La Nation

Droit+Politique+Economie+Environnement

posté le 03-05-2010 à 23:47:59 GMT +2

BLANCHES COLLINES

 

 

 

Cuerpo de mujer, blancas colinas, muslos blancos,

Te pareces al mundo en tu actitud de entrega.

Mi cuerpo de labriego salvaje te socava

y hace saltar el hijo del fundo de la tierra. 



Fui solo com un túnel. De mi huían los pájaros,

y en mí la noche entraba su invasión poderosa.

Para sobrevivirme te forjé como un arma,

como una flecha en mi arco, como une piedra en mí

honda. 



Pero cae la hora de la venganza, y te amo.

Cuerpo de piel, de musgo, de leche ávida y firme.



Ah los vasos del pecho ! Ah los ojos de ausencia!

Ah las rosas del pubis!Ah tu voz lenta y triste ! 



Cuerpo de mujer mía, persistiré en tu gracia.

Mi sed, mi ansia sin límite, mi camino indeciso !

Oscuros cauces donde la sed eterna sigue,

y la fatiga sigue, y el dolor infinito.   

 

 

 

Pablo NERUDA, Vingt poèmes d’amour et une chanson désespérée, Gallimard, Op. cit., p.9 à 10

 

 

***

 

 

 

 

 

Chair de femme, collines enneigées, cuisses de meringue,

figée comme un désert de glace.

Mon corps farouche de laboureur t’évide

pour t’extirper un fils du fond de la terre.  



 

Je me retrouvai seul comme un boyau. Les oiseaux chahutant,

La nuit m’envahit de sa puissante étreinte.

Pour survivre, je t’ai forgée comme une lame,

comme une flèche pour mon arc, comme une pierre

pour ma fronde. 



 

Et l’heure de la vengeance tombe à pic, quand je t’aime.

Corps de velours, de crème, de lait concentré sucré. 



 

Ô vases du corsage ! Ô regard nébuleux !

Ô roses du Mont de Vénus ! Ô voix mélancolique et triste ! 



 

Ma voluptueuse femme, je m’abandonne à ta grâce.

Toi ma soif, toi mon fantasme absolu, toi mon chemin qui ne mènes nulle part !

Lits de rivières luxuriants où brûle la soif éternelle,

et le sempiternel épuisement, et la douleur persistante.  

 




 

Version d’Arthur BENGA NDJEME : Nancy, le 2 Mai de l’An X, 16h 26.

 


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posté le 03-05-2010 à 13:38:44 GMT +2

CONTRIBUTION AU DEBAT SUR LE VOILE INTEGRAL

 Appel à contribution pour un article collectif sur la question de la Burqa, dont la mouture ci-après est une proposition de plan de travail:

 

 
LA BURQA. Liberté d’expression ou violation des droits de l’Homme ?

  


Prolégomènes de la burqa

1-Le port du voile intégral comme liberté d’expression

-Existe-t-il un code vestimentaire en France ?

a)-La liberté vestimentaire

b)-La protection contre les attentats à la pudeur


2-La Loi anti-burqa, violation des droits de l’Homme ?

-Le voile intégral menace-t-il les valeurs de la République ?

a)-Les principes juridiques incompatibles avec la burqa

*L’argument de l’égalité républicaine

*La préservation de la laïcité

b)-Les valeurs politiques invoquées contre le voile islamique

*La protection de la liberté de la femme

*La prévention du sentiment xéphonophobe

*Le reflux de l’identité nationale

 

 Pour approfondir…

 

Arthur BENGA NDJEME, Nancy.
 


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africanostra  le 04-05-2010 à 09:55:58  #

C'est parfait!

Thizi  le 03-05-2010 à 19:07:47  #

Je suis tres interessée. Je te ferai savoir mes disponibilités.

africanostra  le 03-05-2010 à 18:14:50  #   (site)

Pour participer à la contribution, je te propose de la rédiger avec moi. Je l'écris et te l'envoie pour amendements avant publication comme co-auteurs. Fais-moi signe si cela te convient et dès que ton agenda te le permettra, afin de convenir d'une échéance.Bonsoir.

Thizi  le 03-05-2010 à 17:26:54  #

Comment peut-on participer à la contribution de ce rapport?

 
 
posté le 03-05-2010 à 01:17:28 GMT +2

UN MOMENT D'ANTHROPOLOGIE

 

 

(Cliquez sur le fichier pour une meilleure lecture)

 

 

 


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posté le 02-05-2010 à 14:44:56 GMT +2

TU GAGNERAS TON PAIN A LA SUEUR DE TON FRONT

 

LE TRAVAIL

      

 

 

 

« C'EST PAR LE TRAVAIL que l'homme doit se procurer le pain quotidien et contribuer au progrès continuel des sciences et de la technique, et surtout à l'élévation constante, culturelle et morale, de la société dans laquelle il vit en communauté avec ses frères. »

 

  Jean Paul II, Laborem Exercens (Bénédictions),14 Septembre 1981 (http://www.vatican.va/edocs/FRA0076/_INDEX.HTM) 

       

 

 

 

***

Quel épuisant oxymore, que celui de « travailleur pauvre ! »

Après avoir fait l’apologie de la Pauvreté (Africanostra, 30 Avril 2010)*, il convient de consacrer une page au Travail en ce jour symbolique, même si le phénomène des « travailleurs pauvres » nous rappelle combien l’impact de l’indigence est un fléau qui menace gravement notre Société.

 

Entendu comme tâche, ouvrage, fonction, idéologie, valeur et même loisir, le Travail revêt une multitude de définitions. Le Travail est défini par Gérard CORNU (Vocabulaire juridique, 6e édition, Association Henri Capitant, PUF/Quadrige, 2004, p.914)*, comme l’« [a]ctivité humaine, manuelle ou intellectuelle exercée en vue d’un résultat utile déterminé », avant de poursuivre en nuançant : « Dans le langage courant, se confond avec la notion d’activité professionnelle, productrice, d’utilité sociale et destinée à assurer à un individu les revenus nécessaires à sa subsistance. » C’est pourquoi, « [d]ans un sens plus restreint, s’utilise souvent pour désigner une activité salariée. » Cette dernière définition semble directement tirée de la législation.

 

Du Droit gabonais, est-il possible d’entrevoir la définition du Travail à travers celle que l’article premier, alinéa 2 du Code du travail donne au travailleur : « toute personne qui s’est engagée à mettre son activité professionnelle, moyennant rémunération, sous la direction et l’autorité d’une autre » (Loi n°3/94 du 21 Novembre 1994)*. L’idée se confirme et se précise davantage, quelques articles plus loin, dans la mesure où le Code du travail établit que « [l]e contrat individuel de travail est une convention par laquelle une personne s’engage à mettre son activité professionnelle sous la direction et l’autorité d’une autre personne qui s’oblige à lui payer en contrepartie une rémunération » (article 18, alinéa 1)*.

 

 

L’idée d’autorité et de contrepartie amène à sonder les sphères supérieures de l’environnement humain, pour se rendre compte que le Travail n’est pas un accident de l’Evolution ou de la modernité.L’encyclique papale, Laborem Exercens, affirme à ce sujet, que « [l]e mot « travail » désigne tout travail accompli par l’homme, quelles que soient les caractéristiques et les circonstances de ce travail, autrement dit toute activité humaine qui peut et qui doit être reconnue comme travail parmi la richesse des activités dont l’homme est capable et auxquelles il est prédisposé par sa nature même, en vertu de son caractère humain. » Et à Jean Paul II de poursuivre son analyse en précisant, plus spirituel qu’au début : « Fait à l'image, à la ressemblance de Dieu lui-même dans l'univers visible et établi dans celui-ci pour dominer la terre , l'homme est donc dès le commencement appelé au travail. Le travail est l'une des caractéristiques qui distinguent l'homme du reste des créatures dont l'activité, liée à la subsistance, ne peut être appelée travail; seul l'homme est capable de travail, seul l'homme l'accomplit et par le fait même remplit de son travail son existence sur la terre » (Bénédiction)*.

 

 

Aux nombreuses préoccupations que continue de susciter le Travail, l’une des plus vieilles, et qu’il me semble utile d’évoquer en ce 1er Mai, est celle qui consiste à se demander si le Travail est un droit ou un devoir ; une prérogative ou une peine ; une malédiction ou un acte de liberté. Il s’agit, en somme, d’examiner le lien intime que l’homme entretient dès les premiers éclats de la Création avec le Travail. Jusqu’où vont évoluer ce corps à corps, ce tête-à-tête, ce face-à-face irréductibles entre le sujet et son instrument? Après que la doctrine judéo-chrétienne ait dignement présenté l’Homme comme l’enfant chéri de la Divinité, intronisé par le Père qui lui donne mandat de dominer sur toutes les créatures et tous les espaces de l’univers et de l’esprit, multiplier, labourer, fructifier puis soumettre la Terre, l’évolution tendancieuse du Travail ne risque-t-elle pas de réduire l’héritier du Trône divin à l’ultime opprobre de l’errance et de l’esclavage ?

 

Telle est la préoccupation, qui angoisse les diplômés de tous horizons et arrachent les cheveux aux experts de tout poil en sciences religieuses, juridiques, économiques, philosophiques et sociales où, chacun émet des réflexions aussi ingénieuses que passionnantes, et où chacun cultive une idée plus ou moins précise d’un couple formé sur un malentendu : l’Homme et le Travail ; la Pensée et la Technique ; l’Esprit et la Valeur. Sur la base du Livre de la Genèse, Chapitre 3, verset 19, des encycliques papales s’y sont penchées avec une profondeur d’esprit et un frisson d’humanisme exceptionnels (notamment : Rerum Novarum de Léon XIII et Laborem Exercens de Jean Paul II)*.

 

 

 

Les Constitutions, les Codes, les Traités, la jurisprudence ; les programmes universitaires, rapports, colloques et conférences s’en saisissent au quotidien, avec plus ou moins de succès. Car le Travail n’a de cesse de se métamorphoser, de se déguiser, de se diversifier, de s’amplifier, de s’éparpiller ; à tel point que des processions de chômeurs patrouillent le Monde, bravent des mers et des océans déchaînés à sa recherche, diplômes, qualifications et dignité au front ! Où est le Travail ? Que devient-il ? Qu’est-il devenu ? Que va-t-il devenir à l’aune des avancées technologiques et du multilinguisme ?

 

C’est au regard de cette profusion de sources d’inspiration, que je choisis, pour le présent exposé, d’examiner la question du Travail à travers les deux notions transversales, dont l’analyse recoupe l’ensemble des questions que pose à l’Humanité une activité en perpétuelle mutation. Il s’agit de voir précisément en quoi le Travail est-il un droit (I) et dans quelle mesure constitue-t-il un devoir (II). En guise de synthèse à ces premiers axes, il importera, en définitive, de reconsidérer le Travail en tant qu’expression de la Liberté (III).  

 

 

I-En quoi le Travail est-il un droit ?

Certains textes juridiques comme la Constitution d’Afghanistan de Janvier 2004, font du travail un droit (Article 48 : « Work is the right of every Afghan »)*. Les Constitutions française et gabonaise ont une conception plus ambiguë, qu’il conviendra de voir plus avant (infra : II, 1)*. En raison de son arrimage explicite aux Conventions internationales, on ne peut s’empêcher de voir dans la disposition de la Constitution afghane quelque référence à la Déclaration universelle des Droits de l’Homme, qui affirme que « [t]oute personne a droit au travail… » (Article 23§ 1)*. En quoi consiste concrètement ce droit consubstantiel au travail ? Toutes les principales sciences évoquées en introduction considérées, il importe de rappeler le plus simplement du monde, que travailler c’est réaliser le droit de vivre (1) et le droit de s’enrichir (2). 

 

 

(1)-Le droit de vivre

En écoutant un jour Johnny Hallyday répondant à une interview sur les motivations qui l’ont conduit à chanter, le grand artiste répondit : « Pour manger ». Il me semble que cette réponse traduit, sous son apparente simplicité, la vocation première du Travail car l’homme travaille pour vivre. La lecture au second degré de la Sentence divine à Adam dans le Livre de la Genèse aide utilement à s’en rappeler : « Tu gagneras ton pain à la sueur de ton front, jusqu’à ce que tu retournes à la terre dont tu as été tiré » (Genèse 3 : 19)*. Hymne à l’effort et au mérite personnels, au regard de la responsabilité que l’Homme a vis-à-vis de lui-même et des autres !

 

Le premier degré de lecture de cette Parole est exposé plus avant (infra, II)*. Mais ladite Parole sous-entend, ici, que le Travail permet de se nourrir, d’œuvrer à l’entretien de sa famille et à la survie de la Collectivité dans son ensemble, puisque certaines personnes sont inaptes au Travail. Le Code du travail de la République du Gabon s’en inspire nettement, en disposant que « Les conditions dans lesquelles [le Travail] est accompli doivent permettre au travailleur et aux membres de sa famille de subvenir normalement à leurs besoins, de protéger leur santé et de jouir de conditions de vie décentes » (article 3, in fine)*. Le Travail ne saurait donc constituer, ici, une épreuve, une activité de damnation, tant il est la clef de l’accomplissement et du développement social de l’individu.

 

En outre, à l’instar de la constitution française, « [t]out être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence » (alinéa 11 du Préambule 1946, in Michel de VILLIERS, Dictionnaire de droit constitutionnel, 3e édition, Armand Colin, Paris, 2001, p.239)*. Le Pape Léon XIII ne préconisa-t-il pas « la charité reine et maîtresse de toutes les vertus », comme valeur d’accompagnement des accidentés de la vie ? Le Travail gagne ici en éthique. Une amélioration des arbitraires coutumes antiques, qui permet à son lointain successeur de préciser cette pensée dans le Laborem Exercens : « Cela veut dire seulement que le premier fondement de la valeur du travail est l'homme lui-même, son sujet » (voir §6. Le travail au sens subjectif: l'homme, sujet du travail)*.

 

Le Millénaire qui ronge peu à peu sa dixième année s’inscrirait bien dans une dynamique de Solidarité universelle, si ceux qui détiennent le destin des Nation prêtaient tant soit peu attention aux positions de l’encyclique Rerum Novarum (A.S.S. XXIII (1890-1891), pp. 641-670. Traduction française dans Actes de Léon XIII, B.P., tome III, pp. 18-71 )*; parce que, le Travail n’est pas qu’une activité qui permette à l’homme de se nourrir. Il lui permet également, ou malheureusement, de s’enrichir.  

 

(2)-Le droit de s’enrichir

L’une des questions que tout étudiant en Droit découvre durant son cursus en tronc commun est ainsi formulée : « Peut-on s’enrichir en travaillant ? » Le sens que j’entrevois en cette interrogation présuppose que le fruit du Travail, le salaire, ne peut raisonnablement permettre à son bénéficiaire de justifier d’une fortune. Dans ce cas, la question sous-entend, que si quelqu’un prétend s’être enrichi à partir de son salaire, il dissimule de toute évidence des revenus d’une activité parallèle au demeurant illicite. En l’occurrence, les fruits de la Propriété ou de l’Exploitation de la force de travail des classes laborieuses. Les doctrines de Pierre-Joseph PROUDHON et de Karl MARX ne sont manifestement pas innocentes au succès de cette perception du Travail.

 

Aussi, le rapprochement entre le Travail et l’enrichissement présume-t-il une incompatibilité entre une activité faite pour la fortune du propriétaire du capital (l’employeur) et la richesse (accidentelle) de celui dont l’ouvrage est de faire fructifier ce capital (l’ouvrier, l’employé). En somme, la réponse devrait être négative. Non, on ne peut s’enrichir, devenir riche ou amasser une fortune en travaillant. Le Travail épuise. Il est fait pour la prospérité du patron, du possédant.

 

Cependant, lorsqu’on prend la question à l’envers, une objection sous forme de questionnement peut également être opposée à ce sujet d’examen donné sous diverses formes aux étudiants juristes. Et ces contre-questions consistent à se demander : si on ne s’enrichit pas par le Travail, quel(s) autre(s) type(s) d’activité produit-il la richesse ? Certains Traders ou boursicoteurs, les chefs d’entreprise ou industriels tels Bill Gates et Lakshmi Mitall n’ont-ils pas travaillé avant d’être riches ? Il s’agit là de questions techniques, qui obligent à disserter sur les notions de Travail, d’Activité et d’Emploi. Mais l’essentiel pour notre exposé réside dans la recherche des éléments d’enrichissement de l’homme par le Travail.

 

Aussi, faut-il prendre la notion de richesse ou d’enrichissement au sens large. En effet, lors d’un long mois de surveillance d’examens à l’Université Nancy comme vacataire, une étudiante au demeurant voisine de palier me fait remarquer qu’être assis à la chaire cinq heures par jour n’était « pas très enrichissant ! » Je comprends, à cet instant, que la notion d’enrichissement par le Travail évoque bien plus en termes d’apports que la seule rétribution. Je suis, peu après, conforté dans ce sentiment par une collègue Attaché temporaire d’enseignement et de recherche (ATER), qui se félicitait de son recrutement en m’assurant que son emploi était « très formateur. » J’aurais donc la faiblesse de penser que l’homme peut s’enrichir par le Travail, sous-entendu que l’enrichissement peut à la fois signifier fortune ou accroissement de biens, fertilisation ou instruction (Le Petit Robert, 1993, p.865 à 866)*. Ce qui ne veut par ailleurs pas dire que le Travail soit la panacée pour atteindre ce but.

 

Toutefois, le fait que le Travail, exposé ici en tant que droit constitue tout autant un devoir, raffermit cette vocation à rendre prospère, à rendre l’homme « plus homme » (Jean Paul II)*.

  

II-Dans quelle mesure le Travail constitue-t-il un devoir ?

Une observation naïve des règles religieuses donne à penser que le Travail, qui se confond souvent avec la notion d’emploi, est aussi perçu comme un devoir. L’une de ces règles est posée par la lecture au premier degré du Chapitre 3, verset 19 du Livre de la Genèse mentionné plus haut (supra, I, 1)* : « Tu gagneras ton pain à la sueur de ton front… » Il ne s’agit pas ici d’une information destinée à Adam sur ce que sera son avenir ni sur son menu ; on peut entendre cette Parole comme une règle édictée à l’homme par Dieu, pour l’exécution d’un devoir : souffrir pour manger ; vivre de son effort. Certains textes constitutionnels et de Droit commun s’emparent de cette idée du Travail-devoir et y ajoutent l’élément d’expiation qui transparaît de la désobéissance d’Adam et Eve, en faisant du Travail une contribution à l’effort public (1) et une réparation des torts causés à la Société (2). 

 

 

(1)-Une contribution à l’effort public

Il est précédemment indiqué, que les Constitutions gabonaise et française ont du Travail, équilibré par la notion d’emploi, une conception plutôt différente de la Constitution d’Afghanistan (supra : I)*. Pour la Loi fondamentale du Gabon, en effet, « [c]haque citoyen a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi… » (Article premier, alinéa 7)*. Cette formule est visiblement une version améliorée du texte constitutionnel français, qui proclame que « [c]hacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi… » (Préambule de 1946, alinéa 5)*. Le Code du travail du Gabon confirme le double enjeu de la disposition constitutionnelle, en affirmant que « [t]oute personne, y compris la personne handicapée, a droit au travail, l’exercice d’une activité professionnelle est un devoir national » (article 2, alinéa 1)*.

 

Le Travail, en tant qu’ouvrage participant à la prospérité de la Société et donc à la construction de l’Etat, fait alors office de contribution à l’effort public ; et cette contribution est globalement représentée par l’impôt, ressource principalement dérivée du Travail. D’ailleurs, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 composant le bloc de constitutionnalité du Gabon et de la France, contient un article 13 qui proclame que le principe de la « contribution commune est indispensable ». C’est sans doute la raison pour laquelle, le Code du travail gabonais affirme que «[l]’Etat reconnaît l’importance du rôle de l’employeur et du travailleur dans le développement de l’économie nationale… » (article 7)*. Que serait l’Etat, si nous ne travaillions pas ? Où trouverait-il ses ressources ? A qui prélèverait et ponctionnerait-il les revenus destinées aux charges de la Collectivité ? La réponse coule de source : le Travail est le cœur battant de la société humaine.

 

Cependant, la vocation du Travail à l’effort collectif ne doit en aucun cas prendre le pas sur sa nature de droit et devenir une oppression. La situation ne nécessite pas d’être ici évoquée ; mais on ne peut ne pas s’interroger sur le dramatique phénomène des suicides au travail, tandis que des milliards d’individus sont en quête perpétuelle d’activité rémunérée à travers le monde. On voit, dès lors, qu’à l’instar des ressources hydrauliques, le marché du Travail est victime d’une redistribution inéquitable.

 

Pour revenir à sa valeur comme pénitence, vraisemblablement tirée de la Bible et de l’effort public, sa vocation en tant que devoir peut aussi faire du Travail un moyen de réparation des torts causés à la Société. 

 

 

(2)-Une réparation de certains torts causés à la Société

Le Droit pénal français comporte une sanction dénommée travail d’intérêt général, consistant en une « Peine correctionnelle astreignant le condamné à travailler sans recevoir de rémunération, pendant un durée déterminée, au profit d’une personne morale de droit public ou d’une association habilitée, qui peut être prononcée, si le prévenu est présent et y consent, lorsque le délit qu’il a commis est puni d’emprisonnement (peine que le travail, peine alternative, remplace » (Gérard CORNU, Op. cit., p.915)*. Ainsi, le Travail apparaît-il comme une réparation de certains torts que l’individu cause à la Société. Le fond religieux d’acte rédempteur n’est manifestement pas étranger à cette mesure correctionnelle.Il suit de là, que le Travail est, en sus du fait d’être droit et devoir, comporte en définitive une dimension qui permet à l’individu de (re)conquérir voire, d’exprimer sa Liberté.  

 

 

III-Reconsidérer le Travail en tant qu’expression de la Liberté

Bien loin ou même conséquence de sa mythique étymologie latine (tripalium, type d’instrument de torture), le Travail est l’expression la mieux aboutie de la Liberté de celui qui aspire à le réaliser et l’exécute. Liberté de choix de choix de son activité (1) et Liberté vis-à-vis de la nature (2).  

 

 

(1)-Liberté de choix de son activité

Les principaux Codes pris en tant que références pour le présent exposé sont tous fondés sur le principe de la liberté de choix du Travail. En effet, il résulte de l’article 4 du Code du travail gabonais le prescrit selon lequel, « [l]e travail forcé ou obligatoire est interdit. L’expression travail forcé ou obligatoire désigne tout travail ou tout service exigé d’un individu sous la menace d’une peine quelconque, et pour lequel ledit individu ne s’est pas offert de plein gré. » Toute exigence, qui incrimine explicitement les vices de consentement dans le contrat liant le travailleur à son employeur, tel qu’il ressort de l’interdiction des manœuvres contraignantes, violentes, fallacieuses et dolosives portant atteinte à la volonté de l’employé (article 5-a) du Code civil)*.

 

La signature ou conclusion du contrat de travail est alors faite « librement soit verbalement, soit par écrit » à condition de justifier d’un état de santé exempt de tout risque de contagion et d’une aptitude certifiée à l’emploi auquel le travailleur se destine (article 19)*.

 

 

On peut d’ailleurs observer que dans l’escarcelle de la volonté pleine et éclairée tombent d’autres types de principe et de droit fondamentaux de la personne humaine, dans la Loi n°3/94, qui en exprime vigoureusement l’idée en ce qu’elle dispose, un article au-dessus, que «[l]e travail est une source de valeur ; il exige que les libertés et la dignité de celui qui l’exerce soient respectées… » (article 3, précité)* Le principe de Liberté dans le choix du Travail est si capital, que sa violation est assortie d’une amende de 300 000 à 600 000 francs cfa, pouvant aller jusqu’à 1 200 000 et une peine d’emprisonnement de douze mois en cas de récidive (article 16)*.

 

A ces éléments d’ordres juridique et économique s’y ajoutent d’autres, plus philosophiques et existentiels car le Travail est tout autant l’expression d’un consentement de plein gré, qu’un acte de Libération de l’homme vis-à-vis de la Nature. 

 

(2)-Liberté vis-à-vis de la Nature

En observant des hippopotames dans leur marre glauque, on perçoit combien le règne animal n’est pas concerné par la notion de Travail ; tout leur vient de la Nature et par celle-ci. Il en fut de même des spécimens qui nous ont précédés et en est encore certainement ainsi de certaines communautés humaines échappant, pour l’instant, à la frénésie des commodités.

 

Or, l’homme se distingue notablement du règne animal, quels qu’en soient le degré de développement ou le rapport à la technologie car, ouvrage exécuté en contrepartie d’une rétribution ou activité effectuée pour la survie, le Travail peut être originellement perçu comme l’acte qui nous permet de nous libérer de la Nature.

 

En partant de l’observation antérieure, selon laquelle toutes les formes de contrepartie et d’enrichissement consécutifs au Travail ne sont pas nécessairement d’ordre pécuniaire, il apparaît alors essentiel de concéder que l’œuvre d’affranchissement de l’homme vis-à-vis de la Nature est le fruit de son Labeur ; lui qui gagne désormais son pain à la sueur de son front ; lui qui dut donc transformer, travailler la forêt, la dominer, y semer du blé, le battre, le moudre, le faire cuire, avant de le manger ! Quelle autre rétribution ? Quel autre salaire ? Quelle autre rémunération peut-il attendre, que son « pain » ? N’appelle-t-on pas, par métaphore, le Travail notre « gagne pain » ?

 

L’encyclique Laborem Exercens aide quelque peu à démêler ce délicat écheveau. En effet, au Titre II de sa lettre, consacré au travail de l’homme, Jean Paul II écrit ce qu’il suit : « En devenant toujours plus maître de la terre grâce à son travail et en affermissant, par le travail également, sa domination sur le monde visible, l'homme reste, dans chaque cas et à chaque phase de ce processus, dans la ligne du plan originel du Créateur; et ce plan est nécessairement et indissolublement lié au fait que l'être humain a été créé, en qualité d'homme et de femme, «à l'image de Dieu». Ce processus est également universel: il concerne tous les hommes, chaque génération, chaque phase du développement économique et culturel, et en même temps c'est un processus qui se réalise en chaque homme, en chaque être humain conscient » (voir paragraphe 4. Au Livre de la Genèse)*. Autrement dit, eux et nous; vous et moi.

 

 Le Travail confirmant davantage sa double nature de droit et devoir, se manifeste d’autant comme un instrument de soumission de la Nature.  

 

 

***

Le Travail, clef fondamentale et ultime du développement social ?

Les deux corps du Travail (droit et devoir) font du contrat de travail l’obligation la mieux protégée et la plus conflictuelle du monde. Toutes les sciences, tous les secteurs d’activité s’en sont mêlés et continuent à œuvrer à l’amélioration des conditions dans lesquelles le Travail est accompli et aux précautions prises à l’égard du travailleur en termes d’embauche, de santé, de loisir, de formation, de durée des tâches ; à tel point qu’on privilégie davantage l’expression de « Droit social » à celle de Droit du travail dans le système romano-germanique. L’évolution des technologies provoquant ou promettant de nouvelles maladies professionnelles, il faut s’attendre à ce que les mesures, les règles, les conventions et les contentieux soient encore plus denses qu’au siècle dernier.

 

Et, nulle Société, quelque rustique qu’elle paraisse, ne pourra échapper à cette harmonisation et à cette humanisation forcée par le truchement du Travail ; instrument de torture ancestral devenu une clef de Félicité en constante dilatation. C’est au regard de cette Société d’incertitudes et de promesses, qu’en ce jour spécialement dédié au Travail, et donc au travailleur, on ne peut s’empêcher se rendre hommage à un certain nombre d’illustres ouvrages y relatifs.

 

Rendre tout d’abord hommage à Léon XIII qui, dans son encyclique papale, Rerum Novarum, déclarait à la fin du XIXe siècle :

 

« La soif d'innovations qui depuis longtemps s'est emparée des sociétés et les tient dans une agitation fiévreuse devait, tôt ou tard, passer des régions de la politique dans la sphère voisine de l'économie sociale. En effet, l'industrie s'est développée et ses méthodes se sont complètement renouvelées. Les rapports entre patrons et ouvriers se sont modifiés. La richesse a afflué entre les mains d'un petit nombre et la multitude a été laissée dans l'indigence. »

 

Rendre également hommage au Prix Nobel de la Paix, l’Organisation internationale du Travail :

 

« Attendu qu'une paix universelle et durable ne peut être fondée que sur la base de la justice sociale » (Préambule de la Constitution de l’OIT)*.

 

Rendre enfin hommage à Son Excellence Monsieur Ali BONGO ONDIMBA, Président de la République du Gabon :

 

« En effet, la pauvreté d’une manière générale, accroît les risques de l’effondrement économique du pays et favorise le développement des extrémismes, et partant, du terrorisme » (Discours devant le corps diplomatique, Libreville, Janvier 2010)*.

 

Ces trois références montrent à quel point le Travail cristallise l’attention des opinions et occupe une place de choix dans les stratégies des Etats et des Organisations internationales. Toutefois, Obama et ses tumultueux concitoyens menaçant d’émigrer sur Mars, on aimerait bien savoir par quel vaisseau enverrons-nous nos CV (« courbez-vous ! »), et à combien s’élèvera le prix du timbre.

 

 

En attendant de trouver des réponses à ces tourments de travailleur, il m’est agréable de vous envoyer, à toutes et à tous, un agréable Parfum de muguet !

   

 

Arthur BENGA NDJEME : Nancy, le 1er Mai de l’An 10, 13h 39.

 

 

(Le bouquet de Jean-François Le Helloco)

 


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posté le 30-04-2010 à 23:02:20 GMT +2

UN MONDE SANS PAUVRETE

« LA GRANDE DESILLUSION »

    

 

 

 « Notre rêve : un monde sans pauvreté » 

 

Devise de la Banque mondiale,

in STIGLITZ, La grande désillusion, p.51   

 

 

 ***

Lutter contre la pauvreté n’est pas cultiver le fantasme de la richesse

Point n’est besoin de consulter quelque science ou technique, pour constater que la Pauvreté est l’ « Etat d’une personne qui manque de moyens matériels, d’argent [et une] insuffisance de ressources » (Le Petit Robert, 1993, p.1811)*. Dans une langue d’Afrique, cet état dramatique et avilissant dérivé de l’insolence de la vie a pour synonymes : dénuement (Bolumba), indigence (Boténdé), misère (Mékuku). Lutter contre la Pauvreté n’est donc pas cultiver le fantasme d’être ou devenir riche. Mais aller à la (re)conquête de la Dignité.

 

C’est sans nul doute à cet effet, que la Banque mondiale (BM) proclame, en guise de devise, cette inscription que met en relief son texte constitutif : « Notre rêve : un monde sans pauvreté. » Vœu pieux ? Projet d’éradication d’un phénomène complexe, qui avilit l’homme ? Serment farfelu participant à la gestion des conséquences du paupérisme sur l’équilibre international ? Joseph Eugène STIGLITZ, Prix Nobel d’économie, y répond de manière critique dans un maître-ouvrage intitulé : La grande désillusion (chez Fayard, Paris, 2002, 324 p.)*. La fin du mois d’Avril m’amène à y revenir, au titre des lectures du mois.

 

En réalité, il s’agit d’une relecture, qui me permet de reconsidérer ce livre au prisme de l’activité récente des institutions de Breton Woods dans le New Hampshire (Etats-Unis). Il s’agit, notamment, du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale. Comme le préconise STIGLITZ, tout risque de confusion préjudiciable à la spécificité de chacune de ces institutions doit-il être d’emblée levé. « L’une est vouée à l’éradication de la pauvreté, l’autre au maintien de la stabilité mondiale » (p.51)*. Les publications de l’une et l’autre, ainsi que les crises financière et climatique qui étranglent aujourd’hui les Nations mettent rudement à mal ces deux missions, aussi nobles soient-elles.

 

L’impact négatif des Puissances internationales et des pays industrialisés sur les politiques et les stratégies de la BM et du FMI porte préjudice aux bonnes intentions de ces institutions ; tout particulièrement, envers l’Afrique, berceau de la Pauvreté et siège universel de la Misère.

Par application d’une sorte de parallélisme des formes, le présent exposé sur La grande désillusion gagnerait à être réparti en deux points, exprimant chacun les actions et limites respectives de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international. Aussi, convient-il d’examiner, d’une part, les paradoxes du projet d’éradication de la Pauvreté (1) ; puis, d’autre part, les contradictions de la vocation à stabiliser le Monde (2).  

 

(1)-Les paradoxes du projet de la BM à éradiquer la Pauvreté

La Banque mondiale, la BIRD et l’IDA ont pour projet commun d’« Œuvrer pour un monde sans pauvreté », tel qu’il est indiqué en page d’accueil de leur site électronique. Ambitieux, n’est-ce pas ? Audacieux ? Certainement. Prétentieux ? Probablement. Je n’évoquerai ici que le rôle de la Banque mondiale, dont l’action fait l’objet du livre de Joseph STIGLITZ, ancien responsable de la prestigieuse institution. Convient-il donc de rappeler les principaux axes de lutte contre la Pauvreté (1°), avant de mettre à nu l’échec de ces objectifs au travers des faits (2°).

 

 1°/-Les principaux axes de lutte contre la Pauvreté

Après un premier effort essentiellement dirigé vers la reconstruction de l’Europe après la Seconde Guerre mondiale, la Banque mondiale s’est ensuite, pratiquement, spécialisée dans l’aide aux Etats en développement à limiter, voire vaincre le fléau de la Pauvreté. Mais l’aide au relèvement des régions (Afrique, Asie Centrale) et pays (Afghanistan, Kosovo, Timor-Leste, Liberia) en conflit ou en sortie de crise atteste encore du rôle primordial de la BM en matière de reconstruction post-conflit. La période transitoire observée dès les années 1980 a ouvert la Banque sur d’autres défis.

 

 *L’intervention dans les problèmes macroéconomiques

*L’implication aux questions de rééchelonnement de la dette

*L’action en faveur des défis sociaux et environnementaux

 

Toutefois, malgré cet activisme, à l’intérieur comme à l’extérieur de la Banque, de nombreuses voix se lèvent pour dénoncer le caractère inadapté et inefficace des opérations menées à l’endroit des « Pauvres ». C’est au chœur de ces critiques que s’ajoute le sentiment de « grande désillusion » d’un ancien de la maison : Joseph STIGLITZ.

 

2°/-L’échec du rêve de la Banque mondiale au travers des faits

Tout rose que puisse être le rêve du Groupe Banque mondiale en vue d’éradiquer la Pauvreté, la misère parcourt des régions entières au galop. Visiblement, le rapport WAPENHANS, dénonçant les travers de la Banque et les critiques acerbes énoncées au cours des Assemblées annuelles de Madrid (Espagne) en 1994 n’ont pas suffi à réconcilier l’illustre institution avec ses nobles objectifs (instauration du Panel d’inspection), tant le poids des intérêts des Puissances y est déterminant. Conséquence, les effets du capitalisme, conjugués à l’essor de l’économie globalisée, influent sur une Pauvreté de plus en plus croissante et dépeinte par ce pudique néologisme qu’est le « paupérisme ».

 

 

*A quand la fin de la Faim ?-Malgré la devise consistant à « Œuvrer pour un monde sans pauvreté », les instances internationales composant le système des Nations Unies (au demeurant pas plus efficaces que les institutions de Bretton Woods) constatent, avec amertume, que « Chaque Homme qui meurt de faim aujourd’hui, meurt assassiné » ! Cette déclaration à l’Assemblée générale de l’ONU du Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation en impute clairement la responsabilité aux pays industrialisés (Voir AG/ SHC/3861, 25 Octobre 2006 ; également, note du Secrétaire Général : A/61/306)*.

 

Le plus tragique dans cette descente de l’Homme aux enfers, c’est qu’à mesure que se développement les technologies (OGM, biotechnologies, bioénergies), les solutions à l’équation de la faim deviennent obstinément asymptotiques. Autrement dit, de plus en plus proches de zéro ; et, ce qui est valable pour la faim, l’est également pour l’accès à l’eau potable.

 

 

*Comment avoir accès à l’eau potable ?-La tragédie des pays et régions pauvres est à l’image du spectacle qu’offre la vie de certaines populations. Etre contraints de consommer l’eau des puits insalubres ou des marres, étangs et marigots, que d’autres utilisent pour leur toilette est aussi surréaliste qu’inhumain. Or, la vocation à lutter contre la Pauvreté devrait donner priorité à faciliter l’accès à l’eau potable à des milliards de personnes recensées dans l’ensemble des continents. Comment faut-il, à ces hommes et femmes, œuvrer pour avoir accès à l’eau potable, lors même qu’ils consomment moins d’un dollar par jour, sinon rien du tout ?

 

Telle est l’une des crevasses devenue cratère, que le Groupe Banque mondiale, champion de la lutte contre la Misère, laisse apparaître sur la belle route savamment tracée par ses missions, auxquelles s’ajoutent les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD)*. Or, la conséquence de la malnutrition, de la sous-alimentation et de la consommation de l’eau insalubre, c’est le développement des maladies chroniques.

 

 

*Qui vaincra donc les maladies chroniques ?-L’apparition ou la découverte officielle de certaines infections tel le chikungunya et des pandémies comme le Vih/Sida a pratiquement mis sous le boisseau le « statut sérologique » de certaines régions du monde, où continuent de sévir des maladies chroniques liées à un environnement insalubre : malaria, bilharziose, amibiase, lèpre, hépatites, onchocercose, fièvre jaune et des virus incurables de type ébola.

 

Les efforts de la Banque mondiale à cet sujet ont pour réponse des millions de « petites morts » par an, que dénombre l’Afrique, notamment. « Petites morts », pour reprendre une expression chère à RILKE, parce que certaines personnes meurent d’appendicite ; d’autre succombent d’éclampsie ; et de nombreuses autres, tout simplement, de rhumatismes. Cela peut paraître causasse. Mais la réalité est bien tragique, comme me le confiait un soir un client d’hôtel, Médecin togolais spécialisé en rhumatologie.

 

Sur le plan macroéconomique, le résultat du travail de la Banque mondiale et de son Groupe n’est pas plus reluisante pour la santé des appareils étatiques, à l’instar du goulot d’étranglement que constitue la Dette.

 

 

*Comment démêler le goulot de la Dette ?-L’endettement des pays pauvres auprès des bailleurs de fonds et des puissances industrialisées inhibe les maigres économies des emprunteurs, qu’un auteur, ancien membre du Gouvernement malien, a pu l’analyser comme un « étau » par rapport au développement, au rayonnement et à l’expression de la souveraineté des Etats endettés (Aminata TRAORE, L’étau)*. C’est sur ces différents points, que STIGLITZ stigmatise la Banque quant à ses méthodes de livraison de solutions préfabriquées à Washington, pour des pays dont les structures administratives et économiques sont inadaptées aux exigences monétaires et financières du système capitaliste.

 

En cette année 2010 bien entamée, quelle note, le Citoyen d’un Pays pauvre, client de la Banque mondiale, peut-il donner à cette institution ? Le prisme de la casuistique (examen au cas par cas) serait forcément réducteur ; et il lui faut préférer une vision globale à l’échelle africaine, pour se rendre compte de la détresse collective et de l’insécurité humaine qui y sévissent, nonobstant les engagements pris par la Banque mondiale pour éradiquer la Pauvreté de ce monde.

 

Bien loin d’aider au bonheur des Nations, le phénomène de la Dette les angoisse en grevant d’une lourde hypothèque leur vie présente et à venir. Loin de protéger les Etats contre l’explosion démographique et l’accroissement conséquent de leur propension à consommer, on leur propose de s’endetter pour payer leur Dette. Un cercle vicieux, qui rend incantatoire toute intention professée ou prophétisée aux fins d’élimination de la Misère en ce bas monde.

 

C’est au regard de ce travail, qui ressemble fort bien au travail de Sisyphe, fils d’Eole (du vent !), que le Prix Nobel d’économie s’insurge ouvertement contre l’hypocrisie des institutions économiques internationales, face à la Misère croissante d’un monde qu’elles prétendent sécuriser en le rendant plus prospère et équilibré.

 La critique de M. STIGLITZ est aussi acerbe à l’encontre de la Banque mondiale, rêveuse d’un monde prospère, qu’à l’endroit du FMI, héraut de la Croissance.  

 

(2)-Les limites de la vocation du FMI à stabiliser le Monde

La clé d’ouverture de La grande désillusion sur le FMI est symbolisée par la dénonciation de la confusion souvent entretenue entre les profits de General Motors et les intérêts vitaux de l’Administration des Etats-Unis d’Amérique. Et à STIGLITZ de transposer cette forme d’imperium de la plus grande entreprise américaine à la conception qu’a le Fonds monétaire international des flux économiques mondiaux. Car on l’entendrait pratiquement soupirer : « Ce que la communauté financière juge bon pour l’économie mondiale est bon pour l’économie mondiale, et il faut le faire » (p.84)*. En tant que Citoyen d’un Pays client du FMI, je ne puis m’empêcher de penser aux fameux Plans, Politiques ou Programmes d’ajustement structurel (PAS), dont le procès se fait partout. La sentence nous dira, à l’aune du livre de STIGLITZ, si la promotion de la Croissance est un succès ou un échec.

 

 

*Le procès des « PAS » partout !-En dehors de quelques exceptions, d’ailleurs obtenues au prix de sacrifices inconsidérés mais confirmant néanmoins la règle, les Plans d’ajustement structurel sont un véritable poison ; et non la cure de désintoxication promise, vendue, imposée aux Etats pauvres. De quoi s’agit-il, en clair ? Les PAS sont un type de politiques publiques préconisées par le FMI afin de restaurer l’équilibre budgétaire (Voir Africanostra, )* dans les pays démunis mais généreusement dissipateurs ; la restauration de ce principe essentiel des Finances publiques ayant pour buts ultimes de gérer rationnellement la dette publique et d’équilibrer la balance commerciale des sujets en cause.

 

Pour y parvenir, une impérieuse collaboration est établie entre le Fonds, qui dispose de la plus prestigieuse expertise ; et les Pays endettés, dont nombre de spécialistes vont quérir bonheur en exode. Plutôt qu’une négociation, il s’agit bien souvent de diktat imposé aux Pauvres qui, naturellement, ont du mal à mettre en œuvre des techniques importées, calculées froidement dans le climat austère des gratte-ciel. Heureusement, qu’il n’est pas besoin d’être expert pour comprendre que la notion même d’ « ajustement » implique un ensemble de réformes ambitieuses, vigoureuses et rigoureuses au cœur de l’appareil étatique.

 

Ces méthodes qui s’apparentent à celles appliquées à des entreprises en redressement judiciaire horripilent les masses critiques des Pays pauvres, jusqu’à trouver en Joseph STIGLITZ un allié de renommée mondiale. Le procès des PAS, partout, se font entendre. L’une des illustrations les plus romancées est donnée par une excellente production cinématographique tournée au Mali à l’instigation de Mme TRAORE, parodiant en audience populaire un exemple de procès que les Africains voudraient volontiers intenter aux politiques d’austérité imposées par « l’arme économique » en Politique internationale (Marie-Hélène LABBE, L’arme économique dans les relations internationales, PUF, « Que sais-je ? », Paris, 1994, pp.60-71)*.

 

Aussi, bien loin de stabiliser le monde, on le précarise, l’insécurise et le divise davantage. Loin d’œuvrer au développement pacifique et durable de jeunes Etats, à peine cinquantenaires, les institutions qui ont en charge les clés de leur destin imposent une conditionnalité plus désastreuse que les « arrières-pensées politiques » caractérisant l’action financière des partenaires bilatéraux (Jean CHARPENTIER, Les institutions internationales, 14e édition, Mémento Dalloz, « Droit public-Science politique », Paris, 1999, p.119)*. Ainsi, plutôt qu’une négociation, qui implique dialogue et harmonisation des points de vue, les rapports entre le FMI et la majorité de ses clients (Pays pauvres) sont, au mieux hypocrites ; au pire, déséquilibrés, à telle enseigne qu’il est légitime de se demander qui, d’entre le Fonds et les Etats, exercent réellement la Souveraineté.

 

Le désir, la nécessité, la faim de noter le FMI sont si pressants, qu’il importe de voir, comme le préconise STIGLITZ, « jusqu’à quel point » (p.84)* le FMI a-t-il échoué ou réussi en matière de promotion de la Croissance.

 

 

*Promotion de la Croissance : succès ou échec ?-Hormis les deux ou trois principales économies, qui affichent des taux de croissance à deux chiffres ou, tout au moins, proches de 10%, le reste du monde peine à dépasser les 5%. Que dire alors des Pays pauvres ! On remarquera, par exemple, que la plupart des analystes africains exposent souvent, avec fierté, les taux de leurs pays, avoisinant les 2 à 4% de croissance. Lors qu’on sait que les flux monétaires et financiers y sont quasiment insignifiants, on est tenté d’épouser la scandaleuse formule de MAYER, qui scandait que « Si l’Afrique disparaissait de la planète, personne ne s’en rendrait compte, tant son incidence économique est fort négligeable ». Ce qui signifie, qu’au plan économique et financier, cet immense continent qu’est l’Afrique n’existe pas.

 

De nombreux économistes, d’Afrique et d’ailleurs, se sont insurgés contre cette perception qu’on qualifierait d’« afro-pessimiste » (faisons-nous plaisir !) Mais, laissons la controverses aux experts. A notre modeste place de lecteur néophyte, on se contentera de noter, simplement, le caractère marginal ou accessoire de dizaines d’Etats dans le jeu compétitif et universel des équilibres internationaux. Quelle en est la responsabilité du FMI, dont la mission consiste, justement, à œuvrer pour la stabilité mondiale ?

 

Ce n’est pas en traumatisant les économies, qui ont le plus besoin d’accompagnement, de formation, de performance, de productivité et d’expérience que le Fonds travaillera efficacement à la Croissance. Surtout, lorsqu’il applique aux Etats en phase d’ « incubation », des techniques en vigueur dans les systèmes rôdés. Comme le souligne STIGLITZ, les pratiques des institutions internationales laissent ainsi apparaître une suite de « promesses non tenues » (Chapitre 2)*   

 

 

 

***

Pour en finir avec des rêves sans couleur

En définitive, en s’investissant dans une critique systémique de la Banque mondiale t du Fonds monétaire international, le professeur STIGLITZ apporte une contribution essentielle à la démocratisation des sujets internationaux non-étatiques. En effet, « [d]ans les démocraties modernes, nous attendons de toute autorité publique qu’elle soit responsable devant les citoyens, observe-t-il. Les institutions économiques internationales ont échappé à cette responsabilité directe. L’heure est venue de les « noter », elles aussi, à l’aune de leurs résultats, d’examiner leurs activités pour évaluer jusqu’à quel point elles ont réussi – ou échoué – dans la lutte pour la croissance et contre la pauvreté » (La grande désillusion, Fayard, Op. cit., p.84)*. Alors, en tant que Citoyen d’un Pays pauvre et d’un monde en perpétuelle mutation, je vous propose d’en finir avec des rêves sans couleur : un monde sans Pauvreté.

 

Bien au contraire. Il faut, partout, cultiver la Pauvreté. Elle éperonne l’Esprit. Elle stimule le marché des Savoirs. Le Pauvre donne de la couleur à la ville et au monde ; et il y a sept (7) raisons d’aimer ou souhaiter être Pauvre :

 

1-Le pauvre est bleu : il a peur ;

2-Le pauvre est rouge : il est émotif ;

3-Le pauvre est vert : il est en colère ;

4-Le pauvre est jaune : il rit à contrecœur ;

5-Le pauvre est blanc : il est innocent ;

6-Le pauvre est rose : il honore les plaisirs ;

7-Le pauvre est noir : il est invisible !

 

Avec mes sincères remerciements pour votre compagnie tout au long de ce mois d’Avril 2010 qui, déjà, nous manque.

 

 

 

 Arthur BENGA NDJEME : Nancy, le 30 Avril 2010, 23h 00. 

 


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