VEF Blog

Titre du blog : La Nation
Auteur : africanostra
Date de création : 13-11-2009
 
posté le 10-01-2012 à 13:39:38

UNIVERSITE POLYTECHNIQUE

 

 INTRO AUX FINANCES PUBLIQUES


***un droit de la puissance publique

En droit fiscal, il n’y a pas de contrat. Les administrations fiscales comme la douane disposent d’impressionnants pouvoirs d’information, d’enquête, de redressement, de taxation d’office, notamment. La panoplie d’indemnités en termes de retard et de sanctions administratives est tout aussi considérable et variée, en dehors des sanctions pénales prévues à l’encontre des fraudeurs (à suivre : 30/11/2011, 16h39).  

 

***un droit réaliste et autonome ?

L’administration fiscale prélève l’argent où il est ; et les catégories juridique qu’elle utilise lui sont absolument propres et l’amène à une intense et subtile activité en matière de qualification juridique. Les techniques et les règles du Droit fiscal sont particulières. En France, les spécialistes citent souvent l’application du principe de confiance légitime*, échafaudé par cette matière. La singularité du Droit fiscal en fait-elle pour autant un droit autonome ? Selon les analyses de la plupart des auteurs, que nous partageons, le principe général de légalité*, qui sous-tend l’arsenal juridique du Droit public est le centre d’impulsion et de validation de la légalité fiscale. A ces deux disciplines du Droit public financier que sont les Finances publiques et le Droit fiscal s’y ajoute une dernière, à laquelle nombre de publicistes ne pensent guère : la Comptabilité publique.  

 

(3)-La Comptabilité publique

Cette matière concerne les personnes publiques, ou sujets de droit public, exceptées quelques établissements publics industriels et commerciaux, dépourvus de comptables publics. Les fondements légaux de la Comptabilité publique sont, en France, le règlement général adopté par décret le 29 décembre 1962 ; et au Gabon, la loi n°5/85 du 27 juin 1985. A la faveur du mouvement de réforme initié entre 2005 et 2010, cette dernière est, juridiquement, abrogée par la loi organique n°31/2010 relative aux lois de finances et à l’exécution du budget.   La Comptabilité publique repose sur un certain nombre de principes, dont le principe de la séparation des ordonnateurs et des comptables publics, ainsi que celui de la règle dite du « service fait », qui autorise une personne publique à ne payer la prestation due qu’après en avoir constaté la réalisation. Serait-ce cette règle qui interdirait, par exemple, de payer aux fonctionnaires des heures de grève ? Dans tous les cas, la Comptabilité publique est composée d’un sous-compartiment appelé comptabilité analytique, qui répond aux exigences de bonne et saine gestion des biens publics puis aux nécessités du droit de la concurrence. Ceci ne vaut, principalement, que pour les sujets de droit public engagés sur un marché concurrentiel.  Les comptables publics de l’Etat voient ainsi leurs comptes jugés par une institution juridictionnelle spéciale, la Cour des comptes, dont l’activité est soumise au contrôle de cassation du Conseil d’Etat. Les comptes des comptables publics des collectivités locales ou territoriales sont examinés par les Chambres régionales et territoriales des comptes. Leurs jugements sont susceptibles d’appel devant la Haute juridiction financière. 

 

L’Unité juridique des finances publiques, du droit fiscal et de la comptabilité publique vient de leur objet commun : l’argent public, qu’il faut employer (affecter, distribuer, dépenser) au mieux. Dans les pays développés, l’importance de la fiscalité et des finances publiques va bien au-delà des seuls besoins financiers des personnes publiques. Les recettes fiscales et les dépenses publiques tiennent désormais lieu d’instruments privilégiés de politique économique et sociale et de croissance écologique.

 

L’impact de l’endettement des personnes publiques sur les générations futures favorise cette dynamique. De grands débats secouent aujourd’hui l’Europe et l’Amérique du Nord sur la question des déficits publics. Une chose étant de s’essayer à une définition des Finances publiques, une autre est d’en rappeler les fondements légaux.   

 

 II-FONDEMENTS LEGAUX DES FINANCES PUBLIQUESSix (6) types de textes et principes forment les fondements légaux des Finances publiques. En effet, cette matière, qui compte parmi les plus vieilles du Droit public, comporte des bases constitutionnelles (A), législatives (B) et réglementaires (C). Mais elle repose également sur des normes communautaires (D), des règles internationales (E) et des fondements jurisprudentiels (F).

 

 A)-Les bases constitutionnelles

En considérant l’ensemble de la matière constitutive de la Constitution d’un Etat, la loi fondamentale comprend quelques éléments de base des Finances publiques. Pour s’en rendre effectivement compte, il importe d’examiner successivement le Préambule (1) et le corpus normatif de la Constitution (2). 

 1)-Le Préambule

Les textes à caractère juridique et politique sur lesquels de fonde le Préambule faisant partie de la Constitution, il importe donc d’y rechercher les contours philosophiques des Finances publiques. Dans l’ordre retenu par l’alinéa 2 du Préambule, on est alors amené à examiner les dispositions de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (DDHC) et de la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH). On y trouve, notamment, le principe du consentement à l’impôt (a), le principe de conformité de l’emploi de l’impôt au consentement du Peuple ou son mandataire (b), ainsi que celui de la périodicité du consentement des représentants des contribuables (c).

 

 

 a-Le principe du consentement à l’impôt

C’est à partir de 1215, que le roi Jean Sans Terre, admet, en Grande-Bretagne, la levée de l’impôt avec le consentement des représentants des contribuables. Les Révolutions anglaises ayant souvent influé sur la vie politique française, on note dans la Déclaration du 26 août 1789, une volonté manifeste de faire appliquer ce principe en France causant ainsi la rupture de l’Ancien Régime. Tels sont la lettre et l’esprit de l’article 14 de la DDHC, qui proclame : « Tous les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement… » Le système du mandat représentatif, très largement adopté par l’Etat moderne, nous conduit à voir les détails et justifications de ce principe en droit positif, où des organes spécialisés parlent, agissent et décident au nom du Peuple.

 

L’impôt, ressource essentielle du droit public financier, n’est plus le fruit de la contrainte brute autrefois significative de la puissance publique et du pouvoir régalien (du roi). Il est « consenti » par les représentants des citoyens. Mais il n’y a pas que cet aspect, qui découle de l’article 14 DDHC, car il sert tout autant de fondement au principe de conformité de l’emploi de l’impôt au consentement de l’intéressé.

 

 b-Le principe de conformité de l’emploi de l’impôt au consentement du Peuple ou son mandataire

En effet, ledit article dispose également que « Tous les citoyens ont le droit […] d’en suivre l’emploi, et d’en déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement… » Là encore, l’architecture juridique des institutions étatiques modernes nous en apporte la justification au travers du travail de contrôle budgétaire des chambres parlementaires et des juridictions des comptes. Ce qui est essentiel pour le suivi du principe du consentement, l’est aussi pour l’instauration de la périodicité dudit consentement.  

 

 c-L’instauration du principe de périodicité du consentement des représentants des contribuables

L’article 14 inclut « la durée » parmi les exigences opposées à la puissance publique dans la levée de l’impôt. Celle-ci ne peut plus se faire, comme au Moyen-Age ou dans les sociétés archaïques, tout au long de l’année (on est d’ailleurs en droit de se poser de sérieuses questions sur la pratique des lois de finances rectificatives en hausse de dépenses) à la manière d’une corvée ou d’un régime d’esclavage. C’est de là que vient le principe du vote annuel (annualité) du budget, instrument d’encadrement et de gestion du patrimoine de l’Etat. Corollaire à ces garanties juridiques et philosophiques, le droit de propriété individuelle trouve ici une place de choix dans la sacralisation des droits fondamentaux de la personne humaine, tel qu’il apparaît de l’article 17 DDHC : « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité ». Or, ce principe de légalité repose lui-même, sur le postulat de conformité à la loi, selon lequel, « La loi est l’expression de la volonté générale » et que tous « sont égaux » devant elle (article 6 DDHC). « Légalité » rime alors fort harmonieusement avec l’« Egalité ».

 

L’autre texte d’inspiration philosophique, intégré au Préambule de la Constitution gabonaise, est profondément imprégné par cette vocation. On trouve, effectivement, dans la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 Décembre 1948, un certain nombre de dispositions relatives au Finances publiques. Le principe d’égalité des citoyens (y compris les délinquants) « devant la loi », est ainsi confirmé (article 7 DUDH). Il en est également de l’interdiction de violation du droit de propriété (article 17). Traductrice des évolutions modernes des Sociétés, la DUDH porte, plus profondément, les impératifs de bonne gouvernance, à travers ce qui constitue la base-même du principe du consentement à l’impôt : le refus de l’arbitraire, de la servitude involontaire et de l’oppression. Elle proclame, à ce sujet, le rattachement de la légitimité (l’autorité) de tout pouvoir public au choix (volonté, consentement) du Peuple (article 21, §3).

 

On peut, par ailleurs, voir dans l’article 25 DUDH, un précurseur du phénomène récent du citoyen/contribuable-client, exigeant à souhait, quant à la contrepartie institutionnelle de l’impôt qu’il paie : « Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l’alimentation, l’habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires ; elle a droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie, d’invalidité, de veuvage, de vieillesse ou dans les autres cas de perte de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté .». Et tous ces principes, ou tout au moins leurs contours, se (re)trouvent dans le Préambule de la Constitution. Sans avoir la prétention de les épuiser totalement.

 

 

 

(N’Djamena, TCHAD, le 10 janvier 2012, 13h24)