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Titre du blog : La Nation
Auteur : africanostra
Date de création : 13-11-2009
 
posté le 11-09-2010 à 14:55:57

LE ROLE DES NATIONS UNIES DANS LA DECOLONISATION (III)

LES NATIONS UNIES ET LA QUESTION DES PEUPLES COLONIAUX

 

 

 

(suite)

 

 

Il est loisible, disions-nous, de rendre hommage à l'Organisation des Nations Unies, dont les résolutions ont, en plus des textes constitutifs et subséquents, manifesté la détermination en faveur de la décolonisation.

 

b-Les résolutions des principaux organes de l'ONU

Symboliques des débats, revendications, tensions et contradictions qui ont nourri le Droit international au lendemain de la seconde guerre mondiale, les résolutions de l'Assemblée générale me semblent plus emblématiques de l'influence de l'ONU en matière de décolonisation. C'est pourquoi, je choisis de vous en rappeler cinq (5).

 

*La résolution 1495 (XV): coopération des Etats membres.-Dans la mesure où les principales puissances membres de l'Organisation, sont également possesseurs de colonies, la résolution 1495 (XV) de l'Assemblée Générale du 17 Octobre 1960 doit faire partie des actes dont l'effet facilite le dénouement ou la détente des tensions coloniales.

 

Elle est l'occasion, pour l'organe délibérant de l'ONU, de "[réaffirmer] sa conviction que la force de l'Organisation des Nations Unies dépend de la coopération des Etats membres, qui devraient la lui accorder sans réserve afin de faire de l'Organisation un instrument plus efficace pour sauvegarder la paix et favoriser le progrès économique et social de tous les peuples" (paragraphe 2)*. Or, une bonne partie de cette paix et de ce progrès est prise en capture par la question coloniale.

 

Il s'agit donc là d'une importante prise de position en amont, qui va déterminer la suite de l'engagement de l'ONU sur la promotion de l'autonomie, puis de l'Indépendance des Peuples coloniaux. Telle est, entre autres, la portée de la résolution 1514 (XV).

 

*La résolution 1514 (XV): Déclaration sur l'octroi de l'Indépendance aux pays et aux peuples coloniaux.-Nous voici au coeur du sujet; et cette Déclaration dont la force juridique est amoindrie par la relégation des résolutions de l'AGNU au rang de recommandations, n'est pas moins mobilisatrice des efforts internationaux en faveur de la décolonisation.

 

Ainsi, la résolution du 14 Décembre 1960 est-elle fondée sur la conviction "que le processus de libération est irréristible et irréversible et que, pour éviter de graves crises, il faut mettre fin  au colonialisme et à toutes les pratiques de ségrégation et de discrimination dont il s'accompagne" (alinéa 10)*. Pourquoi une telle force de conviction imprègne-t-elle alors l'Assemblée Générale au moment où les Sociétés placées sous ce régime de liberté limitée n'ont encore aucune capacité à assumer leur propre destin?

 

Eh bien, cette instance qui se veut universelle est, d'une part, absolument "Convaincue que tous  les peuples ont un droit inaliénable à la pleine liberté, à l'exercice de leur souveraineté et à l'intégrité de leur territoire national" (alinéa 12)*. Puis, d'autre part, intimement persuadée "que le maintien du colonialisme empeche le développement de la coopération économique internationale, entrave le développement social, culturel et économique des peuples dépendants et va à l'encontre de l'idéal de paix des Nations Unies" (alinéa 8)*. Autrement dit: l'AGNU prévient les "puissances coloniales" que l'obstination à maintenir leur domination sur des Sociétés sous-développées compromet sérieusement l'aboutissement des buts et objectifs de l'Organisation mondiale.

 

Cette remise en cause des valeurs odieusement rappelées par le nazisme et le fascisme passe aussi bien par la prohibition de l'exploitation économique, que par l'interdiction de l'usage de la force militaire à l'encontre des Peuples soumis mais impatients de recouvrer une liberté effective (paragraphe 4)*. D'où l'adoption du premier paragraphe de la Déclaration selon laquelle:

 

"La sujétion des peuples à une subjugation, à une domination et à une exploitation étrangères constitue un déni des droits fondamentaux de l'homme, est contraire  à la Charte des Nations Unies et compromet la cause de la paix et de la coopération mondiales".

 

C'est en considération de cette Déclaration, qu' en sus des valeurs préalablement dégagées, l'ONU s'emploie à préciser les principes juridiques internationaux applicables aux Etats concernés.

 

*la résolution 1541 (XV): principes directeurs à l'égard des Etats, conformément à l'article 73 alinéa e ou 5 de la Charte.-L'Assemblée générale répond ici à une question essentielle, consistant à s'interroger sur l'application aux Etats de l'obligation de communiquer les renseignements relatifs à leur administration des territoires sous tutelle. Toute chose qui amène à restituer la disposition pertinente du Droit onusien:

 

"De communiquer régulièrement au Secrétaire général, à titre d'information, sous réserve des exigences de la sécurité et de considérations d'ordre constitutionnel, des renseignements statistiques et autres de nature technique relatifs aux conditions économiques, sociales et de l'instruction dans les territoires dont ils sont respectivement responsables, autres que ceux auxquels s'appliquent les Chapitres XII et XIII".

 

Selon l'organe plénier, cela ne fait l'ombre de quelque doute que cette obligation s'impose aux Etats. Car, il retient comme premier Principe l'affirmation suivant laquelle: "Les auteurs de la Charte des Nations Unies entendaient que le Chapitre XI soit applicable aux territoires qui étaient alors connus comme étant du type colonial". On ose simplement espérer que l'hypertrophie de l'Assemblée par l'admission massive d'anciens territoires coloniaux n'a pas fait de cette affirmation une interprétation téléologique de la Charte.

 

Qu'à cela ne tienne, l'universalisme de sa mission peut parfaitement mettre en échec toutes présomption de partialité de l'AGNU, dont on ne saurait ici contester l'objectivité. Il s'agit-là de principes et valeurs auxquels l'Etat africain post-colonial doit souvent se référer, afin de (re)situer son curseur fort animé sur l'intimidant écran de l'Humanité.

 

Une chose est de se fendre en proclamations et déclarations; une autre en est de les mettre en action. Comment l'Assemblée Générale s'y prend-elle?

 

*La résolution 1654 (XVI) du 27 Novembre 1961 traite précisément des questions concernant l'application de la Déclaration sur l'octroi de l'indépendance aux indigènes. Afin d'éviter l'écueil d'amateurisme et de la réaction épidermique, l'AGNU "[d]écide de créer un Comité spécial de dix-sept membre qui seront désignés par le Président de l'Assemblée générale au cours de [cette] session" (paragraphe 3)*. La mission dudit Comité est si déterminante au maintien de la paix et de la sécurité internationales via la décolonisation, qu'il est demandé au Conseil de tutelle de lui fournir l'assistance attendue de sa précieuse expérience (paragraphe 8)*.

 

Ces éléments montrent à suffisance que la question coloniale est loin d'avoir épuisé ses causes et conséquences. Plus près de nous, l'Assemblée Générale des Nations Unies vient dopter un certain nombre de résolutions consacrées à l'élimination du colonialisme.

 

*La résolution 60/120 du 8 décembre 2005 sur la Deuxième Décennie internationale de l'élimination du colonialisme.-Conformément à la résolution 55/146 proclamant "la période 2001-2010 deuxième Décennie internationale de lutte contre le colonialisme", l'Assemblée Générale adopte la 60/120 pour faire un point à mi-parcours de cet objectif et "[demander] aux puissances administrantes de coopérer pleinement avec le Comité spécial chargé d'étudier la situation en ce qui concerne l'application de la Déclaration sur l'octroi de l'indépendance aux pays et aux peuples coloniaux" (paragraphe 3).

 

Cette demande vise précisément à "formuler un programme de travail constructif au cas par cas, pour les territoires non encore autonomes, afin de faciliter l'exécution du mandat du Comité spécial et l'application des résolutions pertinentes de l'Organisation des Nations Unies relatives à la décolonisation" (§3, résolution A/RES/60/120, in fine)*. Ce qui signifie que tout ou presque reste à faire en matière de domination des certains Peuples par nombre de puissances; et que le colonialisme n'a pas encore rendu son dernier souffle.

 

D'ailleurs, une importante jurisprudence internationale, dont nombre de décisions sont encore inappliquées, tend à démontrer la réticence des Etats dits démocratiques quant au desserrement de l'étau colonial vis-à-vis de Peuples démunis. Bien au contraire, ce mouvement a pris des formes détournées et sybillines pour survivre aux prescrits de la Loi internationale.

 

II- LES PRINCIPALES DECISIONS DE JUSTICE INTERNATIONALE RELATIVES AUX DROIT A L'INDEPENDANCE

 

 

(à suivre)

 

Arthur BENGA NDJEME

PARIS, le 11/09/2010, 14:50