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Comment la grande France peut-elle accepter de tuer impunément les Ivoiriens, au nom d’un candidat qui a prêté serment sur papier ?
Introduction
Pourquoi les Africains souffrent et meurent tant d'hypertension artérielle? Parce qu'ils subissent au quotidien, de l'intérieur comme de l'extérieur, la pression et l'oppression de la violence politique. La situation actuelle en Côte-d'Ivoire met bien les Peuples de ce continent sous tension. Ils sont au bord de la crise de nerf.En Côte-d'Ivoire, fierté d'Afrique et pays multiculturel, chacun de nous a, au moins, un parent, un ami ;si ce n'est une bonne partie de sa famille!
Les aspects interne et externe de cette tragédie qui se joue en Côte-d'Ivoire se dévoilent à nos yeux depuis l'éclatement de la crise post-électorale, qui met en scène deux "Saigneurs" de guerre: Koudou Gbagbo Laurent et Ouattara Alassane Dramane, dont les ambitions personnelles passent avant la vie des filles et fils de Côte-d'Ivoire.
Pièce essentielle de cette Histoire affreuse afro-européenne maculée du sang des innocents, la France, est partout pointée du doigt. En ma double qualité de citoyen d'Afrique et de petit-fils de citoyen français, la question qui me vient cette nuit à l'esprit est la suivante: "Comment la France, la grande France, peut-elle accepter de tuer impunément des Ivoiriens au nom d'un candidat qui a prêté serment sur papier?" Pour tenter de répondre à cette inquiétude, il me faudra, tour à tour, sonder l'idée de grande France (I), avant de me pencher sur la question du recomptage des voix, autorisé en Haïti et refusé à la Côte-d'Ivoire (II). Il me faudra tout autant déchiffrer, voire défricher la notion de "forces républicaines", à l'aune des milices en activité (III) en m'essayant, enfin, à une analyse prospective: la légitimité du Dr Alassane Dramane Ouattara ne va-t-elle pas s'effriter après cette barbarie innommable vécue en terre ivoirienne? (IV).
I)-Que véhicule encore cette idée de "grande France"?
D'abondantes et substantielles analyses ont mis en lumière les qualités et vertus que la France a prétendu répandre à travers le Monde , au terme d'une épopée philosophique et politique visant à "la placer à la tête des nations civilisées, l'élever assez haut, pour qu'elle soit le phare lumineux où tout ce qu'il y aura de grand viendra converger et d'où enfin doit partir le dernier acte de la civilisation" (A. FINET, Grandeur de la France par l'émancipation des travailleurs et la colonisation algérienne, Augustin Challamel, Paris, 1892, 63 p., p.1)*. Autrement dit, naviguer à vue dans un radeau d' "illusions dangereuses" (Emile de GIRARDIN, Grandeur ou décadence de la France, E. Plon, Paris, 1876, 768 p., préface, p.I)*.
Justement, le fameux Siècle "des Lumières" propage, par le truchement des droits de l'homme (lequel? puisque l'incomparissime Jules Ferry exclut les Noirs de cette "famille") et des libertés fondamentales intégrés dans nombre de Constitutions, est devenu une revendication universelle. La Côte-d'Ivoire fait partie de ces Etats qui épousent avec ferveur les valeurs médiates de la révolution française (alinéa 6 du Préambule de la Constitution, sur la Déclaration universelle de 1948, inspirée elle-même des valeurs proclamées par celle du 26 Août 1789)*, qui placent la dignité et les sûretés individuelles au-dessus de toute considération politique.
Au lendemain de sa cuisante défaite face à l'Allemagne nazie lors de la Seconde Guerre mondiale, la France se dote d'un ordonnancement constitutionnel consistant à respecter et à faire respecter les normes internationales. On en trouve l'ironique preuve à l'alinéa 14 du Préambule de la Constitution de la IVe République, en vigueur dans le bloc de constitutionnalité du 4 Octobre 1958 (alinéa 1er du Préambule)*: "La République française, fidèle à ses traditions, se conforme aux règles du droit international. Elle n'entreprendra aucune guerre dans des vues de conquête et n'emploiera jamais ses forces contre la liberté d'aucun peuple".L'Histoire juge aujourd'hui la vanité de cet engagement.
Bien sûr! on m'objectera la fumeuse résolution 1975 (2011) du 30 Mars 2011 où le Conseil de sécurité des Nations Unies, mettant la charrue après les boeufs mais bien après la saison de labourage (novembre 2010), "Condamne la décision de M. Laurent Gbagbo de ne pas accepter la solution politique globale proposée par le Groupe de haut niveau créé par l'Union africaine, et l'exhorte à se retirer immédiatement" (paragraphe 3)*. L'emploi de la force apparaît, dès lors, disproportionné par rapport aux objectifs mêmes de la résolution, l'application du Chapitre VII de la Charte, qui la sous-tend étant désormais étendue aux ingénieries complexes et diversifiées de gestion de sortie de crise.
Ambitieuse ou prétentieuse, la France s'est, depuis longtemps, présentée à l'Humanité comme garante, l'unique garante de ces valeurs de liberté et de souveraineté nationale, fondatrices du "droit des peuples à disposer d'eux-mêmes"; lesquelles valeurs servent de bouclier contre l'arbitraire et la violence du pouvoir, ainsi que l'absolutisme des régimes prédateurs.
On ne saurait donc remercier la France d'un côté, pour avoir forgé ces garanties au statut de l'Homme; et, d'un autre côté, la maudire pour les pourfendre aussi impunément dans des guerres orphelines et sans nom . En Afrique.
Que reste-t-il donc de cette fantaisiste idée de "grande France"?
On n'en peut retenir aujourd'hui que peu de chose:
Protéger l'Homme, en France (contre l'immigré, contre le terrorisme, contre l'islam) et massacrer l'Homme africain (en choisissant soigneusement les processus électoraux à "certifier" ou à "légitimer").
En somme, la France affirme frénétiquement sa dérive vers une puissance sans épithète!
Ainsi, pour un contentieux électoral, pour la contestation du résultat de l'élection présidentielle en Côte-d'Ivoire, la France accepte-t-elle de tuer impunément des Ivoiriens, par surcroît, en faveur d'un candidat "reconnu par la communauté internationale" et qui a prêté serment par une malheureuse lettre adressée au Conseil constitutionnel.
Comment cette (nouvelle!) blessure infligée par "la France de Sarkozy" à l'Afrique pourra-t-elle se refermer?
Comment le cri strident de cette (nouvelle!) effusion du sang de l'Afrique pourra-t-il être apaisé?
Comment peut-on, injustement, refuser à la Côte-d'Ivoire ce que cette prétendue communauté internationale reconnaît, aux mêmes instants, à d'autres Etats engagés dans les processus électoraux de nature similaire?
II)-La question du recomptage des voix: oui à Haïti, et non à la Côte d'Ivoire!
Le principe n'a pas été affirmé avec insistance, d'autant que les pièces avaient largement été manipulées et , surtout, que les textes officiels du processus électoral y donnent une assise difficile à cerner; mais les partisans du professeur Gbagbo avaient, un temps, annoncé l'idée d'un recomptage des voix, après la confuse délibération qui a suivi le second tour de l'élection présidentielle en Novembre 2010.
Certes, les textes prévoient les possibilités d'annulation du scrutin et de reprise de la consultation, mais cette idée de recomptage peut constituer un modus vivendi, pour "certifier" de manière définitive et souveraine, à travers une démarche politique et pacifique, le résultat final de l'élection présidentielle. Est-il besoin de rappeler que, entêté par la "communauté internationale", le clan du Dr Ouattara s'est fermement opposé à cette démarche? Entre temps, on sait parfaitement que, pour taire la réouverture de la "guerre civile", qui couve en Haïti, cette communauté dite "internationale" a permis à ce pays de procéder au recomptage des voix, entre les premier et second tours de l'élection présidentielle.
Même dans un certain pays appelé "Etats-Unis-d'Amérique", MM. Bush et Gore se sont soumis au principe d'un recomptage des voix, afin de faire définitivement émerger la vérité.Quelle est cette singularité du scrutin ivoirien, qui en fasse une consultation inscuptible de recomptage des suffrages exprimés; notamment, dans les circonscriptions dont les résultats sont manifestement problématiques? On perçoit, clairement, la savante organisation d'une guerre de vengeance, d'un règlement de comptes ourdis contre une certaine idée de l'Afrique et de son noble statut en tant qu'éclat originel de l'Humanité.
La preuve la plus éclatante de ce complot est donnée par un abus de langage, révélateur d'un parti-pris: le label de "forces républicaines" attribué par la diplomatie française aux milices en activité.
III)-De la notion de "forces républicaines" à l'aune des milices en activité
(à suivre)
Arthur BENGA NDJEME
Suite des commentaires de S. WAGNER
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C'est au Quattrocento que naissent les premières dissections humaines avec pour corollaire
l'avènement du dessin scientifique. A terme, ces autopsies ont notamment permis aux peintres et aux
sculpteurs de maîtriser la dynamique des mouvements ou de repérer les articulations et les veines afin de les
reproduire le plus fidèlement possible dans leurs ouvrages. Léonard de Vinci fut l'un des premiers à
manifester de l'intérêt pour cette nouvelle discipline et à reproduire le résultat de ses observations sur de
multiples planches anatomiques. Il affirmait d'ailleurs dans son Traité de la peinture que « c'est chose
nécessaire au peintre de savoir l'anatomie des nerfs, os, muscles et tendons pour savoir dans les divers
mouvements et effets quel muscle ou nerf est la cause de tels mouvements et faire ceux-là apparents et
grossis ». En outre, les artistes éprouvent un intérêt de plus en plus vif pour la représentation naturaliste de la
forme humaine si bien que les études sont directement réalisées sur le motif. Sur le document 1, il apparaît
nettement que l'artiste connaissait fort bien les sciences anatomiques. Les formes corporelles sont d'une part
bien proportionnées et on peut aisément déceler les côtes, la colonne vertébrale, la musculature et les
omoplates. En outre, si l'on compare l'esquisse et les détails mis en exergue dans l'étude de nu, il s'avère que
le dessinateur a volontairement supprimé les muscles pectoraux ce qui rend l'apparence du personnage plutôt
androgyne. Michel-Ange fait justement partie de ces artistes qui ont sciemment modifié ou inventé des
muscles dans un but d'expressivité, comme par exemple dans son David sculpté entre 1501 et 1504. L'une
des extensions musculaires de la main droite est en effet totalement imaginaire, l'objectif étant de lui conférer
une massivité plus importante. Il se peut donc très bien que l'artiste ait supprimé les pectoraux, dans le
document 1, pour des raisons artistiques et pour donner à son personnage un aspect plus réaliste.
En examinant le document 2, l'ambiguïté sexuelle est quant à elle rapidement levée. Le terme
« LIBICA » dont la traduction française est « LIBYQUE » renvoie à l'un de ces personnages féminins de la
mythologie gréco-romaine : les sibylles. Celles-ci sont des femmes devineresses ou versées dans la
divination. Elles n'étaient à l'origine probablement que des prêtresses, célèbres pour leurs oracles. Ces
derniers sont d'origine judéo-héllenistique et chrétienne si bien que les sibylles sont venues à être considérées
comme des prophétesses du Christ, à l'égal de leurs homologues de l'Ancien Testament. L'association de
sibylles et de prophètes dans les peintures murales ou les fresques est courante sous la Renaissance et en
constitue l'une des principales sources iconographiques. Leurs paroles censées annoncer la venue du Messie
renforçaient la conviction humaniste selon laquelle la vérité chrétienne serait un jour révélée aux « Gentils ».
Outre l'inscription précisée sur le cartouche, différents détails du document 2 indiquent qu'il s'agit bien d'une
sibylle. Son drapé de style antique, ses cheveux tressés, sa blondeur – symbole de pureté et de sainteté en
iconographie religieuse – ainsi que l'immense livre déposé sur l'autel confirment son statut de prophétesse.
Les traits corporels sont ici volontairement adoucis, la musculature n'est plus aussi visible que dans le
document 1 même si le corps reste herculéen. Deux artistes ont représenté des sibylles sur des fresques :
Michel-Ange en peignant la voûte de la Chapelle Sixtine du Vatican à Rome vers 1511 et Raphaël en l'église
de Santa Maria Della Pace de Rome la même année. Cette dernière avait pour titre Les Sibylles recevant les
instructions des anges. En comparant chacune de ces fresques avec l’œuvre du document 2, il semblerait que
cette dernière ait été plutôt peinte par Michel-Ange de part l'attitude sculpturale, énergique et extrêmement
puissante du personnage. De plus, les mouvements de torsion des sibylles sont nettement plus atténués dans
la fresque de Raphaël que dans celle de Michel-Ange.
D'autres éléments confirment l'hypothèse que ce dernier soit l'auteur de l’œuvre du document 2. La
morphologie sculpturale de la sibylle libyenne laisse penser en effet que l'artiste concevait ses personnages
en trois dimensions tel un sculpteur. Si l'on examine les deux documents de près, on peut ainsi noter que
l'artiste ne raisonne pas en surface mais en volume. Aussi, les rehauts de blanc dégagés par la tonalité du
papier sur le document 1 évoquent les reflets de la lumière sur une statue de marbre. De surcroît, les plis du
drapé sur le document 2 ressemblent étonnamment à celui porté par la Vierge Marie dans la Piéta de Michel-
Ange réalisée en 1498. Pour le créer, l'artiste a dû sans doute s'inspirer des somptueuses études de draperie
de Léonard de Vinci qui datent de 1470-1480 dans lesquelles l'effet tridimensionnel est stupéfiant et confère
aux drapés un relief satiné et soyeux. De plus, les torsions extrêmes du corps de la Sibylle et son apparence
très robuste évoquent plusieurs statues hellénistiques comme Le Groupe du Laocoon et le Torse du
Belvédère. Ces deux chefs-d'œuvre ont grandement fasciné Michel-Ange. A ses yeux, la représentation du
corps humain n'avait de sens que si elle prenait en considération le mouvement, source de vie à travers lequel
transparaissent les passions de l'âme dont l'ampleur est proportionnelle aux mouvements qui animent les
personnages. La sibylle, positionnée dans un mouvement de rotation serpentine et de tension extrêmes,
demeure toutefois impassible comme si les émotions exprimaient un enchaînement pesant de l'âme au corps
identique à celui de la Piéta (1498-1499).
(à suivre)
Sandra WAGNER
lafianceedusoleil le 09-04-2011 à 08:44:13 # (site)
bonjour,
félicitations pour la photo du jour.
Dommage, le noir sur le bleu, c'est difficile à lire.
Bon week end
Bisou
Cliquez ici pour voir mon image
ça se passe sous nos yeux; ne les détournez donc pas!
*Dites:
"NON A LA GUERRE EN COTE D'IVOIRE"!
*Ce gâchis de vies humaines sous-évaluées (car ne méritant pas la "protection" des armées étrangères) est une plaie ouverte au coeur de l'Humanité!
*Alors, dites: NON A CES DEUX "SAIGNEURS" DE GUERRE!
Arthur BENGA NDJEME
berrejl le 14-04-2011 à 20:56:56 # (site)
Tant que les dirigeants africains ne seront pas prêts à se sacrifier pour les populations de leur pays, ce sont les peuples qui seront sacrifiés pour eux!
Le document 1 paraît tout à fait représentatif des techniques employées par les artistes italiens de la
Renaissance. La réalisation de ce dessin à la sanguine en est justement l'exemple le plus frappant puisque ce
n'est qu'à partir de la fin du Xvème siècle que ce matériau est utilisé couramment pour lui seul. La sanguine
est une argile de teinte rouge orangée voire brun violacé. Son association avec un papier à grain épais et riche
en suggestions tactiles permet de nombreux jeux d'ombres et de lumières. On peut observer ainsi dans le
document 1 sur le nu très abouti que la lumière provient de la gauche, laissant ainsi apparaître la vigueur
musculaire du personnage au niveau du bras, des omoplates et du dos de la partie gauche du corps. Ce clair-
obscur est accentué par les effets d'estompe que l'on peut clairement déceler sur les épaules ou l'avant-bras
gauche. Il s'en dégage une relation particulièrement charnelle, quasi érotique, entre le spectateur et la jeune
femme représentée. En effet celle-ci ressemble à ces sculptures antiques étonnamment réalistes comme si
l'artiste avait désiré imiter la nature en rappelant la continuité tactile d'un bas-relief. Ce travail très recherché
se retrouve notamment dans l'une des études de Michel-Ange réalisées pour la Chapelle Sixtine : La
Création d'Adam (1508-1512). Dans ce dessin, le clair-obscur procuré par la sanguine devient pour l'artiste
un effet d'optique dont l'objectif consiste à distinguer le caractère naturaliste du corps de son essence
artistique en rapport avec la vision néo-platonicienne du monde : à savoir que l'homme est avant tout une
créature faite à l'image de Dieu et qu'elle doit en ce sens se définir par la beauté suprême et divine sur la
Terre. Le corps n'est plus alors seulement une masse biologique, il devient aussi un idéal conceptualisé. En
d'autres termes, le dessin devient un instrument au service de la beauté divine.
Aussi, grâce à ses propriétés terreuses, la sanguine se prête à de longs tracés fins ou épais selon les
besoins et peut ainsi servir à l'élaboration d'études partielles ou à l'exécution de croquis complets selon les
besoins de l'artiste. Ce dernier mémorise dès lors des points de tension et diversifie les différents points de
vue en ajoutant ça et là des ombres plus ramassées ou plus délayées sur certaines parties du corps afin
d'accentuer certains mouvements, effets de rotation et expressions d'un visage. On peut ainsi observer dans le
pli de la nuque et au niveau de la musculature de la partie droite du dos un renforcement des ombres. On note
également un étirement maximal des muscles de part et d'autre de la colonne vertébrale. La lumière éclaire la
face et la moitié gauche du corps et se reflète sur l'avant-bras droit, si bien que l'on devine une intense
rotation sur la gauche. Les deux tiers du dos sont en outre intentionnellement assombris et les contours
soulignent le modelé de l'ensemble des muscles. Dans un dessin à la sanguine de Michel-Ange intitulé La
Vierge à l'Enfant avec Saint Jean-Baptiste et probablement conçu vers 1503, la position de la Vierge est
étonnamment similaire à celle du personnage du document 2 ainsi que le drapé, le mouvement, les jeux
d'ombres et de lumières et l'apparence corporelle plutôt athlétique. Il est par conséquent fort probable que
l'artiste ait pu s'en inspirer. En revanche, le tracé du visage représenté sur l'esquisse inférieure gauche
demeure plus léger et plus souple et lui confère plus de douceur et de féminité. Cette expression tendre et
naturelle se retrouve dans Les études pour la Vierge du Duc d'Albe de Raphaël (1483-1520) réalisées vers
1509-1511 à la sanguine et à l'encre. La lumière semble provenir de la gauche comme dans le document 1.
Le clair-obscur est également obtenu par un enchevêtrement de traits horizontaux parallèles plus ou moins
resserrés au niveau de la joue droite du visage.
Ainsi l'usage de la sanguine peut être fort judicieux si l'artiste aspire à sophistiquer le modelé de son
personnage. Dans ce cas, il recourt à différents types de hachures qui, compte tenu de la teinte « chair » de la
sanguine et de sa consistance argileuse, donnent au corps un aspect morphologique plus naturel. Qu'elles
soient verticales, horizontales, curvilignes, en diagonale, resserrées, larges, espacées ou en parallèle, ces
stries octroient plus de relief et de vitalité. Dans le document 1, on peut noter par exemple la présence de
traits tantôt épais, longs et horizontaux tantôt plus fins, courts et en diagonale au niveau des muscles sterno-
cléido-mastoïdiens, du poignet gauche, des trapèzes de l'épaule droite ainsi qu'à l'avant-bras droit. S'ajoute
également une alternance de traits verticaux au niveau des pommettes, de courbes dans le rendu volumique
des omoplates et des biceps et enfin de parallèles au niveau de la mâchoire, des cheveux et des muscles
fessiers. Le papier légèrement teinté favorise une association de dégradés très aériens qui mettent en
évidence les principales articulations des membres supérieurs et des mains. Instigateur du recours à la
sanguine, Léonard de Vinci l'emploie souvent pour échafauder un modelé détaillé dans certains de ses
portraits. Ainsi dans sa Tête d'homme âgé produite vers 1503, l'ajout de traits plus épais et de hachures
particulièrement prononcées au niveau des pommettes, des yeux et du cou renforcent la dureté du visage et
lui confèrent une remarquable rudesse. Cette perpétuelle recherche de vérité dans le travail du modelé a
inspiré de nombreux artistes tels Michel-Ange. Dans son Étude de nu au dessus de la Sibylle perse de la
Chapelle Sixtine (1510),il utilise un ensemble de hachures plutôt claires sur la face arrière du bras gauche
auxquelles s'ajoute un mélange de traits très resserrés sur les muscles dorsaux plus ou moins fondus grâce à
de multiples frottis réalisés avec les doigts. Michel-Ange a également souligné les effets de lumières grâce de
voluptueux dégradés de clair-obscur obtenus en fonçant davantage certaines parties du corps comme les
jambes, les genoux et les pieds. Ces effets se retrouvent pareillement dans le document 1 et la pose du
personnage est tout aussi audacieuse et énergique que dans l'étude de Michel-Ange citée ci-dessus. De
surcroît, le corps est doté d'une sensualité débordante en raison de l'ondoiement de la lumière. La technique
du chiaroscuro ou dégradé mêle en effet zones claires et sombres en créant des contrastes très violents.
Chaque partie du modelé devient alors caresse et les formes prennent chair.
Par son rendu velouté et ses effets de lumières, la sanguine bouleverse littéralement les pratiques des
artistes et révolutionne la vision de la figure humaine. Dans une Italie bercée par la Renaissance, l'homme est
au cœur de tous les préceptes humanistes. Créé à l'image de Dieu, il domine non seulement la nature, mais il
est aussi doué d'intelligence et se doit de la perfectionner pour se rapprocher le plus possible de son Créateur.
Aussi, la redécouverte des statues antiques et des canons esthétiques gréco-romains a suscité une vive
curiosité pour la représentation du corps humain et du mouvement via l'anatomie.
(à suivre)
Sandra WAGNER
Si les plus grands peintres sont admirés à travers le monde pour leurs chefs-d'œuvre, ceux-ci
n'apportent en réalité que très peu d'indices sur la facture ou le style contrairement à leurs dessins. Gorgio
Vasari soulignait lui-même dès le XVIe siècle que « le dessin [était] le père de tous les arts ». Utilisé comme
outil de travail il permit aux artistes de se former et d'échafauder une multitude de projets. Devenu
progressivement un élément de collection à part entière pour les amateurs ou les musées, le dessin révèle
ainsi l'évolution d'une œuvre d'art et dévoile à travers de riches détails les caractéristiques essentielles d'un
mouvement artistique ou la « touche » d'un artiste.
La multiplication des fresques nécessitant de nombreuses études préparatoires entre la fin du XVe et
le début du XVIe siècle explique que le dessin acquiert alors un rôle capital en Italie. Devenue Technique à
part entière, la sanguine se diffuse progressivement parmi les artistes et répond aux préoccupations
humanistes des maîtres de la Renaissance. Composée d'argile, d'oxyde de fer et d'hématite, elle permet
effectivement un travail du corps humain plus élaboré grâce à de subtils contrastes et d'habiles effets
volumiques comme le montre le document 1. Sur celui-ci est représentée une étude très aboutie d'un corps de
femme vu de dos ainsi que des études partielles du visage, de la main gauche, du pied droit et de la position
des orteils du pied droit. La signature située en bas à gauche nous laisse penser qu'il pourrait peut-être s'agir
d'un dessin exécuté par Michel-Ange Buonarroti. On aperçoit également une rapide esquisse de la partie
supérieure de ce corps superposée à celle du visage. Ce dessin est vraisemblablement destiné à la réalisation
d'une fresque comme en témoigne le document 2 qui semble être la version finale de l'œuvre. Assise sur un
trône dans une posture digne de celle d'un contorsionniste, une femme est revêtue d'un somptueux drapé aux
couleurs lumineuses et harmonieuses. Celle-ci porte un imposant livre. Sa carrure athlétique et musclée est
subrepticement valorisée à travers un étonnant clair-obscur au niveau de la partie droite du corps et du drapé.
Elle est également entourée de deux petits garçons assis sur un escalier et dont celui qui est à sa droite pointe
l'un de ses doigts dans sa direction. Celle-ci se meut par ailleurs sur une surface architecturale antique en
trompe-l'œil où s'agitent sur chacun des deux pilastres deux putti ou statues d'enfants joufflus et moqueurs.
Au-dessous du piédestal, on devine un cartouche sur lequel est inscrit le mot « LIBICA ». L'espace quant à
lui est délimité de part et d'autre par deux pendentifs triangulaires curvilignes.
Si le culte du corps et des canons esthétiques de l'Antiquité gréco-romaine sont a priori au cœur des
préoccupations de l'artiste, quels sont les autres critères capables de montrer l'appartenance de ces deux
ouvrages à l'époque de la Haute-Renaissance ? Par ailleurs, dans quelle mesure la technique de la sanguine
va-t-elle révolutionner la vision artistique du corps humain ? De quelle manière ces deux documents
traduisent-ils la transition entre le courant Haute-Renaissance et le style maniériste de la première moitié du
XVIe siècle ? Pour répondre à ces questions, nous évoquerons dans une première partie les principaux
apports de l'utilisation de la sanguine, puis nous tenterons de démontrer en quoi l'étude préparatoire répond à
une représentation idéalisée de l'homme sous la Renaissance. Enfin nous essaierons de déterminer les
attributs précurseurs du maniérisme de cet élément de la fresque.
(à suivre)
Sandra WAGNER
Commentaires
Galate2 le 09-04-2011 à 11:16:13 # (site)
Je vous en prie : dites "gouvernement français". Nous ne sommes pas forcément solidaires de ce qu'il fait.