La Nation

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posté le 31-07-2010 à 23:47:36 GMT +2

Des hommes lisses, où rien n'adhère

 

 

POUR LUTTER CONTRE LE SYNDROME DU "CHIC TYPE" OU DE L'HONNETE-HOMME

 

 

"Parmi les stratégies proposées et détaillées:

s'affirmer, apprendre à déplaire et à décevoir,

ne plus redouter les conflits..."

 

Christophe ANDRE,

Préface à Trop gentil pour être heureux,

Payot & Rivages, p.13

 

 

***

 

A la fin d'un mois de Juin particulièrement fécond pour notre site, je n'ai pu vous faire part de ma "lecture du mois". Pourtant, l'ouvrage était bel et bien lu. Mais j'ai pensé choisir patiemment l'angle d'attaque, tant le livre en question est dense et riche d'enseignements. Ceci signifie que ce qui fera l'objet du présent exposé, en cette fin Juillet 2010, annonce d'autres réflexions inhérentes à un mal, un complexe, un étonnant mode de vie qu'un chercheur et praticien américain appelle "le syndrome du chic type" (Robert A. GLOVER, Trop gentil pour être heureux ( Le syndrome du chic type), Payot & Rivages, Paris, 2004, 237 p.)*. Il en résume ainsi l'une des caractéristiques à la page 73 de son ouvrage:

 

"Les êtres humains communiquent. En cachant son humanité et en essayant de projeter l'image de la perfection, on devient flou, anguille sans vie et sans intérêt. Je qualifie souvent les chics types d'hommes téflon. Ils se donnent tellement de mal pour paraître lisses que plus rien n'adhère."

 

Donc, selon le Dr GLOVER, l'amour qu'une femme peut éprouver pour un homme, l'obéissance que les enfants doivent à leur père, le respect que des employés ont à l'endroit du patron, les devoirs d'un peuple envers le Souverain ne dépendent en aucun cas des défauts, maladresses et autres vices des personnes intéressées. Bien au contraire. Ces traits de caractère, ces apparentes imperfections ou, simplement notre "humanité", agissent comme des aimants qui attirent à soi d'autres individus cherchant à nous découvrir, à nous éprouver, à nous soutenir et à nous aimer. A preuve, Roosevelt et Churchill avaient un mode de vie plus dissolu que Staline et Hitler. Pourtant, ces derniers ont commis les pires attrocités que l'humanité n'ait jamais connues.

 

Aussi, l'auteur préconise-t-il un certain nombre d'exercices pratiques à l'usage de tous ceux qui auraient l'impression d'avoir de tout temps été considérés comme lâches, indécis, naïfs, influençables. Bref, sans personnalité. Il s'agit de conclusions discutables, certes. Et, je me ferai un plaisir d'en attaquer quelques thèses dans les semaines à venir. Mais ce qu'il importe de souligner, ici, c'est un triptyque de comportements que les enseignements des psychologues et psychiatres présentent comme nuisibles à notre épanouissement personnel et à notre énergie vitale. Le grand maître de la chanson gabonaise, Hilarion Nguéma l'a chanté en des termes moins policés: "Trop bon, trop con"!

 

A ce sujet, GLOVER appelle les hommes soucieux de manifester ou redynamiser  leur estime de soi, à exprimer leur masculinité (I). Un homme est, avant tout, un être fort, rustre et spontané. Ensuite, le brillant thérapeute prescrit d'explorer ou redécouvrir le pouvoir du NON (II). Ces deux éléments constitueraient le préalable indispensable à la conquête de la force intérieure (III).

 

 

I-EXPRIMER SA MASCULINITE

La première caractéristique du "chic type" ou de l'honnête homme, c'est qu'il ne "veut pas faire de vague". Il fuit, comme la peste,  l'esclandre et le scandale (qui désigne en grec: le vilain "petit caillou dans la chaussure"). Aussi, se refuse-t-il à user de violence pour régler ses problèmes ou communiquer. La conséquence est immédiate, car ce type d'homme est généralement considéré comme un spécimen de la très sérieuse confrérie des femmelettes ou carrément une "femme" (mwéito), comme on le dirait dans une langue bantoue.

 

Le rejet des actes d'un père violent, sermonneur, inconstant dont la figure tutélaire risque d'influer négativement sur un fils est à la base d'une "féminisation" de l'éducation des jeunes garçons. A cela s'ajoute l'essor des familles monoparentales, que d'aucuns qualifieraient de "matriarcales", car l'éducation des jeunes gens n'est plus, comme au temps du scoutisme et de la guerre, considérée en tant que mode d'intégration des garçons dans la "case des hommes", autrefois assurée par des "maîtres" et des précepteurs.

 

Nous verrons dans des exposés ultérieurs si ces accusations sont vérifiées. Mais, pour l'heure, il importe de noter que certains d'entre nous se reconnaissent dans ce profil, même si les motivations des uns et des autres diffèrent quant à cette attitude ou ce caractère. Aussi, pour arriver à vaincre ce comportement auquel les experts attribuent le rejet et les échecs de ce type d'homme en amour, au travail et au sein des cercles d'amis, GLOVER recommande aux intéressés d'exprimer leur "masculinité". Il s'agit, grosso modo, de cette force de caractère qui consiste à vivre exactement comme bon nous semble; sans se soucier du regard extérieur, des appréhensions de l'entourage, voire de notre partenaire ou nos amis.

 

Comprende notre femme sans l'écouter. Se donner à sa tâche sans obséquiosité. S'excuser le moins possible. Eviter dans son langage parlé et écrit les mots tels que "sentiments" ou "impression" et "envie", pour les remplacer par d'autres, exprimant la puissance et la domination: "je veux"!

 

C'est pourquoi, l'auteur préconise à ses lecteurs/patients d'intégrer (s'ils sont solitaires) des cercles et activités d'hommes (clubs de sport, d'échecs; sorties au bar,  à la pêche, à la chasse; la guerre) pour apprendre ou renforcer leur "masculinité". Car ce caractère, semble-t-il, ne s'improvise pas. Ceci signifie qu'il leur faut être "doux" sans le proclamer ou par accident, lorsque la situation le nécessite; voire par stratégie, lorsque le brute prend le pas sur le romantique. Alors, cet individu "doit renouer avec les hommes, devenir fort, trouver des modèles masculins sains, réfléchir à la relation qu'il a eue avec son père"(p.136)*. Vivre en vase clos, en recherchant l'approbation des femmes est le moyen le plus sûr d'opérer une rupture dans les veines de sa propre "masculinité".

 

La leçon qui résulte de cette rubrique est toute simple: les femmes n'aiment pas les hommes faibles. Je pense qu'il en est certainement de même des Nations. Les gouvernants conciliants leur paraissent suspects et sans densité. Même Jésus-Christ, le roi de la Douceur, n'a pas manqué d'être violent à l'encontre des marchands qui occupèrent sauvagement le Temple à Jérusalem (Jean, 2, 14-15; Matthieu: 21, 12-17)*. C'est ici qu'apparaît le pouvoir du NON.

 

 

II-EXPLORER OU REDECOUVRIR LE POUVOIR DU NON

Au même titre que la perte ou l'absence de "masculinité", si ce n'est une conséquence de leur faiblesse, les "chics types" ne savent pas dire NON. Ce sont, non plus des serviles et des gentils. Mais des paillassons sur lequels tout le monde s'essuie... les pieds. Les synonymes qui les caractérisent sont aussi nombreux qu'évocateurs de leur pitoyable état: "sous-fifres", "têtes de turc", "bouc-émissaires", "souffre-douleurs", "riz-pain-sel" ou "mauviettes".

 

Ces hommes attirent particulièrement les femmes manipulatrices et dominatrices; celles qui sont en quête d'assurance sur leur capacité à séduire; les femmes fatales; les femmes qui sont plongées dans des problèmes jusqu'au cou (endettement, état dépressif, addiction à la drogue, à l'infidélité, à la prostitution...) En un mot, ils attirent des problèmes et des ennuis, du fait de leur absence de réactivité aux éventualités que la vie fait subir à chaque être au quotidien. Ils sont des sortes de "champs d'expérimentation" des desseins malveillants de tous  ceux qui ont quelque chose à tester en eux-mêmes ou en dehors.

 

Le remède que préconise GLOVER est clair et net. Savoir et pourvoir dire: NON. Non, je n'irai pas au parc aujourd'hui. Non, je ne viens pas me coucher. Non, je ne mangerai pas de cette soupe insipide. Non, j'arrête tout et je me retire de cette relation infructueuse et sans issue. Car dans la vie, chacun est toujours à la recherche de plus faible que soi. De "plus con" que soi. Eviter soigneusement d'être celui-là! Au sein du couple, le thérapeute appelle cette dynamique par un encouragement: "poser des limites".

 

Ainsi, assure-t-il: "Quand un chic type met des limites à sa partenaire, elle en retire un sentiment de sécurité. En général, les femmes qui se sentent rassurées se sentent aimées. Elles en viennent également à se dire que si leur partenaire est prêt à leur tenir tête, il le sera aussi, le cas échéant, vis-à-vis d'autres personnes pour leur couple. Par ailleurs, les limites génèrent le respect" (p.164). Car, prévient-il, lorsqu'un homme "est incapable de fixer des bornes, il laisse entendre à sa compagne qu'il n'a pas beaucoup de respect pour lui-même. En ce cas, comment s'attendre à ce qu'elle en ait?" (p.164 à 165)*. Ce n'est pas une question; c'est de l'exorcisme!

 

Il serait peut-être difficile à un "béni oui-oui" de dire NON de suite. Mais il faut, progressivement, adopter une opposition de principe. Même pour éprouver sa propre disposition à s'estimer, à s'aimer, à se protéger. Une fois cette aptitude acquise, une fois sa "masculinité" recouvrée, il devient plus loisible de conquérir la qualité qui manque le plus à l'honnête-homme ou au "chic type": la force intérieure.

 

III-A LA CONQUETE DE LA FORCE INTERIEURE

Au terme de l'observation des spécialistes, le "chic type" est un malade de l'estime de soi. Il manque d'assurance et de densité. On le dit souvent "sans maturité". Un zéro en nombre! Alors, son seul salut dépend d'une descente, non pas aux enfers. Mais dans son for (t) intérieur, dans son puits intime afin d'y trouver la force nécessaire à son épanouissement.

 

Alors, finie la recherche systématique de l'approbation des femmes ou toute autre personne quant à ses propres initiatives. Fini le "qu'en-dira-t-on". Finies la crainte de blesser, de contrarier et la recherche permanente de plaire. Il leur faut, désormais, être eux-mêmes. Avec les défauts (et surtout les défauts) et les qualités qui vont avec l" être humain", et ETRE dans ses deux sens de créature et verbe. C'est à cet égard, que GLOVER définit lui-même la force intérieure en tant qu' "état d'esprit qui habite celui qui est sûr de sa capacité à faire face aux événements. Il ne se contente pas de venir à bout des problèmes, difficultés et épreuves, mais accueille l'adversité, l'affronte et s'en félicite. La force intérieure n'est pas absence de peur: même les plus forts ont peur. Elle est le pouvoir personnel qui anime celui qui a ressenti la peur mais ne s'y est pas abandonné" (p.110)*. Cela implique de la cultiver par des exercices quotidiens que la vie offre à tous ceux qui osent se confronter aux autres: amis, parents, collègues ou même employeurs.

 

Tels sont les trois points (impérieuse masculinité, puissance de la résistance et de l"opposition et force intérieure) qu'il m'a paru essentiel de voir avec vous, en tant que leçons à retenir de l'ouvrage de Robert A. GLOVER sur le syndrome du chic type; ouvrage traduit de l'anglais des Etats-Unis par Clémence MA, avec une excellente préface du Dr Christophe ANDRE. L'illustration de la couverture, où un sourire d'homme est exposé à une souricière évoque, sans ambiguïté, les dangers de la gentillesse en ces temps d'égocentrisme, d'individualisme et de défiance renaissants.

 

 

***

En vous remerciant pour vos encouragements tout au long de ce mois de Juillet, quelque peu difficile pour notre productivité sur le Site, je voudrais simplement rappeler à ceux qui se retrouveraient dans la peau du "chic type" qu'il ne s'agit pas d'une maladie honteuse. Mais d'une (dé) formation remontant à l'enfance, à l'éducation primaire, à l'environnement ou à la profession exercée. Cette maladie affective, comme tous les faits de l'homme, ne peut être traitée et soignée qu'à travers et avec les hommes. S'ouvrir aux autres, se donner des défis, se donner une chance en tout et faire des échecs des sources d'enseignements. Car le syndrome de l'honnête-homme n'est pas une maladie mortelle et handicapante. Souvenons-nous de Mao ZEDONG, qui disait dans son Petit Livre Rouge:

 

"L'échec est mère de réussite; et chaque échec nous rend plus avisés".

 

 

Arthur BENGA NDJEME: Nancy, le 31 Juillet de l'An 10; 23h 46

 

 

 

 

 


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posté le 31-07-2010 à 13:01:18 GMT +2

NECROLOGIE

La Diaspora gabonaise de France exprime son profond regret et son indéfectible solidarité à la famille de :

 

 

 

 M. ITOUKOU MOKAMBI Henri,

ancien Conseiller économique à  l'Ambassade/ Haute représentation du GABON en France

 

Décédé à Evreux

 

 

Ce vendredi 30 Juillet 2010.

 


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posté le 29-07-2010 à 23:43:34 GMT +2

LES "SAIGNEURS" DE LA GUERRE

 

 

LA GUERRE SE PRIVATISE

 

 

 

 

***

 

Les garanties constitutionnelles sur la déclaration de guerre* dérivent d'une pratique historique servant d'ailleurs de fondement à l'apparition de l'Etat: le droit de (faire) la guerre. GROTIUS l'a élevé au rang de doctrine et de principe du Droit des gens à travers l'expression de "Jus ad bellum". Or, les théâtres d'opérations contemporains: Afghanistan, Iraq, Bosnie, Congo, Darfour; et même de simples situations de maintien de l'ordre comme des émeutes au GABON, mettent en scène le recours des instances dirigeantes aux mercenaires. Alors, si l'Organisation des Nations Unies et ses Membres font aussi souvent appel à des compagnies privées pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales, puis pour le maintien de l'ordre public national, l'observateur y perçoit une migration du "droit de la guerre" de la scène publique à la sphère privée.

 

La question est si préoccupante au moment où fleurissent les indépendances africaines, que l'OUA s'emploie à en juguler le phénomène. Tel est l'objet de la Convention de Libreville (GABON) du 3 Juillet 1977, qui prescrit en son article 6 les obligations particulières des Etats dans l'essor du mercenariat. A cet égard, tout Etat prend l'engagement d' "empêcher que ses nationaux ou des étrangers se trouvant sur son territoire commettent l'une des infractions prévues à l'article premier de la présente convention" (alinéa a)*. Ledit article dispose, notamment, qu'est mercenaire une personne "qui est spécialement recrutée dans le pays ou à l'étranger pour combatre dans un conflit armé" (alinéa a); ou "qui en fait prend une part directe aux hostilités" (alinéa b) et "n'est pas membre des forces armées d'une Partie au conflit" (alinéa e).

 

Or, malgré cet instrument, entré en vigueur en 1985 et d'autres normes conclues sous les auspices des Nations Unies, "le secteur privé est appelé à jouer un rôle croissant dans la conduite de la guerre" (Tim SPICER, Entretien avec Amir TAHERI: "Privatiser la guerre", Politique Internationale n° 94, p.254)*. En effet, même les puissants parmi les puissants, "les pays membre de l'Otan, la principale alliance militaire du globle, sont de plus en plus réticents à engager des troupes régulières dans le cadre des missions de maintien ou d'imposition de la paix sur des terrains où la théorie du 'zéro mort' est difficilement applicable" (Philippe CHAPLEAU et François MISSER, "Le retour des mercenaires", Politique internationale n° 94, p.223)*. Protection des travailleurs humanitaires, des édifices publics au sein des Etats et des personnalités publiques sur la scène internationale; tels sont les principaux domaines où intervient cette forme de privatisation de la guerre.

 

Les deux derniers auteurs précités notent, en dehors de toute situation de conflit armé ou de crise majeure, qu' "Au GABON, par exemple, la Garde présidentielle (Sic), équipée de blindés légers, recrute dans les rangs de la Société gabonaise de service (SGS), une compagnie de gardiennage locale" (CHAPLEAU et MISSER, Op. cit., p.234)*. Ce qui démontre l'essor inquiétant de la menace des institutions et des principes de justice, car un mercenaire, quoi qu'en disent les instruments normatifs, est un hors-la-loi. MAis, d'un autre côté, on se rend bien compte que le mercenariat offre des métiers de substitution et des contrats précaires, qui permettent à de nombreux hommes de nourrir leurs familles.

 

Sous l'effet conjugué des crises financière, économique et morale renaissantes, comment faut-il alors s'y prendre, pour éradiquer ce phénomène intimement lié à la paupérisation concertée des Nations?

 

 

 

Arthur BENGA NDJEME: PARIS, le 29 Juillet  de l'An 10, 23h 26

 

 

 

 

 


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posté le 28-07-2010 à 10:01:20 GMT +2

QU'EST-CE DONC QU'UNE NATION?

 

 

 

 

"Une nation est une âme, un principe spirituel. Deux choses qui, à vrai dire, n'en font qu'une, constituent cette âme, ce principe spirituel. L'une est dans le passé, l'autre dans le présent. L'une est la possession en commun d'un riche legs de souvenirs; l'autre est le consentement actuel, le désir de vivre ensemble, la volonté de continuer à faire valoir l'héritage qu'on a reçu indivis. L'homme [...] ne s'improvise pas."

 

 

 

 

Ernest RENAN, Qu'est-ce qu'une nation?

Introduction par Roland Breton,

Le mot et le reste, Collection "Attitudes",

Marseille, 2007, p.33

 


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thizi  le 30-07-2010 à 21:02:43  #

enfin!!

 
 
posté le 27-07-2010 à 13:16:30 GMT +2

DES INTITULES DES MINISTERES AU GABON

  
DU REMANIEMENT MINISTERIEL DU 16 JUILLET AU GABON.
Quel sens donné aux intitulés des ministères au sein du gouvernement et quelle crédibilité leur accorder ?

 

 

 

 

 

 

***

L’une des raisons pour laquelle le reste du monde perçoit les Africains comme des extra-terrestres, c’est l’absence d’évaluation de leurs propres actes ; surtout, lorsque ceux-ci sont posés sur la scène publique. Vous me direz, sans doute, que le sujet qui m’amène à vous ce jour est insignifiant. Mais, il appert d’une vieille sagesse africaine, mise en relief par Hampâté Bâ, qu’« il n’y a pas de petite querelle » (Hélène Heckmann, chez Pocket, 2006, 156 p.)*.

 

Le fait ou l’acte à restituer est rendu public en mi-Juillet 2010. Par communiqué officiel, la présidence de la République gabonaise décide un geste pudiquement appelé : « remaniement ministériel technique » ; lequel soustrait au « ministre des Eaux et Forêts » l’une de ces rallonges et encombrements savamment appelés « portefeuilles », pour le confier au « ministre de l’habitat, du logement et de l’urbanisme ». Ainsi, ce dernier est désormais cumulard de la charge de « l’Environnement et du Développement durable ».

 

Ce fait ou cet acte, qui apparaît isolé et anodin est caractéristique du méli-mélo qui règne depuis des décennies au sein du gouvernement gabonais quant aux intitulés des ministères. Quel est le sens donné à ces ministères et quelle crédibilité faut-il leur accorder ?

 

Cette question m’amène à sortir de mes documents un vieux projet en trois points, que le récent remaniement ministériel remet au goût du jour : accuser d’incohérence le découpage des départements ministériels (I), faire observer la redondance de certains ministères (II) et questionner le maintien des administrations anachroniques (III). 

 

 

I-Accuser d’incohérence le découpage des départements ministériels

Quelques cas illustrent parfaitement l’incohérence qui existe entre nombre de départements ministériels au GABON. Je trouve, d’une part, incongru le fait de séparer les « Eaux et forêts » des charges « de l’Environnement et du Développement durable ». D’autant plus que les confier au « ministre de l’Habitat, du logement et de l’urbanisme » peut laisser croire que seules la construction des maisons et la conception des plans d’aménagement urbain mobilisent les thématiques écologiques. Le titulaire de ce poste, ailleurs, travaille, en réalité, en concertation avec le responsable des nouvelles énergies.

 

D’autre part, créer de manière autonome un « ministère de l’Agriculture, de l’Elevage, de la Pêche et du Développement rural », c’est appauvrir les Eaux et Forêts, car toutes ces activités sont interconnectées. Quels espaces sollicite-t-on pour cultiver, élever et pêcher, sinon les eaux et forêts ?

 

Par ailleurs, on se demande avec insistance ce que « la Décentralisation » peut bien faire dans le département « de l’Intérieur, de la Sécurité publique, de l’Immigration ». Outre le fait d’avoir concentré les départements « de l’Education nationale, de l’Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et de l’Innovation », le Gouvernement accroît l’incohérence de ses découpages en séparant « l’Enseignement technique » du reste des départements dédiés à l’Ecole.

 

De même, le sens donné au mot « Loisirs » laisse à désirer car ceux-ci vont de pair avec l’industrie du tourisme et non avec la Culture, la Jeunesse et les Sports. Outre l’absence de logique manifeste entre divers intitulés ministériels, la question de la redondance pose également problème. 

 

 

II-Faire observer la redondance de certains ministères

A l’incohérence s’adjoint la redondance. Le cas de trois (3) départements est particulièrement symptomatique de cette débauche d’énergie. Le Gouvernement s’emploie à trouver une différence de fond et de forme entre le « ministère des mines, du pétrole et des hydrocarbures » ; le « ministère de l’énergie et des ressources hydrauliques » puis le « ministère des eaux et forêts » désormais délesté de « l’environnement et du développement durable ».

 

A titre de comparaison avec la France, dont les institutions inspirent notablement celles du GABON, on observe que toutes ces fonctions sont confiées à un seul individu : le « ministre d’Etat, ministre de l’Ecologie, de l’Energie, du Développement durable et de la Mer, en charge des Technologies vertes et des Négociations sur le climat ». Ceci permet de faire des économies substantielles sur le train de vie de l’Etat à travers une réduction significative du nombre des membres du Gouvernement, et de ne pas multiplier, sans intérêt majeur des postes ministériels qui sont clairement redondants.

 

Enfin, je me suis promis de voir rapidement le problème d’intitulés de ministères, qui ne devraient plus exister, puisque franchement anachroniques. 

 

 

III-Questionner le maintien des administrations anachroniques

La décision de remanier le Gouvernement de manière technique en enrichissant un poste au détriment d’un autre est certainement un acte propitiatoire d’un événement révolutionnaire : l’abolition d’administrations dépassées. Je serais donc le premier à applaudir la disparition de ce « ministère des Eaux et Forêts », anachronisme du régime colonial, dont le seul intérêt était de doter les territoires exploités d’une administration chargée d’enregistrer et de collecter des richesses de la forêt et des eaux.

 

De la même manière, l’idée d’un « ministère de l’habitat, du logement et de l’urbanisme » me paraît inconciliable avec les ambitions d’un Pays émergent. Il s’agit-là de départements animés par des techniciens au sein des ministères chargés de l’Equipement et de l’Aménagement du territoire. Lorsqu’on veut construire, on ne le proclame point. Sinon, le très puissant ministère de l’Agriculture aurait déjà, du fait de son intitulé, permis au GABON d’atteindre l’autosuffisance alimentaire depuis un demi-siècle ! 

 

 

 

***

Ministère est un mot d’origine latine (ministerium), dérivé de minister ou « serviteur » (Gérard CORNU, Vocabulaire juridique, 6e édition, Association Henri Capitant, PUF/Quadrige, p.579)*. Le fait de confier à ce « domestique » (Idem, p. 580)* du Gouvernement des tâches incohérentes, redondantes, anachroniques ou trop encombrantes, déteint fatalement sur l’opérationnalité de son « service ». De flamboyants esprits ont démontré depuis des siècles l’intérêt, pour le Souverain, de s’appuyer sur des secrétaires efficaces et à qui sont confiées des responsabilités précises dans le cadre de leur mission. Les intitulés des ministères ne sont donc pas neutres. N’ayant pas le pouvoir d’influer sur le cours de la vie politique de la Patrie dont je suis Citoyen, je voudrais simplement me rappeler de la théorie de MACHIAVEL (Cf. Le Prince, Mille et une nuits, n° 223, 2002, p.94)* sur les trois types d’esprit : « ceux qui comprennent par eux-mêmes, ceux qui comprennent lorsque d’autres leur démontrent, et ceux enfin qui ne comprennent ni par eux-mêmes, ni par le secours d’autrui .»   

 

 

 

Arthur BENGA NDJEME : PARIS, le 27 Juillet de l’An 10, 13h00.  

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africanostrAFRICANOSTRAa  le 29-07-2010 à 14:51:25  #   (site)

TEL EST LE SENS DE L'INVITATION AU "DEBAT GABONAIS". IL FAUT L'OUVRIR., BIEN CHER H.

hacheco  le 29-07-2010 à 13:51:43  #

Cher Arthur,
Je trouve ton analyse très constructive etlucide. En cela, la pensée de Machiavel nous invite véritablement à nous interroger sur sur les réelles visées politiques, je veux dire projets et lignes politiques de nos dirigeants. Car j'ai tant de mal à trouver la jointure entrde leur capacités intellectuelles dont je n'en doute pas et tant d'incohérences dans leur action. Dans tous les cas, merci de contribuer à iléclairer l'opinion sur les réalités de notre cher pays. . Je reste convaincu que tout changement véritable commence par une prise de conscience. L'esprit du Gabonais connaît un réveil sans précédentmanifesté par un besoin manifeste d'expression et de revendication sans crainte ...

 
 
 

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