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Titre du blog : La Nation
Auteur : africanostra
Date de création : 13-11-2009
 
posté le 27-07-2010 à 13:16:30

DES INTITULES DES MINISTERES AU GABON

  
DU REMANIEMENT MINISTERIEL DU 16 JUILLET AU GABON.
Quel sens donné aux intitulés des ministères au sein du gouvernement et quelle crédibilité leur accorder ?

 

 

 

 

 

 

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L’une des raisons pour laquelle le reste du monde perçoit les Africains comme des extra-terrestres, c’est l’absence d’évaluation de leurs propres actes ; surtout, lorsque ceux-ci sont posés sur la scène publique. Vous me direz, sans doute, que le sujet qui m’amène à vous ce jour est insignifiant. Mais, il appert d’une vieille sagesse africaine, mise en relief par Hampâté Bâ, qu’« il n’y a pas de petite querelle » (Hélène Heckmann, chez Pocket, 2006, 156 p.)*.

 

Le fait ou l’acte à restituer est rendu public en mi-Juillet 2010. Par communiqué officiel, la présidence de la République gabonaise décide un geste pudiquement appelé : « remaniement ministériel technique » ; lequel soustrait au « ministre des Eaux et Forêts » l’une de ces rallonges et encombrements savamment appelés « portefeuilles », pour le confier au « ministre de l’habitat, du logement et de l’urbanisme ». Ainsi, ce dernier est désormais cumulard de la charge de « l’Environnement et du Développement durable ».

 

Ce fait ou cet acte, qui apparaît isolé et anodin est caractéristique du méli-mélo qui règne depuis des décennies au sein du gouvernement gabonais quant aux intitulés des ministères. Quel est le sens donné à ces ministères et quelle crédibilité faut-il leur accorder ?

 

Cette question m’amène à sortir de mes documents un vieux projet en trois points, que le récent remaniement ministériel remet au goût du jour : accuser d’incohérence le découpage des départements ministériels (I), faire observer la redondance de certains ministères (II) et questionner le maintien des administrations anachroniques (III). 

 

 

I-Accuser d’incohérence le découpage des départements ministériels

Quelques cas illustrent parfaitement l’incohérence qui existe entre nombre de départements ministériels au GABON. Je trouve, d’une part, incongru le fait de séparer les « Eaux et forêts » des charges « de l’Environnement et du Développement durable ». D’autant plus que les confier au « ministre de l’Habitat, du logement et de l’urbanisme » peut laisser croire que seules la construction des maisons et la conception des plans d’aménagement urbain mobilisent les thématiques écologiques. Le titulaire de ce poste, ailleurs, travaille, en réalité, en concertation avec le responsable des nouvelles énergies.

 

D’autre part, créer de manière autonome un « ministère de l’Agriculture, de l’Elevage, de la Pêche et du Développement rural », c’est appauvrir les Eaux et Forêts, car toutes ces activités sont interconnectées. Quels espaces sollicite-t-on pour cultiver, élever et pêcher, sinon les eaux et forêts ?

 

Par ailleurs, on se demande avec insistance ce que « la Décentralisation » peut bien faire dans le département « de l’Intérieur, de la Sécurité publique, de l’Immigration ». Outre le fait d’avoir concentré les départements « de l’Education nationale, de l’Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et de l’Innovation », le Gouvernement accroît l’incohérence de ses découpages en séparant « l’Enseignement technique » du reste des départements dédiés à l’Ecole.

 

De même, le sens donné au mot « Loisirs » laisse à désirer car ceux-ci vont de pair avec l’industrie du tourisme et non avec la Culture, la Jeunesse et les Sports. Outre l’absence de logique manifeste entre divers intitulés ministériels, la question de la redondance pose également problème. 

 

 

II-Faire observer la redondance de certains ministères

A l’incohérence s’adjoint la redondance. Le cas de trois (3) départements est particulièrement symptomatique de cette débauche d’énergie. Le Gouvernement s’emploie à trouver une différence de fond et de forme entre le « ministère des mines, du pétrole et des hydrocarbures » ; le « ministère de l’énergie et des ressources hydrauliques » puis le « ministère des eaux et forêts » désormais délesté de « l’environnement et du développement durable ».

 

A titre de comparaison avec la France, dont les institutions inspirent notablement celles du GABON, on observe que toutes ces fonctions sont confiées à un seul individu : le « ministre d’Etat, ministre de l’Ecologie, de l’Energie, du Développement durable et de la Mer, en charge des Technologies vertes et des Négociations sur le climat ». Ceci permet de faire des économies substantielles sur le train de vie de l’Etat à travers une réduction significative du nombre des membres du Gouvernement, et de ne pas multiplier, sans intérêt majeur des postes ministériels qui sont clairement redondants.

 

Enfin, je me suis promis de voir rapidement le problème d’intitulés de ministères, qui ne devraient plus exister, puisque franchement anachroniques. 

 

 

III-Questionner le maintien des administrations anachroniques

La décision de remanier le Gouvernement de manière technique en enrichissant un poste au détriment d’un autre est certainement un acte propitiatoire d’un événement révolutionnaire : l’abolition d’administrations dépassées. Je serais donc le premier à applaudir la disparition de ce « ministère des Eaux et Forêts », anachronisme du régime colonial, dont le seul intérêt était de doter les territoires exploités d’une administration chargée d’enregistrer et de collecter des richesses de la forêt et des eaux.

 

De la même manière, l’idée d’un « ministère de l’habitat, du logement et de l’urbanisme » me paraît inconciliable avec les ambitions d’un Pays émergent. Il s’agit-là de départements animés par des techniciens au sein des ministères chargés de l’Equipement et de l’Aménagement du territoire. Lorsqu’on veut construire, on ne le proclame point. Sinon, le très puissant ministère de l’Agriculture aurait déjà, du fait de son intitulé, permis au GABON d’atteindre l’autosuffisance alimentaire depuis un demi-siècle ! 

 

 

 

***

Ministère est un mot d’origine latine (ministerium), dérivé de minister ou « serviteur » (Gérard CORNU, Vocabulaire juridique, 6e édition, Association Henri Capitant, PUF/Quadrige, p.579)*. Le fait de confier à ce « domestique » (Idem, p. 580)* du Gouvernement des tâches incohérentes, redondantes, anachroniques ou trop encombrantes, déteint fatalement sur l’opérationnalité de son « service ». De flamboyants esprits ont démontré depuis des siècles l’intérêt, pour le Souverain, de s’appuyer sur des secrétaires efficaces et à qui sont confiées des responsabilités précises dans le cadre de leur mission. Les intitulés des ministères ne sont donc pas neutres. N’ayant pas le pouvoir d’influer sur le cours de la vie politique de la Patrie dont je suis Citoyen, je voudrais simplement me rappeler de la théorie de MACHIAVEL (Cf. Le Prince, Mille et une nuits, n° 223, 2002, p.94)* sur les trois types d’esprit : « ceux qui comprennent par eux-mêmes, ceux qui comprennent lorsque d’autres leur démontrent, et ceux enfin qui ne comprennent ni par eux-mêmes, ni par le secours d’autrui .»   

 

 

 

Arthur BENGA NDJEME : PARIS, le 27 Juillet de l’An 10, 13h00.  

 

Commentaires

africanostrAFRICANOSTRAa le 29-07-2010 à 14:51:25
TEL EST LE SENS DE L'INVITATION AU "DEBAT GABONAIS". IL FAUT L'OUVRIR., BIEN CHER H.
hacheco le 29-07-2010 à 13:51:43
Cher Arthur,

Je trouve ton analyse très constructive etlucide. En cela, la pensée de Machiavel nous invite véritablement à nous interroger sur sur les réelles visées politiques, je veux dire projets et lignes politiques de nos dirigeants. Car j'ai tant de mal à trouver la jointure entrde leur capacités intellectuelles dont je n'en doute pas et tant d'incohérences dans leur action. Dans tous les cas, merci de contribuer à iléclairer l'opinion sur les réalités de notre cher pays. . Je reste convaincu que tout changement véritable commence par une prise de conscience. L'esprit du Gabonais connaît un réveil sans précédentmanifesté par un besoin manifeste d'expression et de revendication sans crainte ...