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Titre du blog : La Nation
Auteur : africanostra
Date de création : 13-11-2009
 
posté le 02-10-2010 à 03:26:28

IDENTITE NATIONALE (I)

 Qu’est-ce qu’être Gabonais ?

 

 

 

***

 

Premier pas vers une série d’exposés que je me propose de rédiger sur l’Identité nationale en collaboration avec certains collègues africains, européens et orientaux, la question de la nationalité me paraît essentielle pour en saisir les bases et mieux comprendre l’apogée de législations de plus en plus controversées en matière d’Etat-civil et la contestation des politiques publiques de certains Etats sur l’immigration.

 

« Qu’est-ce qu’être gabonais ? » Le questionnement ainsi posé se veut sans malice, car il n’y a aucun sous-entendu à en tirer ou à y chercher. Il s’agit d’une thématique citoyenne visant à attirer l’attention de celles et ceux qui n’auraient pas eu l’occasion de visiter nos Textes sur quelques fondamentaux de la vie publique et privée ; et de rappeler l’impérieuse nécessité de s’y investir plus souvent à d’autres, qui en auraient perdu l’habitude.

 

C’est la raison pour laquelle, il importe d’aller à l’essentiel en examinant, d’une part, la question juridique de la nationalité (I) et, d’autre part, les conditions d’accès à la nationalité gabonaise (II).  

 

I-La question juridique de la nationalité

La question que pose ainsi la nationalité renvoie aux sciences juridiques, certes. Mais il n’en demeure pas moins qu’en plus du critérium du Droit (B), il apparaît judicieux de la mettre préalablement en relief à travers ses acceptions doctrinales (A).  

 

A)-Acceptions doctrinales

Nationalité est un substantif résultant de l’adjectif national ; lequel est lui-même dérivé de Nation : du latin natus, qui signifie initialement « naissance » (Gérard CORNU, Vocabulaire juridique, PUF/Quadrige, Op. cit., p.594, 596)*. C’est donc à ce titre que la Nationalité est entendue comme le « Lien juridique et politique, défini par la loi d’un Etat, unissant un individu audit Etat » (Idem, p.496)*. La référence à une Terre et à une Organisation sociale est donc capitale.

 

 

Je ne multiplierai surtout pas d'acceptions doctrinales, afin de nous permettre de rester concentrés sur le sens précis de la notion que vise à analyser le présent exposé. A cet égard, convient-il d’indiquer la confusion, au sens d’impossible ou difficile distinction, entre Nationalité et Citoyenneté. Telle est la définition qu’en donne Michel de VILLIERS : « toute acquisition de la nationalité française par un étranger lui confère la citoyenneté et, par voie de conséquence, l’électorat et l’éligibilité » (Dictionnaire de droit constitutionnel, Armand Colin, Op. cit., p.154)*. 

 

Mais, à regarder de plus près, juridiquement, la scission entre les deux notions peut être aisément établie par la suspension judiciaire de la citoyenneté (effets de certaines sanctions pénales privatives de droits civiques notamment)*. Ce qui n’est pas le cas de la Nationalité, dont l’effectivité ne dépend pas des humeurs du prétoire et qui jouit d’un caractère permanent, en dehors des cas spécifiques de perte et de déchéance (on y reviendra)*. 

 

Ainsi se présente la notion de Nationalité, sous-tendant notre Question initiale à propos de « l’être gabonais ». Il devient, dès lors, opportun de voir le critérium du Droit à ce sujet.  

 

B)-Critérium du Droit

Au regard des sources du Droit positif (normes en vigueur), les critères établis par le Droit gabonais ont des bases constitutionnelles (1) et des sources législatives (2). 

 

1 : Les bases constitutionnelles de la Nationalité

La Loi fondamentale est effectivement composée d’un certain nombre de dispositions susceptibles d’être considérées comme les bases constitutionnelles du droit à la Nationalité. Officiellement, les normes y relatives retiennent l’Article 47 (c). Mais une lecture attentive laisse apparaître l’impact significatif de l’Article 10 (b) puis de l’Article premier (a) en cette matière. 

 

(a)-L’Article premier

Le Titre préliminaire de la Constitution a une disposition unique, l’Article premier, dont deux alinéas me paraissent intimement liés à la Question de la Nationalité, tant il est qu’elle se confond avec son corollaire : la Citoyenneté. 

 

Ainsi, le droit à la Nationalité est-il perceptible à l’alinéa 9 de l’Article premier de la Loi fondamentale : « Tout citoyen gabonais séjournant ou résidant à l’étranger bénéficie de la protection et l’assistance de l’Etat, dans les conditions fixées par les lois nationales ou les accords internationaux ». En effet, dans la mesure où le GABON doit identifier les personnes bénéficiaires de sa protection à l’extérieur de son territoire, il faut donc que les autorités compétentes en viennent à édicter les règles relatives à cette qualité.

 

Ce critère est d’autant plus essentiel, que l’individu, maillon originel de la Population, est au cœur de la définition sociologique de l’Etat. De la même manière, la protection du bien-nommé « territoire national » et des institutions connexes est fonction de l’identification des personnes devant en exécuter les devoirs.

 

On en revient invariablement à la Question irréductible de la Nationalité à l’alinéa 21. Car ce n’est qu’à son prisme qu’il est possible de convoquer tout citoyen au « devoir de défendre la patrie » et à « l’obligation de protéger et de respecter la Constitution, les lois et les règlements de la République ». Une personne non assujettie au lien juridique établi plus haut serait libre de ce type d’engagements.  

 

Ce principe de base est sans doute à la source de la suspicion des « nationaux » vis-à-vis des « étrangers » ; de ceux-là même à qui le Droit ne fait aucune obligation de protéger la patrie, et qui subissent donc l’a priori de n’y vivre que pour en cueillir les fruits ou, pire, en affecter les mécanismes de jouissance ! 

 

Par ailleurs, il n’est pas exagéré de penser que l’Article 10 de la Constitution met une pression singulière sur l’élaboration des normes de nationalité, au regard de l’enjeu primordial qui s’en dégage. 

 

(b)-L’Article 10

Certains candidats à la dernière élection présidentielle ont tendu à faire de la nationalité un problème folklorique, alors qu’il s’agit, avec la capacité juridique, d’une des conditions d’éligibilité à la fonction suprême : une question juridique qui fâche !

 

En effet, l’Article 10, alinéa 4 prescrit une norme fixe : « Toute personne ayant acquis la nationalité gabonaise ne peut se comporter comme candidat à la Présidence de la République. Seule sa descendance ayant demeuré sans discontinuité au Gabon le peut, à partir de la quatrième génération.» 

 

En l’état, ce qui nous intéresse c’est la qualité de Citoyen gabonais, dont la jouissance impose tout autant l’élaboration de règles précises en matière de Nationalité.  C’est à cet effet que je considère, qu’au regard de l’importance que revêt cette élection, la disposition constitutionnelle pertinente est l’un des fondements juridiques du lien de Nationalité.

 

Bien entendu, parallèlement aux dispositions sus-examinées, celle qui bénéficie de la référence explicite, c’est l’Article 47 de la Constitution. 

 

(c)-L’Article 47

En son Article 47, alinéa 3, la Constitution dispose effectivement les matières qui relèvent du domaine de la Loi. Et, parmi celles-là se détachent distinctement : « la nationalité, l’état et la capacité des personnes, les régimes matrimoniaux, les successions et les libéralités, le statut des étrangers et l’immigration ». Cet article sert donc de pont entre les bases constitutionnelles et les sources législatives du droit à la Nationalité.

 

2-Les sources législatives

La Nationalité, tout étant du ressort du politique, est un produit de la Loi ; et il en est ainsi de la Loi n° 37/98 du 20 Juillet 1999 portant Code de la nationalité gabonaise (voir Journal hebdomadaire d’informations et d’annonces légales, N° 412-11 Décembre 1999)* 

 

Cette Loi donne, entre autres éléments, la réponse à la généalogie de l’Etat au GABON : « La nationalité gabonaise est le lien de droit qui, depuis le 17 août 1960, date de l’accession du Gabon à la souveraineté internationale, rattache les personnes à l’Etat gabonais » (article 2 du Code de la nationalité)*.

 

Distinction avec la Citoyenneté, dont l’effectivité est sujette à des conditions d’âge (majorité civile et électorale) et à des peines judiciaires, la Loi tient immédiatement à préciser que « [l]a nationalité est indépendante des droits des personnes… » (article 3)*. Les considérations de capacité ou d’intégrité civique y sont donc inopérantes. 

 

Il ne reste plus qu’à déterminer les conditions dans ou suivant lesquelles une personne peut être autorisée à se prévaloir de la Nationalité gabonaise ; tout le sens de la Question : « Qu’est-ce qu’être gabonais » ? Autrement dit : qui est-il qualifié par les normes en vigueur pour jouir de cette Nationalité ?  

 

 

II-Les conditions d’accès à la nationalité gabonaise

 

 

(à suivre)

 

Arthur BENGA NDJEME

Paris, le 1er Octobre 2010, 23 :34