contrôle de gestion consécutive au mouvement LOLF s’accompagne obligatoirement d’une évaluation des résultats auxquels est parvenu l’exercice précédent, et donc, de l’efficacité des actions menées par les décideurs politiques. MM BARILARI et BOUVIER parlent alors de « contrôle parlementaire professionnalisé des finances de l’Etat » (p.42)* dans la mesure où la loi de règlement (LR) élargit et précise ses fonctions à la logique financière des entreprises (-), et se présente, en conséquence, comme un outil de contrôle professionnalisé de la gestion publique (-).

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-La précision et l’élargissement des fonctions de la LR à la logique financière des entreprises soulignent le fait nouveau, pour ce type de loi de finances, de comporter toutes les indications qui caractérisent le budget de l’exercice antérieur en termes de recettes et dépenses, de ressources et des charges de trésorerie qui ont concouru à la réalisation de l’équilibre économique et financier de l’année concernée. Un tableau de financement porte, en détail, toutes ces indications (art 37 LOLF).

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La logique d’entreprise se trouve de plus en plus côtoyée par le fait que la LR entre dans la procédure d’établissement de la comptabilité générale de l’Etat à travers l’approbation du compte des résultats de l’exercice correspondant et l’affectation au bilan préposé à son approbation. On note également d’autres vocations de la LR, en matière de ratification des modifications apportées aux derniers crédits ouverts au cours de l’année considérée, d’ouverture de crédits nécessaires à la régularisation des dépassements constatés en raison de cas de force majeure puis de majoration du montant du découvert autorisé, d’arrêt des soldes des comptes spéciaux limités audit exercice et d’apurement des pertes et profits intervenus sur chacun des comptes spéciaux.

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La présentation de toutes ces informations fait de la LR un performant outil de contrôle professionnalisé de la gestion des Finances publiques.

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-La Loi de règlement comme outil de contrôle professionnalisé de la gestion financière, implique une information suffisamment complète du Parlement sur les résultats atteints par l’action de l’Etat. Ceci permet donc au Représentant des citoyens d’apprécier l’adéquation entre les prévisions budgétaires et les réalisations constatées. Les Sénateurs et députés se retrouvent alors en situation de managers des entreprises ou des experts des Finances publiques à qui incombe la charge d’opérer une analyse financière. La logique de gestion ainsi adoptée puise la masse d’informations à porter à l’attention des chambres parlementaires dans la riche annexe du projet de LR (art. 54 LOLF)*.

*[À Développer] 

b-2-2 : L’association du Parlement à la régulation de l’exécution du budget. Il s’agit, ici, d’étudier, parmi les contrôles politiques effectués en cours d’exécution du budget, la part qui revient au Parlement. On peut, grosso modo, en scinder les compétences en deux éléments principaux : l’information spécifique des commissions des finances du Parlement (*) et l’information générale des parlementaires (*).

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*L’information spécifique des commissions des finances. – Elle se fait, précisément, au niveau des rapporteurs budgétaires (-) et à celui de la commission des finances proprement dite (-).

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-Au niveau des rapporteurs budgétaires, on note que la Lolf en son article 57 fixe la possibilité pour les commissions des finances de suivre et contrôler l’exécution des lois de finances, avant de procéder à l’évaluation de toutes les questions qui concernent les finances publiques. Et c’est au président et aux rapporteur général desdites commissions qu’échoit cette mission ; les rapporteurs spéciaux ayant leurs propres champs de compétence.

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Pour faire face à ces délicates attributions, les organes intéressés disposent alors d’un droit d’investigation sur pièce et sur place, ainsi qu’un pouvoir d’audition de toute personne ou autorité compétente. A l’exception des informations secrètes ou confidentielles relatives à la sécurité intérieure ou extérieure, à l’administration normale de la justice et au domaine médical, tout renseignement et document à caractère financier et administratif doit leur être communiqué.

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L’exercice de ces compétences est si capital, que l’article 59 de la Lolf prescrit la saisine de la juridiction compétente, qui statue en référé et sous astreinte, en cas d’obstacle ou d’entrave à la fourniture desdits renseignements après l’écoulement d’un délai raisonnable. Le juge constitutionnel français en consacre l’effectivité à travers sa décision n°2000-448 DC du 25 juillet 2001, relative au contrôle de constitutionnalité de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001.

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Pour mieux apprécier les attributions dévolues aux organes précités, il importe d’évaluer de manière globale le travail accompli au sein même de la commission des finances.

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-Au sein même de la commission des finances, on relève que chacune des chambres parlementaires est destinataire d’informations périodiques plus ou moins fournies. A titre d’exemples, il en est ainsi de la situation mensuelle de tous les crédits consommés par mission, par programme et par action. Il en est tout autant de la situation mensuelle de l’ensemble des dépenses engagées, de la situation mensuelle de l’Etat ou de la situation plutôt hebdomadaire du budget et des finances de l’Etat.

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Au nombre des pouvoirs budgétaires dont elle jouit, on observe que la commission des finances peut, faute d’obtenir des renseignements détaillés sur une situation budgétaire ou financière, demander enquête à la Cour des comptes, voire procéder à l’audition de sa principale autorité qu’est le Premier président. Ces mêmes pouvoirs d’investigation et d’enquête peuvent s’étendre à la convocation du ministre des Finances ou d’autres chefs de départements ministériels aux fins d’information sur l’exécution de la loi de finances de l’année.

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La loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001 prévoit elle-même, en son article 49, que les commissions des finances et d’autres font parvenir des questionnaires au Gouvernement, dans le but d’examiner et de voter le projet de loi de finances, le 10 juillet au plus tard. Le Gouvernement est tenu d’y répondre par écrit avant le 10 Octobre.

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A l’instar de la commission des finances (CF), un autre organisme, appelé mission d’Evaluation et de Contrôle (MEC), procède à l’audition des membres du Gouvernement et des hauts fonctionnaires. Car elle a pour but de pourvoir à l’évaluation et au contrôle de l’efficacité de la dépense publique, en collaboration avec la plus haute juridiction en matière de comptes. Les champs d’étude des rapports annuels de la MEC peuvent s’étendre des forces de sécurité au secteur éducatif, en passant par le travail et l’emploi, voire les transports, la fiscalité, la justice et le droit d’asile. Ces informations, assorties d’observations dûment notifiées, obligent l’autorité gouvernementale à y donner suite par écrit deux mois au plus tard, après réception.

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EN sus de ces procédures d’information particulière des commissions parlementaires compétentes en matière budgétaire et financière, les Finances publiques prévoient aussi des mécanismes d’information générale des parlementaires eux-mêmes.

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*L’information générale des parlementaires. – Les procédures des questions au Gouvernement, questions écrites ou questions orales permettent aux élus du Peuple, Représentants du contribuable, d’améliorer ou compléter leur information en matière budgétaire et financière.

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La recherche d’informations sur l’exécution du budget conduit donc les commissions permanentes du Parlement autres que les commissions des finances, à auditionner ministres et hauts fonctionnaires qu’elles jugent compétents. On peut donc considérer que la publication d’un certain nombre de d’indicateurs par le ministre des Finances intervient comme une façon indirecte de répondre à cette vocation des parlementaires*.

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En somme, le rôle du Parlement dans le contrôle de l’exécution du budget consiste en deux actions essentielles : contrôler et évaluer l’utilisation des crédits, puis s’impliquer à la régulation de l’exécution du budget dans le cadre du nécessaire contrôle politique exercé à ce sujet en cours d’exécution de la loi de finances. Une fois examinées les attributions du Parlement dans les domaines de l’exécution du budget, il reste à apprécier ses capacités à légiférer en matière budgétaire et financière.

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(Envoi du 22 Mai)

**MISES A JOUR REGULIERES


[1] In Lexique des termes juridiques 2011, 18e édition, Dalloz, 2010, Paris, p.496
[2] Voir Dictionnaire du droit constitutionnel, 7e édition, Sirey, Paris, 2009, p. 207
[3] Voir Lexique de droit constitutionnel, 2e édition, PUF/Q.s-j. ?, Paris, 2009, p.75
[4] Ainsi s’énonce l’article 2 de la LOLFEB : « - Les lois de finances déterminent, pour un exercice, la nature, le montant et l’affectation des ressources et des charges de l’Etat, ainsi que l’équilibre budgétaire et financier qui en résulte. Elles tiennent compte d’un équilibre économique défini, des politiques, des stratégies de développement économique et social arrêtés pour atteindre des objectifs et les résultats des programmes.     L’exercice budgétaire s’étend sur une année civile. »